Chapitre 24

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Ils étaient une dixaine à avoir été sélectionnés dans l'équipe et aujourd'hui marque le premier entraînement avec tout le monde de réuni -anciens et nouveaux joueurs. 
Gaspard avait passé le week-end avec Zack et Toby, il leur avait appris des jurons en français et en retour, ils lui avaient promis de l'entraîner de manière intensive de sorte à ce qu'il puisse être apte à jouer toute la saison. C'était un deal qui convenait au français, encore trop frêle pour tenir sur tout un match.

Mais ce matin, Gaspard commençait à repenser ce deal. 

En effet, le parisien s'attendait à enfiler ses patins et à glisser toute la matinée, ce qui finalement, l'enchantait bien. A la place, Zack et Toby leur avaient concocté une séance dédiée à la musculation, pendant trois bonnes heures.
"Vous ne pouvez pas jouer au hockey en ressemblant à des spaghettis" avait dit Zack. 
Le capitaine pouvait parler ; il mesurait un mètre quatre-vingt-cinq, avait les épaules larges bien bâties et globalement, une musculature parfaite, de quoi faire baver toutes les filles du campus, et certains mecs. 
Alors pendant trois heures, Gaspard avait enchaîné tractions, pompes, développés-couchés et corde à sauter. En boucle. Ses muscles lui faisaient aussi mal que lors du jour des sélections, mais cette fois-ci, il était déterminé à prendre en masse, de ce fait, avoir mal ne le dérangeait pas.

"Et vingt...souffle le garçon en laissant Gaspard récupérer la barre de traction. Alors, j'étais comment ? 

Gaspard repose la barre et s'essuie le visage avec sa serviette. La salle de musculation est bruyante et toutes les fenêtres sont ouvertes, laissant un courant d'air froid se faufiler entre les chaussures des athlètes.

- Un peu laborieux, mais ce n'est que la première séance. Tout le monde n'a pas mon talent, répond le français dans un sourire en coin.

Le binôme de Gaspard lui jette sa serviette usée et par chance, le français parvient à l'attraper avant qu'elle ne l'atteigne. 

- Tu viens chez Georgie, ce soir ? lui demande Nick en rangeant les poids. 

Gaspard en attrape deux et les range sur l'étagère dédiée. 

- Pour ? 

- Elle fait une soirée, répond Nick. 

La dernière soirée à laquelle Gaspard s'est rendu, c'est cette Georgie qui l'y a invité. Il se souvient alors de la première impression qu'il a eue en entrant dans la maison rose : drogue, alcool et sexe à tout va. A l'époque, il ne connaissait personne à part Vic, ce qui explique peut-être son malaise. Mais aujourd'hui, il se rapproche de pas mal de monde sur le campus, sans oublier qu'à l'origine, Gaspard de Montesson est un vrai fêtard.

- Elle ne m'a même pas invité, remarque Gaspard indifférent.

Nick suspend tout mouvement et le regarde faussement agaçé.

- Mec, si tu t'attends à recevoir une invitation dans ta boîte aux lettres tous les week-ends, c'est sûr que tu ne seras invité nulle part.

Nick marque un point. Gaspard se rend compte qu'ici, personne n'attend de recevoir un message ou une invitation orale pour se rendre aux soirées. C'est peut-être sa culture française qui le rend si conventionnel. Il espère s'en défaire dans les six mois qui suivent, un nouveau défi ajouté à sa liste.

- Ok, je suis partant."

Le nouvel ami du français lui tape dans la main, se réjouissant. 


La journée de Gaspard passe à une vitesse folle, ses cours sont étrangement captivants et au moins deux personnes l'invitent à la fête de Georgie -bien qu'il ait compris qu'il n'avait pas besoin d'invitation. On dirait bien que la côte du frenchie grimpe à grande allure.  

Comme d'habitude, lorsque 15h sonne, Gaspard attend Vic sur le parvis de l'école. Ils ont pris un peu de retard sur leur programme de révisions, ayant privilégié les sorties extra-scolaires, les dîners chez Vic ou encore les soirées ciné chez Gaspard.
Vic arrive, le visage toujours aussi renfrogné que les autres jours, mais cette fois-ci, lorsque son regard croise celui du grand brun, elle se met à sourire. Elle sourit tellement que sa fossette droite ressort. Elle sourit tellement que Gaspard croit voir naître une nouvelle fossette sur sa joue gauche.

"Salut, toi, dit Victoria en enlaçant ses bras autour de la nuque de Gaspard.

Pourquoi est-elle aussi tactile ? Ça ne lui ressemble pas. Et puis, il y a beaucoup de passage à cette heure-ci, ne veut-elle pas garder leur relation extra-scolaire plutôt confidentielle ? 
Gaspard ne comprend pas ce revirement de situation. Il ne comprend pas quel rôle joue sa tutrice, et ça le rebute un peu. Est-ce qu'elle croit qu'ils sont en couple ? Sont-ils en couple ?

Malgré lui, Gaspard place ses mains sur la taille de Vic et lui rend son sourire, comme il sait si bien faire. Il ne voudrait surtout pas que Vic se vexe parce qu'au-delà de cette histoire de faux couple, c'est son amie.

- T'es sortie vite, aujourd'hui, remarque Gaspard en baissant les yeux sur elle.

Leurs visages sont proches et habituellement, ça n'émeut pas Gaspard. Mais à cet instant, alors qu'il se demande si Vic ne se fait pas trop d'espoirs, il sent une boule de nerf se former dans le creux de son ventre. Il deteste être dans la posture du méchant garçon briseur de cœur. Non, il n'est pas dans cette posture et il espère ne jamais y être, du moins, pas avec Vic. Pas avec cette magnifique personne.

- J'avais trop hâte de te voir, lui dit-elle en frôlant le bout de son nez avec son doigt.

Oh non, elle ne dit jamais ce genre de choses, à moins qu'elle le fasse avec une tonne de sarcasme, comme lorsqu'ils se moquent des couples niais de la fac. Qu'est-ce qui est arrivé à Victoria ? 
Gaspard se recule un peu, laissant tomber ses bras le long de son corps. 

- On y va ? dit le garçon en coupant toute ambiguïté. 

Victoria fronce légèrement les sourcils, surprise de la distance instaurée par le brun, mais elle finit par acquiescer en s'avançant vers sa voiture.

Victoria se plaint de sa journée pendant les quinze minutes de trajet, entre Owen qui ne veut plus lâcher Alizé, sa professeure de français qui l'oblige à rendre des devoirs supplémentaires et sa mère qui la tanne à perdre deux tours de taille, sa vie ne pourrait être pire. 

C'est le pire trajet que Gaspard ait connu, et il en est désolé.




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