Chapitre 31

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C'était la veille du réveillon de Noël et une vague de nostalgie avait envahi Gaspard. 

Ce serait le premier Noël de sa vie qu'il passerait sans les siens. Alors il faut avouer que lorsque Victoria lui a envoyé un message pour lui rappeler qu'ils fêtaient le réveillon chez sa grand-mère, il a soufflé. Il a soufflé si fort que les feuilles de match posées sur sa table basse se sont envolées.

Il n'y avait que ça dans son appartement ; des analyses de tactiques, des maillots de hockey, des chaussettes propres en train de sécher dans un coin, des chaussettes sales dans un autre. 
Gaspard vivait dans un vrai appart' de sportif. 

"A quelle heure est-ce que je dois venir chez ta grand-mère ?" 

"20h. Sois à l'heure."

Et puis ce qu'elle pouvait être barbante Victoria à lui faire la gueule pour un rien. Certes, il avait agi en gros con, mais il s'était excusé. Que voulait-elle de plus ? Qu'il la supplie à genoux de bien vouloir le reprendre ? Sûrement pas. Gaspard ne voulait pas d'une relation avec elle, ni avec personne d'autre. 

Il s'était acclimaté au mode de vie des sportifs populaires ; le matin, il s'entraînait à la salle de sport pendant trois heures, puis il enchaînait avec trois heures de cours, pour finir la journée sur la glace. Tous les week-ends, Gaspard avait match.
Cet emploi du temps était intense et il lui avait valu des résultats remarquables d'un point de vue physique. L'attention qu'il recevait des filles était ridicule, il en était même un peu écœuré.
Mais la pression sociale était trop forte, il devait conserver cette attitude de Don Juan, car c'est ce que les gens venaient voir lorsqu'ils se présentaient aux matches. 


La dernière fois que Gaspard a eu vent de sa sœur, elle disait être "trop occupée pour parler à son bon-à-rien de frère", il s'était donc résigné à ne pas la déranger.
Néanmoins, ils ne s'étaient pas parlés depuis deux jours, et sa voix - trop aigüe pour une ado de seize ans, commençait à lui manquer. 

Il est quatorze heures et Gaspard décide donc d'appeler Adaline. Juste pour prendre de ses nouvelles.

La sonnerie retentit une fois, puis deux, avant que sa petite sœur ne réponde. 

"Oui, Adaline, c'est moi, commence Gaspard.

- Sans blague, j'ai encore ton numéro enregistré, bouffon, répond aimablement sa sœur.

Le son grésille un peu, comme si elle était dans un autre pays. Enfin, un pays autre que la France.
Il y a du bruit derrière elle, des tas de voix qui s'harmonisent entre elles.

- Dans ce cas, pourquoi est-ce que ça fait deux jours que je ne t'ai pas eue en ligne ?

- Peut-être parce que j'ai une vie, rétorque Adaline.

Un bruit de fracas hurle dans le tympan de Gaspard. Le bruit est si fort que le garçon décolle son oreille du téléphone.

- Putain, qu'est-ce que tu fabriques Ada ? s'énerve Gaspard.

- Rien, c'est Camille qui a cassé un verre, enchaîne Adaline. 

Gaspard sait qu'elle ment. Il la connait comme s'il l'avait faite. Il appuie sur l'icône caméra, afin de faire passer l'appel en visio. 

Adaline refuse.

- Accepte, ordonne le grand frère.

La jeune fille soupire bruyamment.

- Arrête de me fliquer, t'es pas mon père. 

- En parlant de père, comment va le nôtre ? 

- Je dois te laisser, on s'appelle demain. Bisous, n'oublie pas d'envoyer un message à maman, conclut Adaline sans laisser le temps à son frère de répondre."

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