dix-sept

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chapitre six-sept : Ana

 — Bon, j'ai eu un inspecteur de police, ils n'ont toujours pas pu identifier qui était ton agresseur.

On m'avait agressé pour me voler mon téléphone. C'était ce que j'avais dit à la police, à ma mère, à ma manageuse et à toutes les personnes qui me demandaient ce qu'il s'était passé. J'avais été voir ma tante, et sur le chemin, on m'avait agressée pour me voler mon téléphone.

Depuis une semaine, l'information était partout et j'avais même provoqué un plateau télé de débat sur la sécurité des rues colombiennes. Ma tante ou mon oncle n'avaient évidemment pas dit que j'étais une sale petite menteuse. Parce que si jamais ils le faisaient, ils allaient devoir expliquer ce qu'il s'était réellement passé.

J'avais tout fait pour que l'information soit relayée pour une seule raison : que Damon s'en débarrasse. Ce n'était pas lui que je voulais recherché, je n'en avais rien à faire, j'avais décrit un de mes cousins et attendais qu'ils fassent peut-être un lien.

Si jamais je les dénonçai frontalement, ma famille et les gens qui travaillent avec eux allaient me détruire. Mais je ne pouvais pas ne rien faire, ce n'était pas possible.

J'avais peur des représailles. Bien évidemment que je n'avais pas envie de mourir pour sauver une fille. Elle travaillait pour le type qui m'avait kidnappée, mais elle ne méritait pas ça.

Assise dans mon canapé à Bogotá, je sentis ma manageuse, Ana, s'asseoir à côté de moi. Elle posa affectueusement sa main sur mon avant-bras.

Je retins un sanglot. Elle mordilla sa lèvre avant de m'attirer contre elle. Je pleurai beaucoup depuis une semaine. J'avais seulement eu ma mère au téléphone. Elle était au chevet de ma grand-mère apparemment.

Je me sentais si seule. Ana avait eu peur en me voyant m'effondrer face à elle quand elle était arrivée chez moi. Elle m'avait dit d'aller me faire interner, que seul le repos pourrait m'aider. Mais j'avais surtout besoin de sortir enfin de ce cauchemar.

Je passai pour une fille matérialiste. Elle pensait que mes larmes étaient pour mon téléphone. Mais en réalité, je pleurai cette femme qui, si elle avait survécu, n'allait plus jamais être comme avant.

Je ne pouvais même pas imaginer la douleur qu'elle avait en elle. C'était inimaginable.

Mon nouveau téléphone s'éclaira et je vis une notification Instagram apparaître. C'était le compte d'Esperança. J'avais mémorisé le nom d'utilisateur pour un détail qui m'échappait et j'avais envoyé un message ce matin-là pour tenter de m'assurer que Damon n'avait réellement plus mon téléphone entre les mains.

Je pris le téléphone pour regarder le message que je venais de recevoir et mon coeur s'allégea :

« À Medellín »

Il avait eu l'intelligence de le laisser là-bas pendant son rendez-vous dont je ne connaissais pas le détail.

L'idée de faire plonger Damon était effectivement tentante. Mais il n'était pour l'instant pas le pire ou celui contre qui j'étais le plus remontée et je connaissais une de ses adresses.

Je n'avais pas besoin d'inventer une histoire de merde pour le faire plonger.

— Tu devrais aller te reposer, je reviendrai tôt demain, m'annonça ma manageuse en se levant du canapé.

Mon coeur accéléra à l'idée que j'allais être seule. Je n'avais pas envie de me retrouver face à moi-même. Mais je ne lui disais jamais. Ana quitta l'appartement et je m'empressai de tout fermer derrière elle.

ÁNGEL'S SHADOWSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant