chapitre 22- Malius

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Malius

Aujourd'hui, il n'y a pas grand monde au SHOP. Deux personnes sont prévues au planning. J'écoute attentivement Alycia, la petite blonde à la plasticine de rêve qui en ferait bander plus d'un, expliquer qu'elle souhaite un simple petit papillon à l'encre noire. En gros, rien d'original. Je lui montre un de mes flashs que j'ai illustrés il y a plusieurs semaines de cela. Elle s'approche de moi, croisant ses bras pour bien mettre en avant sa poitrine généreuse. Si elle croit que ça me fait quelque chose, pas de chance, poupée, aujourd'hui tu ne me fais plus d'effet. Et dire qu'avant, je l'aurais pris à même le comptoir, bon, peut-être pas, car je pense que j'aurais eu un petit problème avec mon patron. Même s'il sait très bien que bon nombre des clients qui sont venus se faire tatouer ont fini sous mon corps. Alycia accentue son regard sur moi, ce qui commence fortement à me déranger. Je sais très exactement qu'elle souhaite remettre le couvert et commencer ce que nous n'avons pas pu finir cet été. J'essaye de garder au mieux une distance entre elle et moi, afin de garder une posture professionnelle. Mais surtout par respect pour Elijah, je me suis promis de ne plus être le connard d'avant.

— Où veux-tu le papillon ?

— Ici ! S'exclame-t-elle en me montrant le dessus de son sein gauche. Bizarrement, je ne suis même pas étonné de l'emplacement qu'elle a choisi.

— Dis-moi après, ça te dit que l'on aille se boire un verre ?

— Hum, désolé, je ne suis pas intéressé, répondai-je sur un ton désintéressé.

Traduction, trace ta route.

Clairement, la seule chose que j'attends est de rentrer retrouver les lèvres de mon amant. Oh mon Dieu, je deviens comme tous les types mielleux complètement camés par l'amour. L'annonce du mariage a été un véritable choc pour nous et personnellement, le chemin que nous avons décidé de prendre risque d'être semé d'embûches, mais une chose est sûre : je ne veux pas le perdre. Si j'avais des doutes, dimanche soir tout s'est envolé. Sous des baisers torrides, des promesses se sont scellées et je vais essayer du mieux que je peux pour les tenir, pour lui.

— Dommage, en tout cas, je serais au « IDLE » ce soir, si jamais ça te dit de passer.

— Ne compte pas trop là-dessus, ma belle.

— Depuis quand le fameux Malius est-il si sage ? M'interroge-t-elle d'un air curieux.

Bien sûr qu'elle veut absolument savoir la raison, mais cette vérité, je la garde pour moi, pour me protéger, pour nous préserver. C'est une petite ville où les ragots prolifèrent aussi vite que les souris. Malgré tout, nous convenons d'un rendez-vous pour la semaine prochaine et puis elle s'en va un peu déçue que son petit manège n'ait pas marché.

— Elle aurait voulu remettre le couvert celle-là. La raison de ton refus ne serait pas à cause de cette petite tête blonde. En fait, ça en est où vous deux ? me demande Parker qui regarde la scène dans un coin de la pièce depuis le début.

— Disons que ça a bien avancé, même très bien.

Il me signifie d'un grand sourire et me donne une petite tape sur l'épaule tout en me déclarant qu'il est content pour moi. Mais il ne me pose pas plus de questions, me laissant le choix de dévoiler notre histoire quand je serais prêt.

Une heure plus tard, mon patron m'informe que je peux partir, car il n'y a plus rien à faire.

En quittant la boutique, je décide de prévenir mon copain que je rentre à la maison, mais je constate qu'il m'a déjà envoyé un message il y a déjà une bonne trentaine de minutes me demandant de venir le chercher, car sa mère a eu un empêchement.

Je me presse donc de le rappeler sur le champ, mais je tombe directement sur sa messagerie. J'essaye de nouveau tout en m'installant sur ma bécane, mais en vain. J'espère qu'il ne lui est rien arrivé. Je démarre et part en trombe pour me rendre au plus vite au lycée, mais arrivée sur place, la déception m'envahit, car je ne l'aperçois pas et je ne sais pas pourquoi, mais une boule commence à naître au fond de ma gorge. Devant moi, je crois un groupe de jeunes aux allures atypiques.

— Excusez-moi, vous avez vu Elijah West ?

— Désolé, mec, on ne le connaît pas, ton Elijah, me sort un gars avec une queue de rat derrière la tête, il me fait penser à The Weekend dans la série "The Idol", c'est vraiment d'un moche. Après tout, il en faut pour tous les goûts.

— Ah si, c'est le grand blond, le petit nouveau qui est arrivé il y a peu, réfute une fille que je soupçonne d'être la copine du gars.

Il est parti avec Selena et un autre mec que je présume être son frère.

— Son frère, répétai-je abasourdi par ce que j'apprends.

- Oui, car elle lui a sauté au cou en l'appelant frangin. Je ne savais même pas qu'elle avait un frère.

Il me faut un petit moment pour assimiler l'information, car j'ai l'impression que c'est une putain de blague, je ne savais pas qu'il était de retour en ville. D'un coup, mon cœur se serre. Caleb, ça fait bien deux ans et demi que l'on ne sait pas parler, même plus. Après lui avoir balancé à l'époque toutes ses atrocités, je ne l'ai jamais revu. Et bien sûr, il fallait qu'Elijah soit ami avec sa petite sœur, mais quelle poisse. Je la remercie et redémarre pour me diriger vers la baraque de mon ancien meilleur ami.

En s'arrêtant au feu rouge, je profite de la pause pour me demander si j'opère un demi-tour ou continue mon chemin. Est-ce que je suis prêt à le revoir ? Que pourrais-je bien lui dire après tout ce temps ? Pardon de t'avoir insulté de tous les noms, d'avoir dit que c'était dégoûtant que tu puisses m'aimer alors que quelques semaines après, je trempé ma queue dans le cul d'un type complètement beurré. Bien sûr que j'ai honte de ce que j'ai pu lui cracher à la figure, il ne méritait en aucun cas de recevoir ses mauvaises paroles de ma part, il a toujours été bon avec moi. Finalement, j'agrippe les poignets de ma cylindrée, et quand le feu passe au vert, je décide finalement qu'il est temps de me confronter à lui.

Lui et sa sœur habitent à la sortie de Roseburg. Une fois passé l'embranchement, je bifurque sur un petit chemin et je me gare sur le sol terreux qui ressemble plus à de la gadoue à  cause des derniers jours de pluie.  D'extérieur, la maison ne paye pas de mine, mais j'adorais passer des moments ici. Rien n'a changé en presque trois ans, bizarrement, un sourire en coin naît sur mon visage, me remémorant tous les moments passés, les parties de jeux vidéo qui finissaient tardivement la nuit. Des heures et des heures de discussions au bord de la rivière, des fous rires à m'en décoller la mâchoire. À l'époque, nos mères étaient de très bonnes amies. Je pense que si maman était encore de ce monde, Caleb et moi, on serait toujours potes, ou pas. Ce n'est pas le moment d'être nostalgique, le passé est le passé, il doit rester où il est.

D'un pas nonchalant, je me dirige vers la porte en bois vernis, je prends une grande inspiration et appuie de mes mains moites sur la sonnette. Les secondes me paraissent interminables et je suis à deux doigts de prendre mes jambes à mon cou.

— Allez, tout va bien se passer, et puis peut-être qu'il est sorti après les avoir déposés, après tout ! Me rassurai-je comme je peux.

La porte s'ouvre.

— Salut Malius, ça faisait longtemps !

Et moi, je reste droit comme un piquet ne sachant que faire.

Just Us (MxM)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant