Chapitre 9

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La sonnerie de mon réveil me martelant la tête et je tente tant bien que mal de l'arrêter. J'entends Antoine râler à côté de moi, et une fois le réveil éteint, nous soupirons tous les deux.

Je n'ai qu'une envie : me rendormir et passer le reste de ma vie cachée sous ma couette. Mais je dois me lever, aller rendre hommage à Andrew. Je dois le faire pour lui. Antoine se lève et s'apprête à partir, mais s'arrête pour s'assurer :

— Ça va aller ?

— Oui. Enfin, autant que ça peut aller un jour d'enterrement,. Surtout dans ses conditions.

Je sors difficilement du lit et part à la douche. Je commence ensuite à m'habiller , récupérant les vêtements laissés par mon habilleuse: une simple robe noire accompagnée de petits talons de la même couleur. Ma mère souhaitait que je me fasse coiffer et maquiller par une professionnelle, après tout, il y aura beaucoup de journalistes et de caméras autour du cimetière. Même dans une période si difficile, ils ne me laissent pas un brin de tranquillité.

La cérémonie commence à 14h30, alors je prends mon temps. Après avoir pris un petit déjeuner, j'essaye de continuer le discours que je devrai prononcer. Je désespère de ne pas trouver les mots. J'ai l'habitude d'écrire des discours pourtant, celui-ci est spécial et je veux qu'il soit parfait. Je ne sais comment trouver les mots justes pour décrire la merveilleuse personne qu'était Andrew. Je gribouille encore quelques phrases que j'efface rapidement.

J'abandonne au bout de plusieurs heures. Le ventre serré, je n'avale pratiquement rien au déjeuner.

A 14 heures, je finis de me préparer et replace ma bague de fiançailles sur mon doigt. Je souffle un bon coup et rejoins mon frère qui m'attend près des escaliers. Il me lance un léger sourire compatissant et me serre la main. Je retiens des larmes qui tentent de s'échapper et fais tout mon possible pour penser à autre chose.

On monte dans une voiture aux vitres teintées. Lia nous rejoint quelques minutes après. Mes parents et les jumeaux sont montés dans d'autres voitures. Durant le trajet, je fixe le paysage défilant, tandis que Lia et Antoine tentent de me rassurer et de me consoler. La seule chose à laquelle je pense est Andrew, et ne pas avoir réussi à écrire le parfait discours me rajoute un poids. Comme si je n'étais pas à la hauteur. Et cette impression ne me quittant pas, je réalise qu'elle est vraie.

On arrive un peu en avance. Dès que j'aperçois Marie, je vais la voir. Je ne veux pas qu'elle reste seule et je pense qu'elle est la personne qui comprend le mieux la peine qui me consume.

On s'installe au premier rang, et les jumeaux s'assoient à côté de nous. Andrew était comme leur grand frère et ils l'ont eux aussi perdu. L'enterrement commence et je perds rapidement le fil. Je ne me sens plus moi, je vois les évènements se dérouler mais c'est comme si je n'y étais pas.

Un simple mirage.

Je tourne ma bague autour de mon doigt, inlassablement.J'imagine la vie que nous aurions pu avoir : les bals auxquels nous aurions assisté, le mariage que nous aurions célébré, les discours que nous aurions déclaré, les enfants que nous aurions eu... Je ne m'étais jamais vu avoir une vie normale, pourtant avec lui, je m'imaginais un avenir des plus classiques. Celui des contes des fées avec le fameux « Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants ». Mais les contes de fées ne prennent pas en compte la réalité. Les tireurs sont arrêtés et les morts ressuscités. Si la princesse est en danger, elle sera valeureusement sauvée par le beau -évidemment- prince charmant, vivant ensuite la vie parfaite qui l'attend. Ô, qu'elles seraient déçues de savoir qu'être reine ce n'est pas juste de se prélasser et de vivre tranquillement. Si les jeunes filles rêvent d'être des princesses et non des reines, c'est bien pour une raison.

Monarchie & AnarchieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant