Je traverse la grande allée de la roseraie. Soudain, je sursaute en apercevant une jeune fille à genoux près des roses rouges. Sa salopette est pleine de terre et elle se bat contre une rose qui n'a pas l'air de vouloir se laisser tailler.
— Ça va ?
Elle se retourne en sursautant. Gênée, elle s'excuse :
— Oh désolé. Je ne pensais pas vous déranger, on m'avait dit qu'il y aurait un repas.
— Aucun souci, continuez. Je vais juste m'asseoir.
— D'accord. Au fait, je ne me suis pas présentée. Sophia, c'est moi qui suis chargée de la roseraie.
— Eléanore, ravie de vous rencontrer.
Je me pose sur la balancelle puis je réalise :
— Vous êtes la copine d'Olivier ?
Le rouge lui monte aux joues et elle acquiesce.
— Je ne pensais que vous sauriez qui je suis...
— Olivier m'a parlez de vous.
Nous parlons quelques minutes. Elle se remet ensuite à travailler et je lis un peu, profitant du calme avant le bal de ce soir.
***
Deux heures que le bal à commencé et je n'en peux déjà plus. J'ai passé une heure à accueillir les invités puis une autre heure à parler avec mes amis.
J'arrive à esquiver Jason, malgré les réprimandes d'Antoine qui me rappelle que j'ai accepté de l'écouter.
Malheureusement, le groupe se sépare rapidement quand Elise va danser avec quelqu'un à l'autre bout de la pièce. Lia déclare à son tour vouloir danser et se tourne vers mon frère :
— Antoine ? Tu viens avec moi ?
— Avec plaisir ! Eléa ? Tu vas danser ?
Avec qui ? Je me retiens de poser cette question, souriant poliment.
— Non, c'est bon.
Je les regarde s'éloigner et Antoine continue de me fixer étrangement. Par chance, il reporte très vite son attention sur Lia et rigole. Ça m'étonne qu'ils dansent ensemble, pourtant, quand j'y réfléchis, ils sont de plus en plus proches.
Je me dirige vers le buffet et grignote quelques hors-d'œuvre. J'y reste pendant toute l'heure qui suit, me sentant plus que jamais seule. Jeanne reste quelque temps avec moi, même si elle repart rapidement avec nos autres cousins.
Au bout de la quatrième heure, je n'en peux vraiment plus et je n'ai qu'une hâte, que la soirée se termine enfin. Je m'apprête à aller prendre l'air quand Antoine m'interrompt :
— Tu veux aller danser ?
— Non merci, j'allais dehors.
Il me rattrape par le bras alors que je tente de me défaire de sa prise.
— Juste une petite danse. S'il te plait. Tu n'as pas dansé de la soirée.
Parce que le souvenir de ma dernière danse continue de me hanter.
Il semble lire dans mes pensées car il ajoute :
— Je sais que ta dernière danse te laisse un goût amer dans la bouche, mais il faut que tu re danses. Plus tu attends, plus ce sera compliqué.
— Un goût amer ?
Je dirai plutôt un goût de fer. Comme le sang. Il ne prend pas compte de mon interrogation et continue :
— Plus tu attendras, plus ce sera difficile. Et des bals tu vas en avoir toute ta vie. Alors danse. Remplace tes mauvais souvenirs par de nouveaux, meilleurs. Crée-toi des souvenirs joyeux avec d'autres personnes qu'Andrew, car avant que tu sois heureuse en repensant à Andrew, il va falloir du temps. Tu seras particulièrement triste, puis nostalgique, mais rarement heureuse. En pensant à Andrew, tu penseras sans cesse penser à cet instant, cette minute, ce moment décisif. Alors tente de trouver d'autres manières d'apporter de la joie.
Merci, comme si je n'étais pas au courant !
Il me fixe quelques instants puis me supplie :
— Une danse. S'il te plait ! Une danse et je te laisse tranquille.
— Jusqu'à la prochaine fois où tu décideras qu'il faut que je danse.
Il prend un air innocent quand il répond :
— Tu as raison. Mais je te promets de te laisser tranquille jusqu'à la fin de cette soirée. Pour les prochains bals, tout dépendra de toi. Il suffira que tu ailles danser de ton plein gré, parce que ça te fait plaisir. Et à chaque danse, je te tiendrais la main.
Je reste muette. Il insiste :
— Tu me promets d'essayer ?
— Ok.
— Promis ?
Il me tend son petit doigt. J'hésite quelques instants, puis consciente qu'il faut que j'avance, serre mon petit doigt au sien.
Pour une fois, dans le bal, il n'y a pas que des musiques orchestrales mais aussi des musiques plus rythmées, datant des années 1980 à 2010. Je ne comprends même pas comment ces musiques peuvent encore être à la mode. Certaines choses sont immortelles, la musique en fait partie.
On se met à danser doucement, et pendant la première minute, je suis tendue comme jamais. Au fil des pas, je commence à me détendre. Nous finissons tranquillement la musique. Il avait raison, je me sens déjà un peu plus à l'aise à l'idée de redanser. Enfin, tant que c'est avec Antoine.
— Tu veux encore aller dehors maintenant ?
— Oui, tu m'accompagnes ?
— Avec plaisir !
Nous sortons sans un mot. La brise d'été frappe délicatement ma peau. Un petit rictus apparaît sur mon visage. Je me tourne alors vers Antoine et lui souffle :
— Merci.
Mes mots s'envolent dans le vent et nous profitons un moment du paisible calme de la nuit.

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Monarchie & Anarchie
ParanormalFrance, 2147 Plusieurs années ont passé depuis la troisième guerre mondiale qui a chamboulé le pays. Durant ces temps difficiles, la monarchie absolue a été remise en place. Eléanore a tout pour elle : elle est la future reine et a trouvé son pri...