Chapitre 14

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Je sens leur regard sur moi.

Leurs murmures résonnent dans mon crâne. Je me demande parfois s'ils pensent vraiment que je ne les entends pas quand ils parlent de moi.

Je me tiens droite, comme on m'a toujours appris à le faire. Et j'avance.

Depuis ce matin, quand j'ai enfilé mon uniforme, que je me suis coiffée et que je suis montée dans la voiture, je ne suis qu'un fantôme. Revenir dans ce lieu d'horreur m'étouffe. L'air me manque, les bouffées de chaleur m'assaillent. La crise d'angoisse commence à m'emporter quand je sens un contact chaud sur ma main.

Je baisse rapidement la tête, surprise, et observe ma main droite. La petite main de Lia serre la mienne en signe de soutien. Je remonte mon visage pour la voire me sourire. Je lui lance un léger sourire en retour quand je sens mon autre main être pressée. Je tourne les yeux et aperçois mon frère. D'un regard, il me demande si ça va aller et j'opine rapidement. Derrière lui, j'aperçois Jason, impassible, qui me fait signe d'avancer.

Je reporte mon attention devant moi et me dirige vers mon premier cours. Une fois devant la porte, Lia me lâche la main. Antoine me prend dans ses bras, chose qu'il n'a pas faite depuis des années. Près de mon oreille, il me chuchote :

— Je sais que cette journée ne sera pas facile. Mais tu vas la surmonter. Tu es la personne la plus forte que je connaisse et tu peux surmonter toutes les épreuves qui se dresseront sur ton chemin. Celle-là est juste un petit obstacle, alors ça ira. Tout ira bien et tu réussiras. Alors garde la tête haute. Ok ?

— Ok.

Sur ma joue, il essuie une larme solitaire qui s'est échappée.

— On se rejoint au déjeuner ?

— D'accord.

— Alors parfait. Et rappelle-toi : Garde la tête haute !

J'entre dans la salle d'histoire la boule au ventre. Evidemment, le premier cours est l'un des seuls où je ne suis ni avec Lia, ni avec Antoine. J'analyse les tables déjà prises en sentant quelques regards intrigués sur moi. J'aperçois Elise vers la fenêtre qui me fait un signe de la main. Elle est déjà assise avec quelqu'un mais elle me propose :

— Désolé, je ne savais pas que tu revenais aujourd'hui. Si tu veux, je peux changer de place, ça ne me dérange pas de m'assoir à côté de toi.

Gênée, je lui souffle, peu convaincue :

— Ne t'inquiète pas, je vais m'assoir ailleurs. Ça ira.

— D'accord.

Elle me sourit gentiment tandis que je cherche une place. Durant le peu de temps que j'ai passé à parler, le reste de la classe s'est déjà installé et les seules places qui restent sont une au premier rang, une près d'un garçon qui me regarde très bizarrement et la dernière se trouve à côté de Jason. Il tire alors la chaise en me disant qu'il ne mord pas. J'hésite puis je décide de me mettre à ses côtés. Je garde tout de même mes distances, attendant le moment où il me sortira une pique. Pourtant, le cours commence et il n'a toujours pas prononcé un mot.

En temps normal, ce silence serait une aubaine, mais là, il me laisse seulement le temps de repenser à certaines choses pour lesquelles je préfèrerais mettre mon cerveau en pause.

— Tu n'as rien à dire ? Même pas une petite réflexion sur le fait que la monarchie vous empêche de vivre et vous opprime ? Tu t'es ramolli cette semaine.

Jason me fixe curieusement. Je crains soudain qu'il comprenne mon manège et s'en serve contre moi. Pourtant, même s'il comprend vite pourquoi j'ai dit ça, il en profite seulement pour me lancer l'une de ces éternelles piques :

Monarchie & AnarchieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant