Jeudi 9 juillet 1964

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Mon cher Mathieu,

Ta visite médicale m'a bien fait rire, et même une fille y assistait ! Et ton compagnon de chambre qui en a profité pour te mettre un doigt dans le derrière ! Il est culotté, si tu me permets ce jeu de mots. Tu penses que c'est un bizutage ? Je n'ai pas l'impression, c'est plutôt le reflet de la vie des gens du coin, où la pudeur des adolescents n'est pas respectée, on les prend pour des gamins jusqu'à leur majorité. À mon camp, la pudeur n'était pas respectée non plus, avec cette obligation de se baigner nu, et pire, ce que je vais te raconter dans cette lettre. Nous avons aussi eu une visite médicale, elle n'était pas très différente de la tienne, en groupe, et baisser le slip plusieurs fois.

Ici, à la clinique, j'ai pris mes habitudes. Dominique est passée tous les matins pour faire les étirements du prépuce, au moins nous sommes seuls. J'ai l'habitude maintenant et je suis moins excité. Elle m'a parlé d'une excursion ce week-end. Comme beaucoup de patients ont des problèmes psychiques et pas physiques, des randonnées sont organisées toutes les deux semaines et on peut passer une nuit à l'extérieur de la clinique, c'est aussi une thérapie pour se changer les idées. Je me suis inscrit, Dominique viendra pour nous accompagner et donner les remèdes à ceux qui en prennent. J'espère que je pourrais la côtoyer ainsi dans un autre cadre et qu'elle me fera quelques confidences sur sa vie privée. Nous passerons la nuit dans une auberge d'alpage. J'ai des rendez-vous avec le psy ; pour le moment nous parlons de mon stade anal, il n'a pas l'air pressé de progresser, il faut bien justifier mon séjour.

Je reprends mon récit du séjour au camp. Après mon aventure dans l'usine électrique, les soirées étaient plus animées dans le dortoir. Les gars se branlaient moins discrètement, il y en avait qui s'exhibaient, fiers de nous montrer leurs queues en nous disant comme elles étaient belles (même si je les trouvais quelconques). Il y en avait aussi qui râlaient, nous traitant de pédales et menaçant d'appeler un surveillant. Ceux-ci ne s'intéressaient pas à ce que les mecs faisaient entre eux, ils montaient la garde devant le dortoir des filles. Ils ne devaient pas apprécier les grossesses non-désirées dans le camp, cela faisait une mauvaise publicité.

Ça a énervé Logan de se faire traiter de pédale et, avec l'aide de trois autres gars, il a passé les couilles d'un râleur au cirage. Nous avons été tranquilles pour le reste du camp. Je suis retourné plusieurs fois à la piscine avec Jo et j'ai appris à le sucer. Le type qui surveillait l'entrée de la piscine nous faisait des remarques salaces chaque fois, nous ne l'écoutions plus.

Pendant le camp, ces expériences homosexuelles ne me dérangeaient pas, je les appréciais. C'est une fois rentré à la maison après les vacances que ça m'a perturbé, quand j'ai revu les familles des ambassadeurs aux garden-parties : papa, maman, leurs enfants endimanchés. C'était la vie dont j'avais toujours rêvé : me marier, avoir une belle femme, de beaux enfants, une vie sociale, aller aux soirées mondaines, danser. Les relations entre hommes au camp, c'était à la sauvette, dans des lieux sordides. Et je ne pensais pas que ce serait mieux en ville : draguer et baiser dans des pissotières.

Je me rendais cependant compte que les hommes m'attiraient beaucoup plus que les femmes, même si je n'éprouvais pas de sentiments particuliers pour Jo, je n'étais pas amoureux, c'était son corps qui me faisait bander. Je me suis donc mis en tête que je ne devais plus penser aux hommes, me chercher une petite amie. Ça n'a pas marché et j'ai fini par tomber malade.

Excuse-moi pour cette digression. Il y avait des activités facultatives dans le camp, que nous pouvions choisir en fonction de nos préférences. L'une d'elles s'appelait « Initiation à la vie militaire ». Elle se déroulait pendant quelques jours à l'extérieur, dans une ancienne base de l'armée. J'en ai parlé à Jo, je lui ai demandé s'il l'avait choisie l'année précédente. Il m'a répondu :

Deux cousins (Journal intime)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant