Dimanche 7 Août 1964 - Part 3

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 — Je ne comprends pas, dit Chloé à Dominique, mais ce n'est pas nécessaire de nous expliquer maintenant, on va cogiter.

— Et c'est votre intimité, ajouta Yvette, l'essentiel est que vous soyez heureux.

Dom préféra ne rien dire à ce moment-là, elle voulait faire plus ample connaissance avec les deux femmes avant de dévoiler qu'elle était transgenre. Ils dégustèrent la suite du repas : du risotto à la saucisse ou aux légumes, avec du Merlot rouge, des fruits pour le dessert.

Après le repas, beaucoup se portèrent volontaires pour laver la vaisselle, Léo et Dom purent finir tranquillement leur café accompagné de grappa. Giorgio alluma les ampoules multicolores, prit la parole en anglais, un micro à la main pour la sonorisation :

— Après ce délicieux repas (applaudissements spontanés), j'ai le plaisir de vous présenter Allen qui va nous lire l'un de ses poèmes. Celui-ci a été censuré avant d'être autorisé par un juge. Nous tenons particulièrement à la liberté d'expression, c'est pour cela que je l'ai invité (applaudissements). Nous tenons également à la liberté sexuelle, personne ne doit être stigmatisé à cause de son orientation (applaudissements nourris). Si vous le désirez, mon fils vous vendra un exemplaire dédicacé du poème avant la lecture, cela vous aidera à le comprendre. Ensuite, je vous demanderais de prendre des couvertures et de vous répartir dans le parc.

Léo et Chloé achetèrent un exemplaire du livre. Comme ils séjournaient à l'hôtel, ils ne durent pas le payer tout de suite, Flavio nota leur nom sur une liste.

— On voit que c'est un Américain, dit Léo, il profite de faire des affaires.

— Oui, fit-elle, comme l'hôtel où nous séjournons, déjà la récupération du mouvement hippie.

— Je ne suis pas d'accord avec toi, ce lieu a une tradition de communautés utopiques bien plus ancienne, c'est plutôt une actualisation.

Les deux couples posèrent leurs couvertures sur l'herbe. Les filles s'assirent en lotus alors que Léo et Dom de couchèrent à plat ventre. Flavio les rejoignit en disant :

— Vous permettez ? Vous m'avez promis une branlette.

— Nous ? s'étonna Chloé. Nous ne savons pas branler les hommes.

— C'est facile pourtant, je vous expliquerai comment faire. Vous ne voulez pas d'enfants ? Il vous faudra un homme pour les petites graines.

— Nous n'avons pas encore réfléchi à cette question, dit Yvette, mais tu as raison, il nous faudra un homme. Ce n'est pas quelque chose qu'on décide et qu'on conçoit après un repas bien arrosé.

— Ne t'inquiète pas, fit Flavio, je pécherai comme Onan ce soir car je ne désire pas devenir père.

— Pas de soucis avec ton confesseur ? demanda Dom, tu dois avoir une longue liste de péchés à lui raconter.

— Non, pas de soucis, il aime bien que je lui raconte tout en détail.

Allen prit le micro, Flavio se tut et s'assit entre les deux couples. L'Américain expliqua dans quel contexte il avait écrit le poème puis parla de ses démêlés avec la censure. Il dit encore qu'il était homosexuel, s'excusant auprès des femmes de ne pas pouvoir coucher avec elles. Il débuta la lecture qu'il entrecoupa de mantras et de chants indiens.

C'était assez difficile à suivre pour les auditeurs non-anglophones, Léo et Dom lurent le texte en même temps, cela n'empêcha pas le public d'applaudir chaleureusement à la fin. Giorgio remercia le poète puis lui redonna la parole :

— Lorsque je fais mes lectures, dit-il, je propose toujours à mes auditeurs de mettre en pratique la liberté sexuelle, je vous propose donc de vous dénuder et de faire des échanges entre les couples, mais qui dit liberté dit aussi celle de ne pas le faire. Giorgio, que je remercie pour son invitation, va mettre un disque avec de la musique sensuelle tantrique pour vous accompagner. Ce disque sera aussi en vente à la fin de la soirée.

Deux cousins (Journal intime)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant