Chapitre 22 : Attention

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SHANA :

Le silence règne, bien trop pesant dans l'habitacle de la voiture d'Alex. Je n'ai pas arrêté de l'ignorer cette semaine - après ce qu'on a partagé - et je lui ai seulement demandé de m'amener à l'aéroport hier. Même si ça impliquait de mettre ma fierté de côté, je préfère ça à me taper des heures et des heures de transports en communs où la plupart des gens ne semblent pas avoir conscience d'à quel point une bonne hygiène est importante.

Le froid qui s'est installé entre nous est plus glacial que la banquise du pôle nord. Et pour cause, ces derniers jours, lorsqu'Alex était dans l'appartement, je partais me réfugier chez Eli, et lorsque c'était à mon tour d'être chez nous, il fuyait chez le nouveau studio de son meilleur amie dénommé Noah ou face de dindon pour les intimes.

Enfin... C'est de ma faute si le climat est comme ça, je n'aurai pas dû commencer à me confier. C'est une grave erreur et j'aurai dû savoir m'abstenir. Après tout, cela fait plus d'un an que je me suis fermée aux yeux de tout le monde, les laissant fabuler sur mes cicatrices, physiques et mentales. Alors je ne comprends pas pourquoi je n'arrive pas à rester secrète à ses yeux.

Je souffle et passe une main dans mes cheveux ondulés. Je ne suis plus sûre de ce qu'il se passe et de ce qui m'entoure. M'éloigner me fera le plus grand bien et me permettra de faire le tri dans ma tête pleine de pensées emmêlées.

En tout cas je l'espère.

Pour me changer les idées, j'observe la route et pense à l'endroit dans lequel je me trouverais bientôt. Je n'ai jamais mis les pieds dans un aéroport. Alors un avion... Je me surprends à vouloir demander à Alex s'il peut m'aider mais je me reprends. Je suis censée l'éviter.

- Tu n'as pas le permis de conduire ? Demande curieusement Alex de sa voix chaude et grave.

Le feu me monte aux joues. Bien sûr que non je ne l'ai pas. Je sais à peine conduire grâce à Eli qui m'a gentiment montré les mouvements de base. Quant aux motos, je sais parfaitement les manier et je peux remercier Matt, qui a exigé que j'apprenne si jamais je devais prendre la fuite un jour. J'obtiens des faux permis seulement grâce à ma meilleure amie.

Mes songes se mettent à crier et hurler dans ma tête. Que suis-je censée répondre ? Je me mords la lèvre inférieure sous le coup de cette réflexion et Alex me jette un regard inquisiteur à cause du silence que j'ai laissé trop longtemps. J'avale difficilement ma salive qui a pris le goût rouillé de mon sang tellement je me suis mordue fort.

- Je... Non je n'ai pas de permis, on est à Paris, c'est mieux de se déplacer à pieds, bégayai-je en essayant de toutes mes forces d'emprunter une voix calme et posée.

Mon colocataire a un léger rire, ce qui me confirme qu'il a gobé mon mensonge. Alors la pression qui nouait mon ventre me quitte et laisse place à un sentiment de soulagement que je prends le temps d'apprécier.

- Sauf quand tu vas à l'aéroport, ajoute-t-il un sourire aux lèvres.

J'ai la vague impression qu'il essaye de renouer des semblants de liens. Malheureusement, je ne suis pas d'humeur. La seule chose que j'ai envie de faire c'est de fuir, comme l'a si bien dit Eli la dernière fois.

- Sauf quand je vais à laéroport, répétai-je, distante.

Je dois l'éviter...

Mes yeux s'autorisent à parcourir un instant le visage de mon conducteur. Toujours ces mêmes mèches brunes qui retombent presque sauvagement sur ses yeux verts émeraudes. Toujours ces mêmes lèvres charnues et ces adorables fossettes dans ses joues qui se creusent lorsqu'il se met à sourire ou a rigoler.

The Gazelle's HuntOù les histoires vivent. Découvrez maintenant