SHANA :
Une fois qu'Alex est parti, je me douche et enfile des habits propres. Mon cauchemar est encore frais dans mon esprit et je n'ai pas tant envie de dormir seule. Alors je revêt mon trench coat et mes baskets et je sors en direction de la maison de ma meilleure amie.
En arrivant chez elle, c'est Fred qui m'ouvre. Je pince les lèvres. Je n'ai pas aimé la manière de laquelle il s'est comporté à la fête foraine. Il a failli tout faire foiré et il m'a très mal parlé.
Eli arrive derrière lui.
- Qu'est-ce que tu fais ici à une heure pareille, chou daddy ?
Je lui souris tout en prenant bien soin d'éviter Fred du regard.
- Je voulais savoir si je pouvais dormir ici cette nuit ?
En face de moi Fred se renfrogne. L'ambiance est lourde et pleine de non-dits mais Eli acquiesce quand même. Alors je rentre et me débarrasse de mes affaires.
Pendant que je retire mes chaussures, j'entends les deux amoureux se chuchoter quelque chose derrière mon dos. En me retournant enfin, Fred semble plus mécontent que jamais.
- Je suis désolé Shana, il lâche.
J'avoue que je suis soulagée mais surtout étonnée. Depuis que je le connais je n'ai vu Fred s'excuser que deux fois.
Une fois où il avait du fausser compagnie à Eli le jour de son anniversaire et l'autre parce qu'il avait accidentellement fait tomber mon téléphone. Mais gentil comme il est, il m'avait, de son plein gré, racheté un nouveau cellulaire portatif.
- Je n'aurai pas du te crier dessus à la fête foraine, ni te dicter ce que tu devais faire. C'était déplacé.
Je secoue la tête.
- Je... Je sais que ça paraît un peu démesuré... Mais je pense qu'Alex pourrait accepter, je dis doucement.
C'est un doux mensonge. Qui coule comme du miel le long de ma gorge jusqu'à m'en écœurer. Je m'en convainc moi-même.
- Toi tu as bien accepté pour Eli, je rajoute en renforçant cette idée dans ma tête.
Un éclair de pitié brille fugacement dans ses yeux mais il hoche quand même la tête.
- Je suis cuisinier. Il est policier. Je ne te dirai plus rien sur ça car ça ne me regarde pas, finalement. Mais n'oublie pas ça : il est des forces de l'ordre. Et toi... tu es sa proie.
Eli se racle la gorge et pose une main rassurante sur mon épaule. J'ai l'impression que, depuis que j'aime Alex, je vis constamment angoissée. C'était déjà le cas avant. Mais avant j'avais rien à perdre. Maintenant j'ai quelque chose. Et c'est bien trop précieux pour que je puisse me résoudre à le perdre.
*
J'engloutis mon bacon en quelques secondes à peine et vide mon jus d'orange d'une traite. Il est déjà huit heures et je veux être rentrée avant Alex.
J'attrape mon blouson et l'enfile à la va vite en même temps que mes chaussures. Eli se précipite à mes côtés en enfilant sa veste aussi.
- Attends, je t'accompagne, je dois aller faire du repérage dans les galleries du coin. Comme ça on se prendra un petit Starbucks, elle ajoute. Ça fait trop longtemps que j'ai pas bu un caramel macchiato, purée de pois qui pètent !
J'ouvre la porte en attrapant mon sac et tourne la tête vers elle.
- Pitié ne t'y mets pas toi aussi, je me plains en commençant déjà à marcher.
Elle me suit et on continue à parler jusqu'à atteindre le Starbucks. Paris est déjà réveillé malgré l'heure matinale. On est un samedi matin alors forcément tout le monde se précipite dehors pour faire du shopping ou aller à la gare. Alors la queue jusqu'à nôtre boisson est plutôt longue.
Quand Eli récupère son caramel macchiato et moi mon mocha blanc, on fait sens inverse pour revenir au milieu de la rue piétonnière. La boisson fume et ma respiration aussi dans ce climat presque glacial. Je prends une longue gorgée qui me brûle l'œsophage mais qui, en contrepartie, me fait un bien fou.
Il y a une foule vraiment conséquente ce qui réchauffe un peu l'atmosphère. Un passant lambda crie derrière nous et ça attire notre attention. Alors je me retourne et je croise le regard de quelqu'un. Ou plutôt de deux personnes. Ça dure qu'une seule seconde avant qu'ils soient ravalés par la foule mais c'est déjà bien assez.
Je sais qu'ils m'ont vu aussi.
Je sais qu'ils sont là pour moi.
Je sais...
Eli m'agrippe le bras comme une forcenée.
- Tu les as vu toi aussi, je lui lance d'une voix blanche et lointaine.
Elle me force à continuer de marcher.
- C'était pas eux, elle me contredit en accélérant quand même suspicieusement le pas.
Je la suis. Mais j'ai l'impression de ne plus être à l'intérieur de moi même. Comme si je voyais la scène se dérouler d'un point de vue extérieur.
- Eli... On le sait toutes les deux.
On marche si vite qu'on est déjà devant mon immeuble. Elle secoue la tête frénétiquement, sans jamais s'arrêter.
- On les a vu qu'une seule seconde Shana, c'était pas eux. C'était pas eux, elle répète en serrant ma main très fort.
Contre toute attente, c'est moi qui suis calme et elle qui est totalement paniquée.
- Très bien. Alors retourne à tes galleries. Je rentre chez moi.
Elle me retient alors que j'allai m'en aller.
- Shana... Shana, ne sors plus de chez toi. Ne sors pas. Je suis sûre que ce n'est pas eux. Mais ne sors pas. Sous aucun prétexte. Juste par pure précaution. Je vais faire en sorte de vérifier s'ils sont vraiment ici.
Je reste silencieuse. Mon esprit s'est transformé en une grosse boule de coton. Coincée dans un espèce d'épais brouillard. Je ne réfléchis plus.
Je sais juste que je ferme à double tours et que je m'effondre sur le canapé en fixant bêtement le plafond.
Je sais juste qu'à partir de ce moment précisément je ne suis plus moi-même.
Je sais juste que j'ai vu quelque chose qu'Eli n'a pas vu.
Je ferme les yeux. J'ai vu son sourire. Et cette fois-ci, c'était réel. C'était pas mon imagination. C'était Maxime et Mattéo.
Ils sont venus pour moi.
- Shana...
.
.
Mes vers verts en verre vert... J'ai qu'une seule chose à vous dire cette fois-ci.
Kisses for you bitches <3
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The Gazelle's Hunt
RomantizmAlex est un policier investi qui réussit tout et qui attend maintenant d'être promu sergent. Encore faudrait-il qu'il attrape la plus grande criminelle de Paris que l'on surnomme Gazelle. Elle vole des œuvres d'arts convoitées et n'a jamais dévoilé...