22 . dur départ

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WINSTON MURPHY

JE JETTE un dernier coup d'œil dans ma chambre d'hôtel pour m'assurer que je n'ai rien oublié. Dans quelques heures, je devrai être dans la capitale française afin de me préparer pour la finale, qui se déroule demain. Je suis dans un état d'esprit qui me pousse à me battre parce que mon frère l'aurait voulu. Cette finale, elle est à nous deux. Il la mérite autant que moi.

  En dix minutes top chrono, j'ai eu le temps de rendre ma chambre d'hôtel et de monter en voiture avec Leighton. Etant arrivé à Rio avant mes parents, j'avais déjà une chambre d'hôtel payée par Esposito. Par chance, mes parents ont pu réserver dans le même hôtel.

  Leighton partageait la chambre avec moi. De ce fait, elle est à mes côtés pour saluer mon frère à l'hôpital et pour saluer nos parents. Nous récupérerons au passage Charlie à l'hôpital, qui nous attend avec nos parents. D'après les messages qu'il envoie à Leighton, maman parle beaucoup avec lui, tandis que papa traîne sur son téléphone. Rien d'étonnant.

  Quelques minutes plus tard, je me gare sur le parking de l'hôpital. Ma cadette et moi sortons en même temps.

  — On a vingt minutes, j'annonce froidement en regardant l'heure sur mon téléphone.

  Leighton me regarde, l'air concernée.

  — Après-demain, on sera de retour à Rio, déclare-t-elle. Essaie de prendre les choses plus légèrement.

  — Tu ne penses pas que c'est ce que j'essaie de faire depuis le début ? je rétorque sèchement, presque vexé par sa réflexion.

  Depuis qu'on est dans ce pétrin, je passe mon temps à essayer de ne pas prendre trop les choses à cœur pour avancer dans la compétition. Mais c'est impossible. La finale approche et je ne me sens pas du tout prêt. Je ne me suis pas voué au championnat ces derniers jours et j'ai peur d'avoir perdu les compétences que j'avais acquises jusqu'ici. J'ai peur de me taper la honte de ma vie et de perdre cette finale. J'ai pas envie que les gens imaginent que je me suis retrouvée ici par chance. Non, j'ai bossé dur pour arriver là où je suis. Les gens doivent le sentir.

  — C'était juste un conseil, tu le prends ou tu le laisses, réplique-t-elle sur un ton froid inhabituel qui me fait froid dans le dos.

   — Désolé, je lâche finalement en baissant la tête. Je suis juste effrayé par le futur. Tout ne tient qu'à un fil.

  Elle se rapproche de moi et m'étreinte doucement.

  — N'oublie pas que mes oreilles sont toujours prêtes à écouter tes lamentations.

  Si je pouvais prendre toutes les pensées tristes de ma sœur et les mettre sur mes épaules, je le ferais. Son sourire m'est si cher et si précieux, il ne devrait jamais quitter ses lèvres.

  — Qu'est-ce que je ferais sans toi ? je demande sincèrement, continuant de la serrer dans mes bras au milieu de ce parking rempli de voitures.

  — Tu serais un raté, plaisante-t-elle en s'éloignant doucement de moi. Sans rire, peu importe les choix et les décisions que tu prendras, nous, ta famille, te supporterons toujours. Tu vas tout déchirer à cette finale, j'en suis sûre. Mes bonnes ondes dans le public t'aideront.

  — C'est clair.

  — Montre au monde qui est Winston Murphy.

  Nous reprenons notre chemin vers l'hôpital. Quelques minutes plus tard, nous nous retrouvons dans la chambre de Wolfgang. Ses yeux sont toujours clos et il n'a pas bougé depuis ma dernière venue, hier après-midi.

  Je m'approche du lit et dépose un baiser sur son front. Je regarde son visage immobile, son ventre se gonfler et se dégonfler au rythme de sa respiration régulière. Je l'analyse pour garder une trace de lui dans ma tête. Si j'ai envie de tout abandonner, je penserai à lui et la motivation reviendra naturellement.

  Tous les occupants de la chambre se sont retournés et parlent entre eux pour me laisser un moment d'intimité avec mon frère.

  — Je reviendrai vite te voir, je lui assure. S'il-te-plaît, attends-moi pour te réveiller. Je veux être là pour ce moment magique.

  J'espère que cette requête ne sonne pas trop égoïste. Assister à ce moment serait fantastique. Voir ses paupières se décoller pour me laisser entrevoir ses prunelles qui me manquent tant, ce serait merveilleux.

  — Quand on se reverra, j'aurai la coupe entre les mains, j'affirme avant de m'éloigner.

  C'est un de mes premiers échanges avec lui sans pleurer. Je commence à m'habituer à la situation, et c'est terrifiant.

J'ai déposé Leighton et Charlie à l'hôtel il y a quelques minutes déjà. Ils sont impatients pour la finale de demain, si bien que je suis impatient à mon tour.

J'arrive devant la salle d'entraînement que je vais occuper jusqu'à tard ce soir, et un peu demain matin. J'ouvre la porte.

Paris est une ville fantastique. C'est la seconde fois que j'y mets les pieds. La première fois que j'y ai été, c'était quand j'avais sept ans. C'est pourquoi je n'ai qu'un vague souvenir de la capitale française. Si j'avais pu rester plus longtemps, je l'aurais fait sans l'ombre d'une hésitation.

  Quand j'entre dans le gymnase, j'aperçois Tyler. Il semble être seul, avec sa musique. D'ailleurs, je peux constater que nos goûts musicaux diffèrent beaucoup. Il a mis du métal.

  Tyler est un adversaire de taille qui ne s'est jamais laissé abattre. Nous avons un peu parlé au fil du championnat. Cependant, il ne semble pas être venu ici pour se faire des potes, loin de là.

  En entendant la porte s'ouvrir, il se tourne vers moi et arrête ce qu'il était en train de faire. Il était en train de taper dans un sac. Il m'adresse alors un petit sourire en se dirigeant vers moi.

  — Voilà mon adversaire, commente-t-il une fois arrivé à mon niveau.

  Il me fait une poignée de main, me laissant désarçonné. Il ne semble pas dans la compétition, et ça m'intrigue un peu.

  — Je vois que tu es perplexe, remarque-t-il. Ce n'est pas parce que tu vas finir K.O. demain qu'on ne peut pas être en bon terme.

  Je le toise du regard.

  — C'est toi qui finira K.O., comme tous mes adversaires. Tu n'en es qu'un parmi tant d'autres.

  — Peut-être qu'à cause de Wolfgang, tu seras plus nul demain.

  — Joue pas sur ce terrain, Tyler, je le sermonne calmement. Tu risques de t'en mordre les doigts.

  — C'est toi qui mordra la poussière.

  Je lève les yeux au ciel.

  — Retourne t'entraîner à perdre dans ton coin, je suggère en m'éloignant de lui.

  Je pose mon sac dans un coin du gymnase et arrive devant un sac de boxe. C'est un bon moyen de débuter les échauffements.

  — Pas de pitié demain, s'il-te-plaît, je demande. J'ai déjà reçu assez de pitié ces derniers jours.

  — C'est entendu.

𝐓𝐇𝐄 𝐌𝐔𝐑𝐏𝐇𝐘𝐒Où les histoires vivent. Découvrez maintenant