Alors que je me balançais tranquillement sur la vieille balançoire, un pinceau à la main, je me laissais emporter par la douceur de ce moment si familier. Après une journée de galère, c'était mon rituel réconfortant. La peinture, le jardinage... Ces activités, je les tenais de ma mère. Elle aurait adoré me voir ainsi, perdu dans mes pensées et mes coups de pinceau.
Dans notre petit coin de village, où les femmes semblaient toutes aspirer aux bijoux et aux fêtes, ma mère était différente. Elle préférait de loin la simplicité des arts de la terre et de la toile. C'était elle qui nous avait initiés, à mon frère Nikolai et à moi. Mais lui n'avait pas vraiment accroché. Moi, en revanche, j'avais aimé.
Ma mère, c'était l'amour le plus pur que j'aie jamais connu. Même si je ne pouvais pas comparer cet amour à celui que je portais à Abigail. Elle était mon premier amour, mon tout premier. Et je savais, au fond de moi, que ça serait aussi le dernier. Elle représentait tout ce qui comptait : mon premier baiser, ma première fois, notre premier enfant, notre mariage... Tout.
Mes yeux dérivent vers la porte alors que je sens un mouvement à mes côtés. Marilyn est là, arborant un sourire qui annonce une demande imminente. Je soupire tandis que j'entends ses talons se diriger vers moi, brisant le silence du jardin.
— Salut, Vava chou ! dit-elle avec une fausse innocence.
Je lui adresse un regard las, un mélange de lassitude et d'irritation.
- Qu'est-ce que tu veux ? demandai-je d'un ton détaché.
— Je peux sortir ? demande-t-elle soudainement, son regard implorant trahissant une envie pressante de liberté.
Je l'observe, les sourcils levés, surpris par sa demande inhabituelle.
— Avec Verónica,ajoute-t-elle, comme pour justifier sa requête.
— Non, répondis-je fermement, laissant transparaître mon inquiétude.
La dernière fois qu'elle est sortie, elle s'est faite kidnapper. Elle était bien mieux à la maison, à ne rien faire, plutôt que de risquer sa sécurité à l'extérieur.
Elle saisit mon bras, me suppliant du regard, mais ma réponse reste inchangée.
— La dernière fois que nous sommes sortis, tout s'est bien passé !insiste-t-elle, tentant de me convaincre.
— Je m'en fous, répliquai-je, laissant entrevoir mon désarroi. Elle n'est pas bien, elle n'est pas d'humeur à sortir.
— Comment tu peux le savoir? Tu ne lui parles jamais, Ivan, rétorque-t-elle, pointant du doigt mon manque de communication avec Verónica.
J'ai envie de lui arracher les yeux, cette façon de me faire passer pour un idiot. Je me retiens et, sans crier, comme je le fais habituellement, je réponds d'un ton las :
— Comment aurait-elle pu te dire ça alors qu'elle ne parle pas depuis 1 mois ?
Elle hausse les épaules avec désinvolture, repoussant ses cheveux de son visage avec un geste familier.
— Je suis son amie, elle me préfère à toi, logique, déclare-t-elle avec un sourire narquois.
Je lève les yeux au ciel, décidant de ne pas relever cette pique. Reprenant ma peinture, je m'absorbe dans mes pensées, ignorant ses soupirs exaspérés et ses caprices d'enfant. Une autre présence se fait alors sentir dans la pièce, mais je ne prends même pas la peine de lever la tête pour l'identifier.

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The mystical dance
FantasyDans un monde où chimères et humains coexistent, Verónica Raichands, étudiante en sciences spécialisée dans les chimères, se distingue par sa fascination pour ces créatures, contrairement à la plupart des humains qui les craignent. Issue d'une famil...