Naëlle - La cliente #38

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Élise souffle pour évacuer le stress pendant que l'avocate hésite à la rejoindre en détaillant chaque recoin de l'appartement. Je les quitte pour la cuisine.

— Dis-moi, pourquoi as-tu annulé notre week-end à la dernière minute ? Et tous nos rendez-vous ? Tu ne veux plus me voir ?

Helena semble très peinée et j'en suis désolée. De cette pièce, la conversation ne peut m'échapper et j'ai peur de découvrir les raisons d'Élise.

— Je ne peux plus. Tu es la patronne de Naëlle et elle est ma famille, cette histoire devient trop personnelle. Mais ne lui en tiens pas rigueur, s'il te plaît. Mon travail, je l'ai accepté pour qu'elle puisse avoir la vie dont elle rêve. Pas une vie d'oméga. Tu me comprends ?
— Je comprends... murmure la brune à contrecœur, mais je ne sais pas comment faire sans toi... Je t'aim...
— Non, Helena... Ne dis rien, je t'en prie... Pas comme ça, pas ici. Plus maintenant...

Silence.

— Viens là... Une dernière fois... termine ma sœur dans un souffle douloureux.

Un nouveau silence s'ensuit, pendant lequel j'imagine leurs adieux se sceller dans une étreinte.

— Ne t'inquiète pas, je prendrai soin d'elle, pour toi...
— Merci. Pour tout...
— Élise est un joli prénom, j'aurais aimé l'utiliser...

Après quelques secondes, j'entends la porte d'entrée se fermer, puis encore ce silence pesant qui me laisse démunie. À cet instant, je me remémore le visage rayonnant d'Élise lorsqu'elle rentrait de ses week-ends, les heures qu'elle passait à se préparer pour ses rendez-vous avec l'avocate et ses yeux pétillants quand elle partait la rejoindre. 

Cette conversation n'est en rien une rupture de contrat de travail. Et j'ai l'impression de lui voler son bonheur au profit du mien. Toute sa vie s'articule autour de moi, se définit à travers moi. J'en prends pleinement conscience à cette minute. J'ai honte de mon égoïsme.

— Mangeons, tu veux bien ? me convie-t-elle en entrant dans la pièce avec assurance.

— Élise...
— Non, me coupe-t-elle. Nous ne parlerons jamais de ce qui s'est passé ce soir, ni entre nous ni à personne. C'est d'accord ?
— Mais...
— C'est d'accord ?
— Oui..
— Mange. Demain, tu ne pourras à nouveau plus rien avaler.

Omegalove - Johanne MillotOù les histoires vivent. Découvrez maintenant