Le poids du silence
Le lendemain
C'est le week-end, et je profite de cette journée pour faire la grasse matinée. En me réveillant, je vois qu'il est déjà 11h sur mon téléphone. Je me lève difficilement après une semaine épuisante et me dirige vers la douche. En sortant, je surprends une discussion entre Aymen et Souleymane.
- Aymen : Fréro, je sais pas quoi faire.
- Souleymane : Parle-lui, sérieux, si c'est la bonne, la perds pas.
- Aymen : Mais elle veut plus de moi, j'ai merdé.
- Souleymane : Tu regrettes, non ? Alors bouge-toi et agis comme un homme.
- Aymen : T'as raison, mon frère.
- Souleymane : Bah ouais, tu crois que j'allais te laisser la laisser à l'autre bouffon ?
Ils rient ensemble et se mettent à jouer à la play comme d'habitude
Je me précipite dans ma chambre en essayant de ne pas faire de bruit. Je suis sûr à 100 % qu'ils parlent d'Ibtissem, et ce qu'ils ne savent pas, c'est qu'elle vient dormir à la maison ce soir. Je suis trop excité.
Je fais comme si de rien n'était en rejoignant les garçons dans le salon, une boîte de céréales à la main. Je verse les flocons dans un bol, le bruit du lait qui coule résonne doucement dans la pièce silencieuse. Souleymane est particulièrement distant aujourd'hui. Il ne parle presque pas, son regard concentré sur l'écran de la télévision. Il semble absorbé par le jeu, comme si la victoire virtuelle pouvait compenser son humeur sombre. Aymen, à côté de lui, est tout aussi concentré, mais j'ai l'impression qu'il est en train de perdre de l'intérêt.
Je m'installe sur une chaise dans la cuisine, mes jambes repliées sous moi, prenant une bouchée de céréales tout en observant les deux garçons du coin de l'œil. Le silence est lourd, mais pas désagréable. C'est un silence plein de sous-entendus, de mots non dits. Je sens le poids de son silence, mais je fais de mon mieux pour ne pas le laisser affecter l'atmosphère.
- Aymen : Je vais prendre l'air, déclare soudain Aymen, en posant sa manette. J'ai besoin de bouger un peu.
Souleymane ne lui adresse qu'un bref regard, hochant à peine la tête. Moi, je sens un léger frisson me parcourir. C'est comme si, d'un coup, l'atmosphère changeait, devenant plus lourde, plus intense. Aymen se lève, attrape sa veste, et sans un mot de plus, il quitte la pièce, me laissant seule avec Souleymane.
Le silence qui s'installe entre nous est encore plus lourd que le précédent. Je sens mon cœur battre plus vite. Souleymane ne dit rien, ne bouge pas, mais je sais qu'il est conscient de ma présence, tout comme je suis consciente de la sienne. Le simple fait d'être seuls change tout.
Je prends une autre bouchée de céréales, essayant de paraître nonchalant. C'est un jeu que nous jouons depuis un moment, un jeu dangereux où ni l'un ni l'autre n'est prêt à céder.
- Moi : T'en veux ? je lance d'un ton léger, levant la boîte de céréales vers lui.
Il tourne la tête vers moi, et cette fois, il me regarde vraiment. Ses yeux sombres semblent scruter mon âme, et je sens mes joues s'empourprer légèrement sous son regard. Il esquisse un sourire, mais c'est un sourire sans chaleur, presque ironique.
- Souleymane : Non, merci, dit-il simplement, sa voix basse et grave résonnant dans le silence de la pièce.
Je sens une vague de chaleur monter en moi, un mélange de gêne et de quelque chose de plus profond, de plus intense. Le silence s'étire, devenant presque insupportable. Je ne supporte plus cette distance entre nous, cette tension qui menace de tout faire exploser.