Chapitre 43

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Hugo

Je traverse la ville, aussi vite que je peux, mais comme toujours dans ces moments-là, tous les feux passent au rouge quand on arrive dessus ou on se retrouve coincé derrière une voiture qui n'avance à rien.

J'ai senti l'urgence dans la voix de Gabin. C'est la deuxième fois que ça arrive depuis qu'on est de nouveau ensemble. Ce besoin irrépressible d'aller jouer. La première fois, il venait d'aller boire un coup avec des collègues de travail dans un bar à bière. Il avait un peu trop bu et ses pas l'avaient entraîné jusqu'à la salle de jeu. Dans, la soirée, sans nouvelle de lui, je lui avais envoyé un message et il m'avait répondu aussitôt.

« Je joue... Je suis désolé. Je ne sais pas comment arrêter. Aide-moi. »

J'avais accouru. Je l'avais un peu sermonné tout en lui disant que j'étais content qu'il me réponde et qu'il ait été honnête. Ce à quoi il m'avait répondu « toujours ». Et je le crois. Je crois vraiment qu'il fait de son mieux et je trouve même qu'il se débrouille plutôt bien pour s'en sortir. Il est sur la bonne voie. Puis il est devenu casanier, peut-être par la force des choses, mais je crois que ça lui plaît de rentrer le soir et de rester la soirée rien qu'avec moi, à cuisiner, à flâner devant la télé, ou même à me montrer le style de déco qu'il aime bien. Je crois bien d'ailleurs qu'il essaie de me faire passer un message, mais pour l'instant je feins l'innocence et attends qu'il ose me demander les choses clairement.

J'arrive devant le bar de jeu habituel. Il est installé à une table, une tasse fumante devant lui, les yeux dans le vague, pendant que sa jambe tressaute sous la table. Je commande la même chose et je m'installe en face de lui. Il n'ose pas me regarder. Je sais que c'est dur pour lui de montrer ses faiblesses. J'allonge mon bras pour poser ma main sur la sienne.

— Je suis là, le rassuré-je. Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

— Journée de merde au boulot, j'étais en retard sur les livraisons, toute la journée, et j'étais à cran. Ce soir en partant, je ne me suis pas posé de questions, je suis rentré directement ici.

— C'est souvent que tu es sous pression au boulot. Pourquoi c'est différent aujourd'hui ?

J'essaie de savoir s'il sait quel a été le vrai élément déclencheur pour éviter que la situation ne se représente. Il m'a expliqué qu'il devait essayer de ne pas reproduire les schémas qui le font replonger. Et le mieux pour les découvrir est d'en discuter.

— Leur sbire est venu me trouver à la pause déjeuner...

Les videurs du bar de jeu... Je me tends sur ma chaise et ma main serre un peu plus fort la sienne. Si c'est possible, son regard fuit encore plus le mien.

— Ils m'ont ouvert un compte avec mille balles dessus, à jouer quand je voulais et comme je voulais ? Ça m'a travaillé tout l'après-midi. J'aurais dû t'en parler à ce moment-là...

— C'est bon Gabin, l'important c'est que tu le fasses. Tu as su t'arrêter. Tu dois combien ?

La question de l'argent est toujours une priorité parce que mon argent n'est pas extensible, surtout depuis que j'ai fait mon coming-out auprès de mes parents et que je leur ai dit que je sortais avec Gabin. Ils n'ont rien dit. Ma mère s'est contentée de pincer les lèvres, en faisant une réflexion comme quoi j'avais perdu la raison, mais sans partir dans de grands discours moralisateurs. Mon père a simplement dit que c'était ma décision et que j'étais assez grand pour choisir pour moi, peu importe si mes choix étaient judicieux ou pas. Depuis je n'ai plus de nouvelles et je n'en donne pas non plus. Peut-être que d'ici quelque temps, ils viendront sonner à la porte ou peut-être qu'ils bloqueront encore mes comptes. Mais, je me suis fait un petit pécule sur des comptes à l'étranger au cas où.

— Je gagnais...

Je suis un peu surpris de sa réponse.

— C'était excitant de voir tous ces jetons devant moi et j'imaginais déjà les liasses de billets puis j'ai pensé à toi et je me suis rendu compte que je faisais une grosse connerie. Je t'ai appelé tout de suite avant de me raviser et j'ai quitté la table.

— Je suis fier de toi.

Il croise pour la première fois mon regard, incertain.

— Maintenant, on va rentrer et tu vas laisser cet argent ici.

Il semble choqué.

— Tu as gagné combien ?

— Un peu plus de seize mille.

On peut dire qu'il a eu une bonne main.

— OK raison de plus. Il est hors de question que tu te fasses plaisir avec cet argent-là.

Gabin semble un peu pommé, mais il acquiesce.

— On rentre ? lui proposé-je.

Il se lève et je sens que ça lui demande beaucoup d'effort de quitter cet endroit. Je lui donne son casque et il l'enfile avant de grimper derrière moi sans un mot. Un peu plus loin, alors que nous sommes arrêtés à un feu rouge, il s'excuse.

— Je suis désolé. Je pensais pouvoir résister...

Il m'étreint avec force. Je pose ma main sur son avant-bras et tourne légèrement la tête dans sa direction.

— Tu as peut-être flanché à un moment donné, mais tu as résisté Gabin. Tu m'as appelé parce que tu veux t'en sortir et rien que pour ça, tu as tout mon respect.

Il pose sa tête contre mon dos et se sert un peu plus contre moi. Je sais que la route est encore longue avant qu'il n'arrive à se débarrasser totalement de cette addiction, mais je serais là pour l'aider. Et j'espère bien devenir son addiction. Je crois bien que je suis sur la bonne voie.

Je profite de son corps contre le mien. Il n'y a que comme ça que je me sens bien, lui contre moi, dans mes bras et nos regards l'un dans l'autre, c'est tout ce dont j'ai besoin. Vivre d'amour et d'eau fraîche, je crois bien que c'est possible finalement.

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⏰ Dernière mise à jour : 2 days ago ⏰

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