Chapitre 8

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Hugo

Quelques minutes plus tard, on se retrouve tous les deux dans la voiture et je tente d'éclaircir le sujet Naël.

— Vous n'avez pas l'air de bien vous entendre ton frère et toi.

Gabin ricane sans lâcher la route des yeux.

— Tu n'as pas de frère, ça se voit.

Je me ferme aussitôt. Non, je n'ai pas eu de frère et ça m'a pesé toute mon enfance, peut-être même encore un peu aujourd'hui. J'aurais aimé connaître la complicité d'un frère ou d'une sœur, avoir un allié dans cette famille où les attentes de mes parents n'ont toujours reposé que sur mes épaules. Quelqu'un qui aurait partagé avec moi mon manque de confiance, la peur de décevoir et comprendre que je n'avais pas envie de suivre le chemin qu'ils m'avaient tracé dès ma venue au monde.

— Notre existence entière se résume à se haïr et à se tomber dans les bras, reprend Gabin qui a toujours les yeux sur la route. Quand il ne m'en voulait pas d'avoir une plus belle petite voiture que lui, c'est moi qui lui reprochais d'avoir la figurine que je voulais. On a passé notre enfance à se disputer pour des broutilles et à être inséparable dans la connerie.

— C'est pas l'impression que vous m'avez donnée aujourd'hui.

Gabin souffle de dépit et hausse les épaules. L'atmosphère dans l'habitacle est plus lourde.

— Il m'en veut, me confie-t-il. J'ai eu quelques problèmes d'argent, y a un moment, et nos parents m'ont aidé. Il ne l'a pas accepté.

La lumière se fait dans mon esprit.

— Il a dû travailler pour payer ses études et il t'a mis ça sur le dos.

— Non là-dessus, il a été honnête. Mes parents auraient pu payer, mais il a refusé. Il ne voulait pas devenir un fardeau comme je l'ai été. Comme je le suis toujours avec toi.

— T'es pas un fardeau et je suis certain que tes parents ne te voient pas comme ça non plus.

— Arrête, ne me dis pas que ça ne te saoule pas de devoir manger des pattes la moitié de la semaine.

— Je t'ai déjà dit que ce n'était pas un problème pour moi. Puis régulièrement, tu partages les bons plats faits maison de ta mère.

Je lui désigne le sac posé à mes pieds et il me rend un sourire.

Je me doute que le changement de travail successif a dû être compliqué pour lui financièrement. Et j'imagine l'humilité dont il doit faire preuve pour oser m'en parler aujourd'hui. Aussi je n'insiste pas et je pose la question qui me brule les lèvres depuis que son père m'a parlé de tous ceux qui sont passés avant moi. Celles que je n'avais jamais posées jusque-là, pensant que ça n'avait pas d'importance, mais maintenant elle accapare mon esprit.

— T'as eu beaucoup de colocs ?

Il me jette un rapide coup d'œil surpris, avant de regarder à nouveau la route. Je le fixe en attendant sa réponse et analyse son expression, son visage. J'ai le droit au profil sans ecchymose et je me surprends à le détailler, un peu trop, sans pour autant détourner le regard.

— Cinq en cinq ans.

Il me sort de ma contemplation.

— Je suis le cinquième ?

Il acquiesce. Je fais un rapide calcul. J'ai aménagé depuis quelques mois et Ethan est resté deux ans. Ça fait trois locataires en à peine trois ans.

— T'as couché avec combien d'entre eux ?

La commissure de ses lèvres se relève dans un sourire amusé.

Séduction sous contrat MxMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant