Ch. 19 : Première fois

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Le cours s'achève sur une note mitigée, la plupart des danseurs sont lessivés par leur journée de travail et ne montrent pas l'étendu de leur capacité. Je les sollicite mais je n'obtiens que des plaintes à peine voilées. L'un d'entre eux se blesse, sa cheville enfle rapidement, je devine une foulure et demande à l'un de ses camarades de l'accompagner jusqu'à une pharmacie qui se trouve plus loin dans la rue. Il clopine jusqu'à la porte et cette dernière se referme sur les deux hommes. Je souffle, agacée par la tournure peu productive de cette répétition. Mais comment leur en vouloir ?

- Vous pouvez ranger vos affaires et filer, finis-je par les prévenir.

- T'es sûre ? Il est encore tôt ...

- Vous êtes tous épuisés. Je prévoirai peut-être plus de séances mais réduirai leur temps.

Chacun ramasse son bazar et je les regarde sortir un par un jusqu'à ce que le dernier referme la porte derrière lui. Comment vais-je m'y prendre pour leur apprendre les nouveaux enchaînements ?

- Tu as l'air contrarié ? s'étonne Jungkook en s'approchant de moi.

- Comment ne pas l'être ? On est super à la bourre et on avance pas ...

- J'ai trouvé que tu t'en sortais plutôt bien.

- Merci, répondis-je en rassemblant mes effets, mais le problème c'est le manque de temps. On ne sera jamais opérationnels si nous n'accélérons pas un peu la cadence.

- Mais ils sont trop fatigués ... n'est-ce pas ?

J'acquiesce tout en zippant la fermeture éclaire de mon sac.

- Et toi ? Comment te sens-tu ?

La question me surprend. Je me retourne sur lui pour comprendre son interrogation.

- Tu veux parler de mon nez ? me moquais-je.

- Non ... j'avais l'intention de répéter notre duo.

Je réfléchis à sa proposition.

- Il n'est pas tard. On peut en effet profiter du début de soirée pour travailler ce porté de malheur !

- Parfait ! Alors Déshabille-toi ! dit-il naturellement en retirant son tee-shirt.

Je le dévisage incrédule. Son torse luisant sous les néons blancs de la salle m'hypnotise et mes yeux ne le quittent pas.

- Babe ? Tu attends quoi ?

- Tu veux dire quoi par me déshabiller ?

Un sourire étire ses belles lèvres et ses yeux se plongent dans les miens.

- Je suppose que tu portes des sous-vêtements ?

Je hoche la tête.

- Alors retire ton débardeur et ton leggings ... et essayons quelque chose.

Je m'exécute. En shorty et en brassière, je m'avance au centre de la pièce. Il lance la musique et sa voix enivrante envahie l'espace. Comme ce jour sous la pluie, je le laisse mener la danse. Il me guide dans une espèce de corrida où je ne suis qu'un animal apeuré et craintif avec qui il joue. Il m'attire et me repousse dans un même élan, je rythme mon pas au sien et nous occupons l'entièreté de l'espace. Il évolue sur le parquet avec l'aisance d'un félin et je suis subjuguée par la délicatesse de ses gestes et la précision de ses mouvements. Il me porte dans son univers à la fois triste et mélancolique mais sensuel et voluptueux. Le dernier refrain, il est temps de s'exécuter. Je recule en deux trois enjambée puis prend de l'élan et saute pour atterrir sur son dos. Mes mains fermement positionnées sur ses trapèzes, j'allonge mes bras et reste un instant en appui sur ses épaules. Je passe ma jambe sur sa gauche, il assure ma descente et je glisse le long de son torse. Nos regards se croisent et je suis dans ses bras. Il les referme sur ma taille et la dernière note résonne. Le silence s'installe mais il n'est ni pesant, ni dérangeant, il est celui dans lequel l'âme se berce d'illusions. J'essaie de décrypter la lueur qui brille au fond de ses prunelles mais je la découvre pour la première fois et mon cœur s'emballe. Mes mains toujours accrochées à sa nuque, mon corps plaqué contre le sien, je sens la tension naître entre nous. Ses lèvres entrouvertes, je devine sa respiration irascible mais la chaleur qui émane de son être me brûle la peau et un feu incandescent naît aux creux de mes reins. Poussée par un élan de bravoure, je dépose un chaste baiser sur ses lèvres mais il ne réagit pas. Sa langue passe sur ses pulpes rosées comme pour se satisfaire de leur goût mais ses bras me lâchent. Je ne veux pas m'avouer vaincue, je réitère et appuie plus violemment ma bouche sur la sienne, cette fois il me repousse.

I got you BabeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant