17. Apocalypse

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Ce jour-là, le ciel resplendissait de trois nouvelles étoiles, trois nouvelles boules lumineuses qui brillaient même en plein jour. Les populations émirent de nombreuses spéculations sur ce signe. Les religions profitèrent de cette opportunité pour annoncer la fin des temps, pour ferrer les fidèles dans la manipulation et la crédulité. Bien sûr, les scientifiques diffusèrent une autre interprétation du phénomène.

Ce jour-là, dans la cité en ruine, sous le déluge des belligérants, l'enfant naquit. Sa naissance eut lieu à la verticale des trois étoiles, si un tel concept était valable. D'ailleurs il n'y avait aucune raison que les deux événements soient liés ; que savons-nous des intentions de l'Univers ? Lorsque le bébé poussa son premier cri, les armes se turent sur une dizaine de kilomètre de l'endroit de sa délivrance.

L'enfant naquit les yeux ouverts pleins de merveilles, une chevelure argentée, les jambes prêtes à marcher et le plus étonnant avec la parole. Ses premiers mots furent « Je suis venu pour déclencher l'apocalypse. ». Horrifiée, la sage-femme qui avait aidé à l'accouchement se signa et conseilla aux parents de tuer cette abomination. Le prêtre approuva aussi cette issue. Les parents refusèrent et ils furent traités d'impies. Le religieux tenta d'assassiner le bébé ! Ce dernier le regarda droit dans les yeux et l'ecclésiastique s'enfuit. Personne ne le revit.

Une semaine plus tard, les ruines furent redressées. Les populations reprirent possession de leurs logements. La paix s'imposa sur une centaine de kilomètres. Les soldats abandonnèrent leur arme sur place et les pilotes désertèrent leur char. Les états-majors des belligérants menaçaient, condamnaient, exécutaient mais rien n'empêchait les militaires de quitter leur poste. Bientôt ce fut le tour des officiers supérieurs de laisser leur tâche pour fuir le théâtre des opérations.

Le mois suivant, l'enfant se mit à grandir rapidement. Maintenant, il avait l'apparence d'un adolescent. Les yeux ouverts avec mille étincelles dans les pupilles, il regarda le ciel. Des milliers de fragments lumineux apparurent. Quadrillant la Terre entière, les éclats brillaient comme des étoiles. Puis ils se mirent à tomber au sol. L'émotion fut vive. Cependant ces cristaux flamboyants se plantèrent tels des arbres. Emettant une faible radiation, ils pulsèrent des ondes sur l'ensemble du globe comme une mer rougeâtre.

A partir de ce moment-là, les malades commencèrent à guérir. Les blessures se refermèrent. Les maladies furent éradiquées. Les handicaps se résorbèrent. Les membres mutilés se reconstituèrent. Les psychotiques se rétablirent. La première réaction fut une émotion de joie devant ces miracles. Mais les sociétés pharmaceutiques virent leurs actions dégringoler. Les gouvernements finirent par paniquer car une partie de l'économie s'effondrait sous leurs yeux. Ils décidèrent de s'attaquer au problème.

Puis vint le premier cavalier de l'apocalypse. Assainissement était son nom. Sur son cheval blanc, il détruisait sur son passage les pollutions, les pesticides, les insecticides. Ensuite vint le deuxième qui s'appelait Joie. Il apporta le bonheur sur toute la surface de la Terre. Enfin vint le dernier qui s'appelait Liberté. Sur son passage, il emportait les addictions, les monnaies, les médias. Toutes formes d'esclavage furent abolies.

Alors la bête apparut. Elle se dénommait Politique. Derrière elle se rangeait les gouvernements qui luttaient contre les changements. Elle distribua des mots manipulateurs, des discours envouteurs pour éloigner les populations de l'attraction qui venait de l'Enfant. Elle trônait au sommet de la tour de l'Economie. Elle diffusait son message de haine pour convaincre les gens de la rejoindre pour la bataille finale.

La fin des temps arriva. Pendant qu'une partie des terriens se regroupait derrière la bannière de la bête, le reste contempla la face de l'Enfant. Et quand la bataille fut inévitable, la terre s'ébranla. Lentement deux planètes identiques se différencièrent, chaque faction reçut la sienne. La guerre n'eut pas lieu. Chacun put vivre en harmonie avec ses croyances ou avec sa liberté. La révélation fut accomplie.

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