Un dernier paradis- Tome 3

Chapitre 42

Ce jour-là, c'était la première fois que Milan assistait à une bataille. Elle avait déjà vu et connu la violence et le Mal sous toutes ses formes. Néanmoins, à chaque cri qui quittait la mêlée quelques centaines de mètres plus loin, ses entrailles se vrillaient.
C'est pourquoi, après cette guerre, elle espérait ne plus en subir d'autres.

Milan se trouvait toujours sur le toit de la petite maison dans le village asiatique en compagnie d'Eliot. Malgré le fait que la guerre ait commencé, les gardes qui surveillaient le village continuaient plus ou moins sereinement leur ronde. Certains soldats paraissaient étonnés de voir Milan et Eliot perchés sur le toit d'une maison mais après leur avoir jeté un bref coup d'œil, ils finissaient par les ignorer. Ils étaient trop absorbés par leur démarche monotone.

 Tandis que les lames des épées s'entrechoquaient, il y avait quelque chose au fond du cœur de Milan qui se déchirait lorsque les hurlements de rage, de douleur ou de désespoir retentissaient.

La jeune fille prit une profonde inspiration. Même si elle commençait à stresser pour de bon, il fallait trouver Abel et mettre un terme à cette bataille.

 Au plus tôt elle affronterait le sorcier, au plus tôt la guerre se terminera.

Allons survoler le camps ennemi pour trouver Abel, propose Milan à son hippogriffe. Si je vois des chimères, j'en profiterai pour les abattre. 

Luny ne prit pas la peine de lui répondre en pensée mais se contentait d'un faible hochement de tête. Milan se retourne alors pour croiser le regard d'Eliot.
Ce dernier lui souriait d'un air qui se voulait rassurant, mais le yoyo de sa pomme d'Adam montrait qu'il était tout aussi nerveux qu'elle.

Cela rassurait Milan quelque peu : on avait beau être un guerrier accompli, le son des armes et l'odeur de la mort avaient toujours leur effet.

- On va essayer de dénicher Abel jusqu'aux troupes ennemies les plus lointaines, explique la jeune fille. Si on arrive à l'affronter maintenant, nos chances de survie et celles des humains seront meilleures...

Eliot enroule ses doigts autour de la crinière de son pégase. Le métamorphe acquiesce suite à la proposition de Milan. Car, comme à son habitude, elle avait raison.

- Et je ne te quitterais pas d'une semelle, Milan, lui assure Eliot avec un regard déterminé.

Après avoir souri et essayé d'ignorer les faibles papillons dans son estomac, Milan avait demandé à Luny de s'envoler.
La voix grave d'Eliot avait toujours le même effet sur son pauvre cœur. Heureusement qu'il était à ses côtés car Milan savait qu'Eliot l'aimait et cet amour était profondément réciproque.
Les derniers événements l'empêchaient de s'exprimer clairement, mais quand tout sera fini, Milan compte bien se concentrer sur ses sentiments comme une jeune femme normale.

Une fois que Luny était assez haut dans les airs pour entamer sa traversée du champ de bataille, Milan chasse ces pensées de son esprit. Elle devait se concentrer.

Ce jour là il faisait très nuageux, la grisaille et le brouillard parviendraient certainement à les dissimuler aux yeux de leurs ennemis. C'était un premier avantage pour eux.
Luny prenait ainsi bien soin de voler derrière chaque nuage épais et cotonneux pour ne pas attirer l'attention.

Malgré son angoisse et son appréhension, Milan parvient doucement à oublier ses craintes pour se concentrer sur sa mission : trouver Abel et détruire ses chimères. Elle en faisait son mantra et se le répétait en boucle pour que ces mots s'ancrent dans sa tête et dans tout son corps.

En effet, Milan ne devait pas affronter le sorcier à mains nues, sinon c'en était fini pour elle et pour le monde entier. Non, elle devait réveiller sa magie.