Le coup de minuit alias le coup de trop.

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Noélanie et moi nous sommes effectivement revus par la suite, nous prenions un café ensemble ou allions à des expositions et des fêtes, des réceptions ensemble, tout cela de manière aérée. Si nous ne nous voyions pas ou plus, le destin se chargeait toujours de faire en sorte que nous puissions nous croiser dans la rue, ou pour ma part, que je puisse la voir dans le bus le matin, en train de lire un livre ou de la cafétéria en train de manger au restaurant que je lui avait montré. Oui, on avait été amenés à se voir qu'on le veuille ou non... Les jours ont passé, octobre est arrivé, l'automne aussi d'ailleurs et je la voyais de moins en moins, je pouvais l'apercevoir dans la rue etc, mais nous ne nous voyions plus comme avant. Certes nous nous envoyions des messages... Mais se voit aurait été plus agréable. En ce moment, elle n'aa pas vraiment le temps parce qu'apparemment, sa mère serait en travaux avec l'aide de son cousin. Mouais... Je préfère croire que c'est vrai, plutôt que de penser qu'elle m'évite. Ce qui de mon côté peut s'avérer être vrai car je la vois peut-être dans le bus mais je ne vais jamais vers elle. Je l'observe de loin. Quand nous nous parlons, nous apprenons à nous connaitre, nous découvrons des facettes de nos caractères, je sais à présent qu'elle est joyeuse, positive, capricieuse et peureuse; pareillement, elle sait de moi que je suis sympas, un peu macho, fier et franc. Mais le problème est là: nous ne nous apprenons que des choses qui nous permettent de savoir qui est l'autre; pas des comment l'autres est devenu ce qu'il est, autrement dit : l'histoire. Je ne sais toujours pas ce qui à pu se passer pour que Noé soit aussi particulière, pour qu'elle soit aussi peureuse...
Enfin, la triste réalité c'est que là, je joue avec ma fourchette sans manger, en réfléchissant à ce que je pourrais bien faire pour changer la donne.
- Tu mange pas?, me demande Greg.
- Pas faim...
- Ouais je comprend... Ça fait combien de temps que tu l'a pas vue?
- Qui te dit que c'est à cause d'elle?
- Un homme qui refuse de manger, on voit ça que dans un seul cas: quand il pense à une fille.
- Tu te trompes, je pense pas à elle comme tu pense savoir.
- Evidement... Mais t'es tellement occupé que t'as même pas remarqué qu'elle mange au restaurant juste en face.
Je jette un coup d'oeil: elle est là! Avec Lizzie mais elle est là!
- Alors?
- C'est elle...
- Oui mais tu vas pas la retrouver?
- Elle est avec sa copine.
- Et alors? Elle va partir dans quelques minutes est tu auras foutu en l'air l'occasion d'aller lui parler.
- Je devrais y aller?
- C'est ce que je pense, me dit-il.
- Tu est un ami sage...
- Je fais de mon mieux.
- Je vais t'écouter, fais-je en me levant.
Je me précipite dans mon bureau pour attraper mon manteau et file. Quand je suis en bas je cours mais il faut croire que ce n'est pas suffisant: la table est vide. Je me retourne vers la cafétéria où Greg m'observe et lève les mains vers le ciel l'air de dire " et voilà...".
- Seth?
Je me retourne et voici, Lizzie me fait face, l'air dubitative.
- Ah Lizzie... Noé n'est...
- Elle vient de partir, sa pause prend fin dans quelques minutes.
- Je vois. Bon bah...
Je lui fait un signe de la main mais elle me retient par le bras.
- Attend!
- Quoi?
- C'est elle que tu voulait voir, non?
- Oui, c'est évident non?
- Tu aurait aussi pu vouloir me parler, me dit-elle avec un grand sourire qui veut tout dire.
Sur le moment je me fige vraiment interpellé par ses propos: c'est vrai que la pauvre ignore la nature de ma relation avec les filles... Mieux vaut ne rien lui dire et la laisser croire que cela pourrait être une possible un jour.
- Ouais, sauf que c'est pas le cas, lui dis-je en douceur (accompagné d'un sourire mesdames: je suis un gentil connard.)
- Je vois... Tu fait quelque chose ce week-end?
Eh merde.
Elle veut m'inviter à sortir avec elle, j'aurais dû être un connard tout court. Mon visage trahit alors mes pensées et mon sourire s'efface abruptement.
- N-non mais, ce week-en c'est compliqué, je dois...
- Ça sera l'anniversaire de Noélanie, me coupe-t'elle.
Tous mes muscles se relaxent soudainement tandis que je vois son nerf se contracter au niveau de sa tempe. Oups.
- Euh... Je... Je suis désolé, je pensais que...
- ... Que je te demandais de sortir avec moi, ouais. C'est pas grave... Mais c'est pas faux non plus.
- Ah, lâché-je en me dégageant de l'étreinte de sa main.
- C'est drôle comment t'as réagit au quart de tour quand j'ai parlé d'elle: t'en pince pour elle?, me fait-elle en riant.
- Non, c'est mon amie donc c'est normal que je réagisse quand il s'agit d'elle.
- Logique, fait-elle pas du tout convaincue par mon argument. Enfin: je fais un anniversaire surprise samedi soir...
J'arque mes sourcils pour lui faire comprendre que je ne vois pas où elle veut en venir.
- Tu le fait exprès ou quoi? J'aimerais que tu viennes, comme t'es un ami plutôt proche...
- "Proche"?
- Tu ne savait pas? T'es pas si proche que ça en fait, sinon tu saurait qu'elle traine pas avec une masse de gens...
- Okay...
- Bon: samedi 18 heure sans fautes, m'ordonne-t'elle.
- Faut un cadeau?
- Bah d'après toi?
- Ouais, c'est stupide comme question... Mais elle aime quoi?
- Bah les livres, les choses qui sentent bon, les robes, la bouffe... Tout quoi. Ah! Tout sauf: le maquillage.
Je relève la tête pour signifier que j'ai compris.
- Je vois... Bah merci.
Elle se retourne en oubliant un détail et commence à partir.
- Euh, hum, Lizzie?
- Oui?, me demande-t'elle en se retournant.
- Ça se passe où?
- Ah! Oui! Euh, he te l'envoie tout de suite par sms. Ce sera chez elle.
J'opine du chef et la laisse partir. À peine ai-je traversé la rue que je reçoit un sms.
« 2 rue des palmiers. Étage 8. Porte 97. À samedi 19 Octobre .»
Très bien. C'est qu'elle habite pas la porte d'à côté la nana... Je comprend alors le fait qu'elle puisse venir en vélo. La rue des palmiers se trouve dans un quartier historique, mais pas forcément entretenu à certains endroits. J'ai hâte de voir.
J'ai hâte mais j'ai maintenant un gros problème: le cadeau.
Je rentre au bureau sans faire attention à qui que se soit, et tandis que je gribouille, je ne peux m'empêcher de me torturer l'esprit quand à ce que je devrais lui prendre.
Si je lui prend une robe, ça fera trop formel, trop personnel; bref, c'est une idée à bannir.
Si je lui prend de la nourriture, ce qui signifie chocolat en langage féminin, ça fait très banal, pas assez soigné... Comme si j'en avait absolument rien à foutre, non vraiment la bouffe est vraiment pas le meilleur moyen pour moi de lui montrer que... Que... C'est une amie importante. Les odeurs, autrement dit "le parfum" en langage féminin: je connais pas ses goûts, c'est mort avant même que je puisse envisager cette solution. Il ne me reste rien.
Soudain mon crayon glisse de travers et trace un mauvais trait. D'un visage stoïque je le gribouille et déchire la feuille en jetant mon crayon au loin sur mon plan de travail. Ce projet de nouvelle affiche pour ce cinéma me saoul. Au début j'étais enthousiaste, et là j'en ai marre. Je pense que je vais le refiler à Greg: il se tourne pas mal les pouces en ce moment.
Je me lève, attrapant un masse de papiers et cours dans son bureau; il n'est pas là donc je lui laisse aussi un post-il lui expliquant tout.
J'ai trop de travail: en fait, si je vous explique, dans la boite où je suis, on reçoit des demandes venant de clients appartenants à différents mondes ( mode, mobilier, etc...) et très souvent mon chef me met les gros projets sur le dos... Le problème, c'est qu'on à plus de gros projets que de petits, ce qui fait que je peux très bien me retrouver avec trois enveloppe (projets) pour le mois. Greg aussi travail, c'est un bon, mais il produit moins. Il préfère travailler chez lui et produire bien.
Tout mon contraire, je suis un bourreau du travail et je ne m'en suis jamais plaint... Jusque maintenant.
J'attrape dans mon porte courrier une nouvelle enveloppe grise: hop, nouveau projet. Je me laisse tomber sur mon canapé et l'ouvre en étalants les papiers sur la table. Date limite: 27 Octobre.
Ouais, j'aurais largement le temps d'aller trainer dans les magasins pour trouver un cadeau à miss "j'ai pas d'amis".
Alors... Je lis les papiers... Les demandeurs adorent parler pour parler (dans ce qu'ils écrivent). Tout ça pour un flacon de parfum... «floral, féminin, frai et gracile» sont les mots clés que je dois représenter lors de ma conception. Ouais... Un échantillon est joint. Je l'ouvre et renifle tel un chien... Je me demande si Noélanie aimerait un tel parfum... L'odeur fait penser à une brise légère, qui transporterait l'odeur douce de fleurs...
Ouais... Bah je sens que je suis bien parti pour prendre rendez-vous avec le client là. Je m'installe à mon plan de travail et griffonne quelques idées... Je persiste bien déterminé à trouver du premier coup et au bout de quelques heures: me voilà en train de téléphoner au client. Ouais je suis pas très déterminé, hein?
La journée finie je fuit, passa t devant le bureau de Greg de manière furtive. Ce dernier qua d il me voit passer m'interpelle mais je l'ignore et sort en coup de vent. C'est plus fort que moi: je dois me rendre dans des magasins pour trouver ce foutu cadeau.
Les vitrines des magasins en disent normalement long sur ce qu'elles contiennent; moi, je passe devant et franchement, j'ai l'impression de toujours faire face à la même vitrine. Vers 21 heure, il se met à pleuvoir et je rentre exaspéré et trempé. Je balance mes chaussures n'importe où laisse mon manteau tomber par terre avec mon sac. Demain c'est jeudi: j'ai rendez-vous pour le projet, il ne me reste que vendredi pour le cadeau... Je suis officiellement débordé. Bref, je m'endors épuisé sur mon canapé, face à la télé, pourtant je n'ai rien fait de particulier.
Jeudi 8h00
Salutations d'un gars qui à clairement mal dormit et qui s'est levé à la bourre. Je débarque au lieu de rendez-vous un café en main et la chemise mal rentrée dans mon jeans: les converses déchirées sont de la partie.
Une blonde "cliché" en robe rouge m'arrête à l'accueil ce qui m'exaspère déjà et je soupire sans le cacher. Cette nana à la dégaine de Barbie me fait littéralement chier, de par son genre et son esthétique "soi-disant" parfaite.
- Excusez-moi, monsieur: vous avez rendez-vous?, me demande-t'elle d'une voix doucereuse.
- Ouais, Howards Seth. 9h30.
- Oui! Vous avez légèrement de l'avance.
- Même carrément en avance.
- Huhum, tousse-t'elle délicatement. Venez je vais vous conduire à la salle d'attente.
Elle attrape sa tablette et avance en roulant du cul dans sa robe rouge. Je lui reconnais un beau corps et fixe sans me dire que je pourrais être cramé. Arrivés devant un ascenseur elle se retourne vers moi et mes yeux remontent directement sur son visage. Elle m'a cramée, je le sais, elle sait que je le sais et me sourit en laissant apparaitre ses dents derrière sa bouche rouge.
Je lui fait un sourire express et passe ma main dans mes cheveux pour ne pas à la regarder. J'arrive à la supporter... Mais uniquement quand elle se tait. Enfin, nous arrivons à un étage où elle me conduit et me laisse entrer dans une salle où une grande et longue table de verre teinté me présente des paniers de viennoiseries, de petites bouchées sucrées et un plateau de thés.
- Installez-vous, servez-vous: madame arrivera bientôt. N'hésitez pas à venir me voir si vous avez un quelconque problème.
- Ouais.
J'attend qu'elle parte pour attaquer les sucreries. En voyant le thé, je pense soudainement à mon amie et jette mon café pour le remplacer par du thé. Je vais essayer sa méthode. Je regarde alors la ville se lever à travers les grandes vitres... C'est drôle... Pour une fois, je trouve ça relaxant.
Puis, au bout d'un moment, la blonde re-débarque avec une dame d'âge mûr.
Je me lève et elle me fait signe de rester assise. Je lui désobéit et cours lui serrer la main. Elle n'est pas maquillée ou du moins très peu. Elle porte un jeans et un chemisier p'en dessous d'une veste noire.
- Monsieur Howards.
- Madame...
- Appellez-moi Ariane.
- Très bien...
- Alors monsieur Howards? Pourquoi avoir prit rendez-vous ?
- J'aimerais savoir ce que vous attendez de mon projet.
Elle me regarde l'air ébahie.
- Mais je n'en sais rien. Si j'en avais une idée mon cher: je l'aurais moi-même fait.
- Oui mais j'ai pas envie de faire quelque chose qui ne vous plaira pas...
- Peu importe si cela me plait, c'est la dernière chose à laquelle nous pensons: il faut que ce flacon soit aimé des femmes.
- Ouais...
Gros problème... Moi et les femmes c'est pas encore le grand amour... Face à mon silence la vieille (façon de parler) semble intriguée.
- N'avez vous pas de muse?
- Non... Je fait tout comme ça.
- N'avez vous jamais aimé?
- Ça remonte à loin...
- Mon cher, je dirais que la source de votre problème est là: vous n'avez pas de muse féminine.
- Surement.
- Que pensez-vous de Jessica?
- C'est qui?, fais-je vulgairement.
- La jeune blonde en rouge, ma secrétaire.
- Bah c'est pas franchement mon genre.
- Elle est jolie non?
Je lâche un rire, amèrement amusé.
- Est-ce que vous essayeriez de me caser?
- Non, mais j'essaye de vous orienter vers quelque chose, répond-t'elle en souriant.
Je vois... Elle m'oriente vers sa secrétaire... Comme ça, pour rien.
...
Elle se fout de moi?
- À-t'on terminé?
- Je crois. Je vous enverrais le tout dans pas longtemps.
- Très bien. Jessica va vous raccompagner. Jessica!
La blonde ouvre la porte tout sourire et me fixe. Je la regarde avant de saluer ma cliente puis rejoint la poupée. Elle me cuisine immédiatement après que j'ai fermé la porte.
- Comment ça s'est passé?
- Bien. Votre patronne à le don pour régler les problèmes vite fait.
- C'est sûr... C'est un femme entreprenante. Vous êtes accompagné?
Sa question est trop directe et me fait écarquiller les yeux.
- Nan, je dis sèchement.
- C'est sûr qu'en étant aussi agréable...
- Je tiens pas à en avoir une...
- Pourtant je suis sûre qu'au fond vous êtes un type génial.
- J'en sais rien.
- Ça vois dit d'aller boire quelque chose?
Je la regarde un peu dérangé par sa proposition mais je n'ai pas envie de la blesser.
- Vite fait... Pourquoi pas?
- Très bien, me fait-elle tout sourire. Attendez-moi dans le hall: j'arriverais.
Elle parle bizarrement... Enfin je m'exécute et la voit débarquer avec un manteau noir et un foulard noué autour du cou. Le type même de l'hôtesse de l'air, je sens qu'on va me la jouer à l'envers: ce projet sent le mariage arrangé à plein nez, j'vais me retrouver défoncé avant même d'avoir pu dire quelque chose.
Elle me prend le bras, ce qui à le don de me stresser encore plus et elle m'emmène dans un salon de thé. "Original, moi qui vient de boire du thé!", me dis-je.
Nous arrivons dans un salon de thé chic. Rien qu'en entrant dedans: je fais tâche. C'est un salon donc les nappes son impeccablement blanches, les chaises; sculptées et dorées à la main, des vases de roses à chaque tables: c'est un salon de bourges'.
Je m'installe pas très à l'aise et nous commandons... Du thé. Elle, prend une part de flan et je me contente d'un thé.
Pendant tout le temps où nous sommes ensemble, elle ne cesse de me poser des questions sur moi, parfois des questions personnelles. Quand soudain j'ai une idée.
- Excusez-moi de vous couper Jessica, mais j'ai un problème.
- Ah oui? Expliquez-moi...
- Je dois aller à un anniversaire ce week-end et je ne sais pas quoi offrir à mon amie.
- C'est une fille.
J'opine du chef comme un enfant qui écoute attentivement les consignes que ses parents lui donnent.
- Hum, vous savez ce qu'elle aime?
- Les bonnes odeurs, les robes, la nourriture et les livres.
- Eh bien! Voilà une fille bien étrange! Et vous vous voulez lui offrir quoi?
- Aucun de ces trucs.
- C'est de plus en plus compliqué...
- Vous pourriez peut-être m'accompagner?
- Vous accompagner... Acheter le cadeau? Pourquoi pas?
- Très bien, fais-je soulagé. Demain vers 16 heures: ça ira?
- Oui! Retrouvons-nous devant le centre commercial des prés dorés.
Je lui souris et boit mon thé de façon totalement différente. C'est un poids qui s'enlève d'au dessus mes épaules, pourquoi n'y avais-je pas pensé plus tôt? Si je vais prendre un cadeau pour une fille: autant y aller avec une fille! Aucunes chances de me tromper! À la fin de notre "tea time", je la quitte en la remerciant de son aide; elle se contente de me sourire en me disant que si ça avait été pour elle, une autre fille m'airait aidée. Sur le coup, je n'ai pas trop compris et je n'ai pas fait attention. Je suis rentré au bureau comme un idiot complet, satisfait de moi-même... Sans même comprendre ce qui semblait être gros et évident.

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