Autour de la forteresse, c'était la débandade parmi les samouraïs. Ils avaient eux aussi aperçu le dieu et paraissaient terrifiés. Sans s'occuper de leurs feus qui brûlaient encore, certains couraient (ou glissaient) dans la direction opposée au titan, d'autre le pointaient de doigt, d'autre encore se hâtaient de rassembler les objets précieux. Bientôt, il furent tous en train de s'enfuir précipitamment de leurs camps en poussant des cris. Le dieu s'était lentement mis debout et surplombait maintenant la vallée de quatre cent bon mètres de hauteur. Mais ce n'était pas seulement lui qui avait causé l'état de folie des guerriers d'Asano. En effet, l'immense flaque sombre avançait incroyablement vite et était déjà arrivé sur le versant accolant les forges, là ou se tenaient les samouraïs. Ces derniers n'avaient pas eu besoin de le tester pour se rendre compte que cet assaillant était dangereux voire mortel et ils fuyaient tous devant les énormes vagues noires qui arrivaient droit sur eux et s'étaient déjà répandus sur toute les collines environnantes. Emportant tout sur son passage, le fléau glissait vers le fond de la vallée, entraînant une panique générale. Au milieu des aboiements des chiens, des hennissement des chevaux les humains étaient affolés et criaient à qui mieux mieux.
Dans les forges aussi l'agitation se faisait sentir. Les remparts de bois étaient solides mais chacun doutait qu'ils puissent résister à un assaut aussi terrible que celui des vagues noires. Malgré tout, ils se sentaient capables d'y résister. Toki s'était levée d'un bond et s'était élancée en avant sur le chemin de ronde, suivie par Kohroku qui avait du mal à comprendre ce qu'il se passait.
- Tous à vos postes, dépêchez-vous vite ! cria t-elle pour réveiller les villageois qui ne quittaient pas le titan des yeux.
La jeune femme se précipita vers un groupe de forgeronnes qui se tenaient sur le rempart en face du versant.
« - Il se dirige droit vers nous ! s'écria l'une tandis que Toki réfléchissait à toute vitesse en observant la masse sombre qui dévalait la pente.
- Fuyons, Toki ! gémit Kohroku. »
Le géant bleu et translucide marchait lentement sur eux au sommet de la colline, ses longs bras se balançant au rythme de ses foulées.
- ... Non ! protesta la jeune fille d 'une voix énergique. Nous devons protéger les forges. On a fait une promesse à Dame Eboshi.
Les premières langues noires atteignaient déjà l'eau de lac sans toutefois y pénétrer. Sur la berge grise, se détachaient clairement deux points blancs qui avançait vers les forges. Plusieurs vagues sombres descendaient vers eux. Elles étaient plus rapides, et ils risquaient à tout moment d'être avalés par l'une d'elle. Ils en réchappaient à chaque fois de justesse, les masses de matière s'écrasant juste derrière eux, les effleurant presque. C'était les deux louveteaux !
- Regardez là bas ! constata joyeusement Toki en passant sa tête entre deux rondins de bois. Ashitaka est revenu !
Aussitôt toute les têtes surprises de ses compagnons Kohroku compris, émergèrent du haut des remparts. En effet c'était bien le jeune homme qui se tenait sur un des loups. San était juchée sur l'autre animal blanc. Arrivant devant le groupe des forgerons ébahis qui s'étaient amassés derrière les remparts, le prince sauta à terre et se tourna vers les forges tandis que les deux loups et la jeune fille l'attendaient quelques mètres plus loin.
- Fuyez tous, quittez le fort ! cria t-il d'une voix pressante. La tête du dieu Cerf a été coupée et il revient pour la reprendre ! Si cette chose vous touche, vous êtes morts ! Courez au lac ! L'eau ralentira sa course !
Il faisait allusion à la substance noire et brune qui dévalait la pente vers eux. A la hauteur des rondins de bois, les villageois -des femmes pour la plupart - l'écoutaient attentivement.
- Dame Eboshi et les arquebusiers reviennent par l'autre rive ! reprit-il tandis que certaines jeunes forgeronnes jetaient des regards inquiets aux vagues sombres. Je vais faire tout mon possible pour rendre sa tête au dieu Cerf !
Derrière lui, les premières langues brunes arrivaient déjà sur le sol plat. Elles s'écrasèrent sur le sable avant de continuer leur course tandis que San et les deux loups commençait à courir.
- Dépêchez vous !
- Ashitaka !! cria la princesse.
Le jeune homme se hâta de repartir vers les louveteaux, laissant les villageois dans la forteresse. Des cris retentirent bientôt sur les rempart de celle ci.
- Quelle horreur !
- Fuyons !
- Vous avez entendu ce qu'il a dit ?!
- Toki, que faisons nous ?!?
Le jeune fille regarda Ashitaka échapper de justesse aux vagues et serra les dents.
- Pas de panique les filles ! cria t-elle en se tournant vers les autres. Faisons exactement ce qu'il a dit ! Tous au lac ! Emmenez les blessés et les malades, restez calme !
Aussitôt, les forgerons et forgeronnes se précipitèrent vers le bas pour se diriger vers la porte de sortie, certains portant leur camarades sur leur dos tandis que Toki vérifiait que personne ne restait en arrière. Les énormes langues noire vinrent bientôt se couler entre les piques qui garnissaient le bas des remparts. Elles commencèrent à grimper et monter sur le mur de bois. Elles ne forçaient pas l'obstacle, elles le contournaient ce qui leur permettait d'acquérir une vitesse incroyable. La panique s'empara des nombreux villageois qui restaient encore à l'intérieur. Certains couraient au hasard dans les rues, affolés, ne sachant plus où se trouvait la porte. D'autres essayaient de se saisir de leur affaires les plus précieuses, la plupart se précipitaient vers l'extérieur, armés de lances. Au milieu du vacarme de cris à la sortie, Toki essayait d'arrêter les forgerons qui, affolés empruntaient le pont et fuyait dans la mauvaise direction au lieu de descendre vers la rive du lac.
- Non, pas par là non !!
Ils couraient à leur perte, allant droit à la rencontre des vagues noires au lieu de leur échapper. En dépit de ses efforts, la jeune femme n'eut finalement que le temps de plonger sur le côté pour éviter la masse sombre qui sortait à toute vitesse des forges par la porte. A l'intérieur, c'était la catastrophe. Les impressionnantes langues grises se hissaient, grimpaient, se faufilaient, encombraient les rues et les toits des maisons. Certaines d'entre elles montèrent au sommet du plus grand toit (celui ou demeurait le feu des forges). Elle atteignirent le haut et commencèrent à redescendre de l'autre côté, se glissant dans les interstices du bâtiment. Assailli par la substance, celui ci se mit à fumer...
Dans le lac, les villageois progressaient pour gagner le centre de l'étendue d'eau, s'entraidant et soutenant les plus démunis. Suivi par Toki qui portait un blessé, Kohroku se retourna, hagard.
- Oh... fit-il. Le toit, regardez...
Quelques uns se retournèrent également. Là haut, le haut de l'immense et fier toit de la forteresse brûlait d'un feu rouge et orangé. La partie du milieu s'embrasa bientôt. Une épaisse fumée pourpre se dégageait du bâtiment et montait vers le ciel tandis que les vagues brunes coulaient le long des remparts de bois. Éperdus, les forgerons contemplaient leurs habitats tout ce qu'ils possédaient être détruit, immobiles.
- C'est fichu maintenant, déclara Kohroku d'une voix tremblante. Les forges flambent. Nous avons tout perdu, c'est la fin...
Furieuse, Toki se retourna et le défia du regard.
- Tais-toi, imbécile ! cracha t-elle. Tant qu'il y a de la vie il y a de l'espoir allez, en avant !
Sur ces mots elle se remit en marche tandis que l'homme la suivait des yeux, surpris.
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Princesse Mononoke - Le livre
FantasyL'histoire retranscrite en livre du jeune Ashitaka et de la princesse des esprits dans le Japon ancien...