chapitre 4

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- Comment ça, tu n'as jamais finis la dernière saison de Game of Thrones ? s'étonna-t-il en me regardant avec des grands yeux comme si c'était une tare.

- A partir du moment où ils ont tués mon personnage préféré, ça ne m'a plus intéressé, expliquai-je en haussant les épaules.

- T'es bien une fille toi, maugréa-t-il un prenant un air dépité.

Je fus un peu vexée par ses paroles, et je fis la moue, mais cela ne parut pas l'intéresser. Au contraire, il semblait se moquer de moi, chose qui me motiva bien à prendre ma revanche.

- C'est qui ton personnage préféré ? demandai-je faussement intéressée.

- Tyrion, pourquoi ? fit-il dubitatif.

- J'ai lu les livres. Il meurt, décrétai-je alors d'un ton tout à fait sérieux.

Je bluffais. Je bluffais totalement. Et je savais d'ailleurs, vu l'expression que son visage avait pris et le fait qu'il se soit arrêté en plein milieu de la ballade alors que nous marchions tranquillement, que je risquai ma vie en sortant ce genre de bombe, mais, à la vue de ses yeux écarquillés et de sa bouche grande ouverte, je ne le regrettai pas. Je tentai, comme je le pouvais de rester sérieuse, histoire de laisser le doute planer sur mon mensonge, auquel il semblait d'ailleurs croire.
Nous avions quittés le stade de rue, une vingtaine de minute plus tôt, quand le soleil avait réellement commencé à se coucher et que la visibilité était devenue trop catastrophique. Si ce jeu était clairement désavantageux pour moi, il m'avait au moins permis d'apprendre que le jeune homme était arrivé à Los Angeles deux semaines avant moi, avec cinq de ses meilleurs amis pour passer des vacances pour lesquelles ils avaient économiser pendant presque deux ans. Il habitait dans le quinzième arrondissement, et était barman - chose assez étonnante pour quelqu'un qui ne touchait pas plus à l'alcool qu'aux cigarettes. Il avait deux petites sœurs, et avait arrêté ses études après le lycée. Finalement ce jeu n'était pas si nul en lui même puisqu'il m'avait au moins appris que ce n'était probablement pas un tueur en série - bien que je me méfiais toujours un peu.

- Ne me regarde pas comme ça, me plaignis tandis qu'il recommençait à marcher à mes côtés, ses yeux noirs posés sur moi. Tu n'avais qu'à pas me comparer aux autres filles, c'est vexant.

Il leva les yeux au ciel et notre conversation repartir en chamaillerie tandis que nous nous baladions sur le bord de plage. Le soleil avait presque totalement disparu à l'horizon, et les lampadaires longeant la ballade nous évitaient de nous retrouver dans l'obscurité totale de la nuit. Une question que j'avais alors oublié lors de notre petit jeu sur le terrain de basket me revint en tête, et elle tombait bien puisque depuis quelques secondes, nous étions tous les deux silencieux.

- Dis moi, commençai-je.

- Hm ?

- Pourquoi Sneazzy ?

- Pourquoi pas ? répliqua-t-il du tac au tac  avant de reprendre en me voyant lever les yeux au ciel. Je sais pas. On s'était tous donné des surnoms dans ma bande quand on avait douze ou treize ans. Le mien est resté, c'est tout. Tu demanderas à mes potes quand tu les rencontreras.

- Parce que je vais les rencontrer en plus ? m'étonnai-je, un sourcil haussé, me demandant s'il était vraiment sérieux. Je croyais que notre marché ne tenait que pour ton pari et pour que ta réputation soit sauvée.

- N'essaie pas de m'arnaquer, je n'ai pas oublié que tu as ma casquette, me rappela-t-il.

Par réflexe, je levai les yeux au ciel. Quelle abrutie. Pourquoi avait-il fallut que j'oublie cette foutue casquette ? Ce n'était pas que je ne voulais pas le revoir. Au contraire, je le trouvais même cool, et, si je devais être honnête avec moi même, il était loin d'être repoussant. Au moment où cette pensée traversa mon esprit, je ne pus m'empêcher de tourner mon visage vers lui. Il regardait droit devant lui, ses cheveux noirs ébouriffés, ses joues légèrement creusées et son air interrogateur sur le visage. Derrière lui, on pouvait voir le soleil se coucher, et cette image avait presque quelque chose de magique. Merde. Qu'est ce que j'aurais aimé avoir mon appareil photo à ce moment précis, pour immortaliser ce moment qui risquait de s'enfuir à tout jamais. Pourtant, je n'avais que mes yeux pour le faire, et j'espérais sincèrement que cette si jolie image du profil du visage d'un jeune homme que je ne connaissais pas une semaine plus tôt, devant un couché de soleil, resterait gravé en moi à jamais. J'avais appris à la mort de mon père qu'il était impossible d'immortaliser, que ce soit à l'aide d'un appareil photo, ou bien simplement de nos, tous les moments que l'on voudrait se remémorer. Certains finiraient par tomber aux oubliettes, alors le plus important, c'était de les vivre à fond. Je n'en avais peut-être pas conscience à l'instant précis, mais le moment que je vivais était l'un de ceux-là.

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