Mon premier réflexe une fois que j'eus récupéré mon énorme valise sur le tapis roulant, là où tout le monde s'était pressé autour de moi, ce fût de sortir mon téléphone, dans l'espoir que j'y retrouve un message de ma mère m'indiquant à peu près l'endroit où elle m'attendait. C'était d'ailleurs un peu compliqué de faire rouler ma valise sans bousculer tout le monde, et je pus enfin souffler quand je fus sortie de l'attroupement qui s'était créé autour de moi. Quand ma mère m'annonça qu'elle m'attendait à l'entrée de l'aéroport, je fis une petite grimace.
- Ne t'aventures pas trop loin, on ne sait jamais, grommelai-je de mauvaise humeur.
J'avais dormi une grande partie du voyage, et j'étais très désagréable au réveil. L'homme assis à côté de moi avait passé son temps à ronfler, me réveillant ainsi toutes les dix minutes à cause du boucan qu'il faisait. De plus, il était onze heures du matin et je mourrais littéralement de faim. Toutes les conditions étaient présentes pour que je sois de mauvais poil pour une bonne partie de la journée.
Je n'eus aucun mal à reconnaître ma mère dans le hall. Ses cheveux blonds tirés en arrière dans un chignon à quatre épingle, vêtements assez stricts coûtant probablement le loyer de certains, ses yeux froids rivés sur son téléphone. Je fus étonnée, qu'au moment où elle daigna lever les yeux, un grand sourire - je n'arrivais pas à déterminer s'il était vrai ou pas - s'afficha sur son visage. Pour l'occasion, elle me prit même dans ses bras, et je ne pus m'empêcher de me figer. Ce geste, j'étais à peu près persuadé qu'elle ne l'avait pas reproduit avec moi depuis la mort de mon père. Que lui arrivait-elle ?- Alors ? me demanda-t-elle en souriant. Racontes-moi tout, je veux tout savoir de ton été !
D'accord. Si cet élan d'affection était de base assez étrange, le fait qu'elle soit aussi enthousiaste était carrément bizarre. Pendant une fraction de seconde, j'hésitai même à me pincer pour être sûre que je ne rêvais pas. Je me demandais presque si elle n'était pas sur le point de me faire une nouvelle crise, tant je trouvais cette situation anormale. Pendant quelques secondes, je restais silencieuse, m'attendant à ce qu'elle s'énerve, où bien à ce que tout à coup, elle fonde en larmes. C'était souvent comme ça que cela se passait. Pourtant, là, rien n'arriva. Je finis donc par lui répondre en haussant les épaules, résumant dans les très grandes lignes mon été chez Chiara - qui me manquait déjà - sans grand entrain.
Quand nous sortîmes du bâtiment, je ne pus m'empêcher de frisonner. Pendant le temps d'un été, j'avais oublié la sensation de froid. J'en avais presque oublié la grisaille parisienne. Je regrettai amèrement de ne pas avoir prévu une veste pour ma sortie de l'avion, puisque dans la bruine qu'il faisait ici, j'avais l'air d'une vraie tâche avec mon short et mon débardeur. Même une fois dans la voiture, je n'arrivais pas à être totalement à l'aise. Quelque chose clochait et je savais très bien que cela avait un rapport avec l'attitude de ma mère. Pendant une bonne quinzaine de minutes, elle ne cessa de me poser des questions, et, même si celles-ci n'étaient pas très originales, c'était déjà un effort surdimensionné venant d'elle. Peut être même que ça l'était trop pour être vrai. Le seul avantage que j'eus trouvé face à cette nouvelle gentillesse, fût qu'elle accepta de passer rapidement dans un drive, après que je lui ai fais comprendre que je mourrais littéralement de faim. Dès que nous fûmes arrivées et que la voiture fût garée, je restai quelques secondes silencieuse tout en regardant l'immeuble dans lequel je vivais. Je n'avais pas de quoi me plaindre. Je vivais dans un quartier assez cool, et j'avais une famille assez aisée pour pouvoir se payer un immense appartement avec mezzanine. Pour être honnête, ce n'était pas le lieu en lui même qui me gênait, mais le fait d'être là, tout simplement. Ce fût peut être à cet instant précis que je compris que mes vacances étaient définitivement terminées, et cela me mit un énorme coup de blues, même si je tentais de ne pas le montrer.
En arrivant par l'ascenseur dans notre appartement, je fus perplexe. Ma mère, au début de l'été, s'était décidée à faire de nouveaux travaux dans notre appartement pour rénover les pièces communes. Or, à part le fait que les murs semblaient un peu plus sombres, que les meubles avaient l'air un peu plus neufs, et que le salon empestait la peinture , je ne voyais pas beaucoup de différences. Moi qui ne savait pas mentir, j'apprehendai même le moment où elle allait me demander ce que j'en pensais. Fort heureusement, elle n'en eût pas le temps puisque son téléphone sonna, l'obligeant à répondre.
Soulagée d'être un peu seule, j'attrapai ma valise et le sac en papier contenant mon repas, et je longeai l'immense couloir pour rejoindre ma chambre. Quand j'entrai dans celle-ci, je restai sur le pas de la porte quelques secondes. Je devais bien admettre que cette pièce, avec ses murs bordeaux, son parquet sombre, et son nombre incalculable de photos accrochées aux murs et des tas de livres empilés dans plusieurs coins parce qu'ils ne rentraient plus depuis belle lurette dans ma bibliothèque, m'avait manqué. Je me faufilais à l'intérieur, en prenant bien soin de refermer la porte derrière moi, puis, retrouvant les bonnes vieilles habitudes, je m'étalais de tout mon long sur mon lit en soupirant. Je n'eus le temps de fixer le plafond que quelques secondes avant que mon téléphone ne se mette à vibrer. Je l'attrapais dans ma poche, et je fus surprise de voir que c'était un message d'Antoine, me demandant si j'étais belle et bien arrivée. Je lui répondis par l'affirmative, et je pris même le temps de dire à June et à Sneaz que j'étais enfin rentrée. J'avais échangé quelques messages avec ce dernier lors de mes dernières journées en Californie, mais rien de très important. Il me répondit presque en même temps que ma cousine qui me proposait de passer cet après midi.
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All of the Stars
FanfictionNora, une jeune femme de dix-neuf ans, passionnée par les livres et la poésie, ne s'est jamais remise du décès de son père. Quand elle débarque chez sa sœur pour prendre des vacances loin de son quotidien parisien, elle ne sait pas encore qu'elle va...