Chapitre 7 - Etape 1

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Lior ouvrit la porte et, à ma grande déception, je pu constater que derrière celle ci, ne se trouvait que des dizaines d'autres tunnels. C'était un dédale sans fin, dans lequel nous allions devoir apprendre à nous repérer. Lior nous expliqua que ceux ci avaient été créés, il y a longtemps, par les anciens de Dillermo. Leur objectif premier fut de condamner la possibilité d'entrer sur notre territoire, pour ne pas que les hommes sauvages, à l'extérieur, puissent venir détruire tout ce qu'ils avaient su construire. Je comprenais totalement la nécessité d'une telle structure, mais je compris également que si le but était d'empêcher d'entrer dans Dillermo, alors, il serait sans doute tout aussi difficile d'en sortir.

Lior enfonça le clou, en nous expliquant qu'avant de nous rendre à l'extérieur, de longs mois s'écouleraient sans doute. Qu'il nous faudrait être prêt avant toute chose, et que pour se faire, il faudrait savoir tenir la longueur. Je n'étais pas inquiet pour autant, je savais que j'étais exactement là où je devais être. Mais je voyais bien que pour Réro, ce n'était pas aussi évident.

A peine le temps de tenter de rassurer du regard mon ami, que notre formatrice nous remis des enveloppes. Dessus, une mission précise. Notre première épreuve à franchir. Pour l'occasion, nous avions l'obligation de nous mettre en binôme. Tout naturellement, je choisis Réro pour m'accompagner, et laissais les autres s'arranger entre eux. J'y voyais là une occasion de me retrouver seul avec lui, et de pouvoir le préparer mentalement aux rudes épreuves que nous allions traverser, ensemble. Une fois séparés du reste du groupe, nous ouvrîmes notre enveloppe, prêts à découvrir de quoi il en retournait. Je sentais le souffle de Réro, par dessus mon épaule, angoissé à l'idée de s'égarer au fin fond de ces tunnels, tandis qu'en moi, s'animait une impatience d'enfin entrer dans le vif du sujet.

L'objectif était d'atteindre un point A dans ce labyrinthe, afin de récupérer une seconde enveloppe qui nous attendrait sur place. Ne voulant pas perdre de temps, je pris mon sac, j'allumais ma lampe torche, et avançais, en prenant soin de ne pas perdre Réro, en cours de route. Toutes les quelques minutes, des bruits retentissaient, comme si quelque chose se déplaçait, loin de nous. Nous n'arrivions pas à définir d'où cela provenait, mais nous imaginions que des bruits étranges, au fin fond de ces tunnels, ne devaient pas être si étonnant. Alors que l'on avançait, Réro restait muet, ne s'impliquait pas vraiment dans la situation qui devait nous amener à unir nos forces. J'insistai pour qu'il prenne des initiatives, et alors que j'étais convaincu, selon le plan que j'avais sous les yeux, qu'il fallait tourner dans le couloir de droite, Réro pris la parole pour me guider vers la gauche. J'étais presque certain que nous allions nous égarer, mais je voulais le suivre, afin de souligner sa prise de position. Les heures passaient, et nous nous égarions toujours plus loin, sans pour autant trouver le bon lieu. 

Je finissais par ne plus du tout savoir où nous étions, sur ce foutu plan. Réro, quant à lui, estimait qu'il était peut être déjà temps de faire sonner notre balise, afin qu'un rapporteur aguerri vienne à notre secours. Mais j'interceptai l'objet, bien trop envieux de faire mes preuves. Malgré l'agacement évident de mon compagnon d'infortune, je ne pouvais pas baisser les bras si facilement. Je tentais de retrouver mon chemin, traînant mon camarade par le bras, l'obligeant à me suivre aveuglément, sans savoir mieux que lui où j'allais.

Je sentais que Réro s'essoufflait, fatigué de cette longue marche vaine dont il ne comprenait pas le sens, ni le but. De mon côté, je ne doutais en rien de la nécessité de cette épreuve. Se perdre ici me semblait encore la meilleure façon d'apprendre à s'y repérer, et j'imaginais que cette étape de notre formation n'avait pas été mise en place pour rien. Malgré mes certitudes, je rencontrais de plus en plus de difficulté à faire entendre raison à Réro, qui voulait simplement baisser les bras. Au bout d'un moment, il s'arrêta net en plein milieu du chemin. J'insistai pour lui faire comprendre qu'il ne fallait pas faire de pause, mais celui ci ne voulait plus bouger, et finit par s'appuyer le dos contre l'une des parois, bien décidé à ne plus bouger de là pendant une durée indéfinie. Et, alors qu'il était adossé là, inerte, et que je me tuais à trouver des arguments pour lui faire changer d'avis, je vis, derrière lui, une sorte de petit trou. Comme une fenêtre invisible, qui donnait vue sur le tunnel qui se trouvait derrière. Je poussai mon ami qui, sur le moment, pris ça pour une agression afin de le forcer à reprendre la marche, alors qu'il n'en était rien. Mon seul but, à ce moment précis, était de voir au travers de ce petit trou, ce qui se cachait dans l'autre couloir qui me semblait inaccessible.

Je n'y voyais pas grand chose, mais je devinais la présence de nombre de denrées qui auraient pu nous être utiles. Voir tout ceci, sans savoir comment l'atteindre, faisait naître en moi un sentiment de frustration. Et d'autant plus lorsque je vis Réro ne pas réagir à la situation. Une dispute éclata entre nous, probablement la première en 21 ans de vie. Je ne pouvais comprendre, pas plus qu'accepter, son comportement. Ma colère aurait pu durer des heures durant si Réro n'avait pas entendu mes reproches. Alors que je m'attendais à devoir faire preuve d'autorité, sans en avoir la légitimité, mon ami finit par me regarder, et m'accorder le fait d'avoir raison, avant de reprendre la marche. Il évoqua même la possibilité qu'à force de se perdre, nous finirions peut être par se retrouver de l'autre côté, où les ressources semblaient n'avoir jamais été récupérées. Nous reprenions la marche, et avancions, tant bien que mal. C'est alors qu'en changeant de couloir, je vis au bout du chemin, ce qui pouvait bien être notre point A. Pris par l'euphorie, alors que quelques minutes auparavant, nous étions dans l'impasse, nous avons pressés le pas. Toujours en tête de cortège, j'avançai rapidement jusqu'à destination quand soudain, mon pied se pris dans une ficelle tendue, à ras du sol. Ma chute fut plus spectaculaire que douloureuse, mais, en me retournant, je fis le constat de ma solitude. Réro avait comme disparu durant ces quelques secondes. 

DILLERMOOù les histoires vivent. Découvrez maintenant