Etape 14 - Cette nuit là

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J'étais dans mon lit, je sentais le souffle de mes compagnons qui indiquait qu'ils avaient réussi à plonger dans le sommeil. Mais j'avais beau tourner dans tous les sens, changer de position régulièrement, rien ne venait. Mes yeux restaient grands ouverts, sans pour autant voir quoi que ce soit dans cette obscurité. Il fallait que je parle à Réro, que je lui parle réellement, et qu'il me réponde. Je sortais de mon lit discrètement, rampais jusqu'au sien, et tentais de le réveiller silencieusement.

A voix basse, je l'appelais pour le faire revenir à l'état d'éveil. Réro fini par capter le son de ma voix. Bien décidé à ne pas laisser passer cette occasion de profonde solitude entre lui et moi, je le sortais de son lit, et le traînais à l'extérieur du dortoir.

- Où m'emmènes tu Khalek ?

- Tu te souviens du jour où tu as disparu ? Nous avions trouvé un endroit, dans les tunnels, avec un petit trou de par lequel nous avions découvert des cartons qui renfermaient probablement des vivres.

- Oui.

- C'est là que je t'emmène. Il faut que tu vois ce que l'on a découvert en ton absence.

Réro ne me posa pas plus de question. Il me suivait sans un mot, dans le dédale des tunnels, sans même s'inquiéter que je sache m'y repérer ou non. Rapidement, je retrouvais l'endroit où nous nous étions égaré, quelques semaines plus tôt. Je voulais lui montrer le bouton qui permettait d'ouvrir, et de refermer, le petit trou en question.

- Alors, qu'en penses tu ? Lui demandais je !

- Pas grand chose. Les tunnels ont été fait pour voir sans être vu. J'imagine que les anciens qui les ont construit se sont réservés la possibilité d'avoir une visibilité sur tous les lieux qu'ils estimaient importants.

- Et les bruits que l'on entend le jour, et pas la nuit. ça ne te semble pas étrange ?

- Ce sont des vieux tunnels.

- Tu ne vois donc pas ce que je vois ?

- ça dépend. Qu'est ce que tu vois Khalek ?

- Qu'il y a soit des zones qui n'ont jamais été explorées, soit des vivres qui ne sont pas données au peuple. Dans les deux cas, on ne nous dit pas tout.

- Peut être.

- C'est certain Réro. Toi même, tu me dis avoir vu l'extérieur, et tu ne me dis pas ce que tu y as observé.

- C'est difficile d'en parler.

- Pourquoi ?

- Tu n'étais pas là. On ne peut pas partager ça.

- Tu peux toujours essayer de me raconter.

Ma demande semblait lui paraître folle. Et alors que je n'avais pas réfléchit aux conséquences qu'il encourait peut être, en avouant ces choses qu'on lui avait sans doute demandé de taire, je le vis baisser les yeux.

- Le jour de la cérémonie, j'aurais dû m'enfuir. Me chuchotta t il.

- Mais tu ne l'as pas fait à cause de moi, c'est ce que tu essaies de me dire ?

- Non, j'aurais dû le faire, sans toi !

Je sentais les tonnes de regrets qu'il avait sur les épaules, tout en ne comprenant toujours pas ce qu'il avait pu vivre, pour le faire à ce point s'en vouloir de ne pas avoir agit le jour où il y avait pensé. Etais je responsable de son malheur ? Je commençais à le penser sérieusement, et je ne pouvais que me reprocher de n'avoir pas su l'encourager comme il en aurait sans doute eu besoin. Alors, comme pour rattraper mon effroyable attitude, je lui proposais :

- Et si on s'en allait, ce soir, ensemble ?

- Tu es devenu fou ? Me demanda t il.

- Pas plus fou que lorsque tu me l'as proposé.

- Justement. Ce jour là, je n'avais pas conscience de certaines choses. Je vais partir Khalek, oui, je vais le faire. Mais tu ne feras pas ça avec moi.

- Pourquoi ? Parce que le peuple a besoin de nous ? Ils trouveront d'autres personnes. Comme tu l'as dit, on ne finira peut être pas tous les deux notre formation, alors ils peuvent se passer de nous.

- La fatigue te fait dire n'importe quoi. Il faut que tu retournes au dortoir, et que tu me laisses partir.

Je vis Réro reprendre sa route, dans le sens opposé de notre chambre. Je ne pouvais me résoudre à simplement le laisser partir, sans rien faire. Je décidais donc de le suivre, naturellement, pour ne pas l'abandonner. Et malgré le sentiment de me perdre dans les tunnels, sans moyen de nous repérer, je savais que j'étais avec la seule personne en qui j'avais pleinement confiance. Jusqu'à ce qu'il se retourne et me lance :

- Je veux que tu partes.

- Je ne partirai pas. Insistai je.

- Tu le feras !

Réro semblait sûr de lui. Et alors que je tentais toujours de le suivre, je le vis traverser une porte, un peu plus loin. Pendant que je marchais sans énergie, je tentais de le rattraper, tant bien que mal. Avant même que je n'eus le temps de tenter une dernière fois de lui faire comprendre que je n'allais pas le laisser, je vis cette même porte se refermer. Réro était une nouvelle fois séparé de moi, à la différence près qu'il semblait le vouloir cette fois ci. Je cognais de toutes mes forces contre les parois de cette maudite porte, et je l'entendais me conseiller de partir. Ne pouvant pas m'y résoudre, je cherchais un autre chemin pour le rejoindre. 


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