Chapitre 20 • La Bonne Étoile

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Le bruit saccadé de l'imprimante emplit la pièce de façon régulière. Le menton enfouit dans ma paume, je reste rivé sur le morceau de papier qui se libère petit à petit de la machine.

— Est-ce que tu veux que je te ramène ? me demande mon père en saisissant la feuille d'un geste furtif. J'ai une réunion à 18h, mais je passe à la maison avant d'y aller.

Ce n'est pas inhabituel que je l'accompagne à son bureau lorsque mon emploi du temps me le permet. Les vacances sont sur le point de se terminer alors je profite des derniers jours disponibles pour me rendre à la maison d'édition. Il a toujours été flatté que je m'intéresse à la littérature alors c'est dès mon plus jeune âge qu'il m'a fait visiter ses locaux, dans les moindres détails. Après toutes ces années, rien n'a changé ; la peinture blanche ivoire demeure toujours la même, seuls les employés se sont transformés au fil des années. Certains ont décidé de quitter l'entreprise, pour une reconversion professionnelle.

D'autres sont partis à la retraite, aussitôt remplacés par des salariés plus jeunes. Il y a même quelques étudiants qui viennent ici l'été, histoire de se faire un peu d'argent pour payer leurs études. Non, rien n'a changé à part ça. Je pourrais presque affirmer que je connais le plan du bâtiment encore mieux que celui de ma propre maison. Je relève la tête vers mon père, relâche ma main dans le processus.

— Non ce n'est pas la peine, je vais chez Roméo.

Il se retourne pour me faire face après avoir lancé une nouvelle impression.

— Oh, d'accord. (Il s'accoude à l'imprimante.) Tu sais, il peut venir à la maison aussi. Ta mère et moi n'avons pas encore eu l'occasion de faire sa connaissance.

— Je sais, je réponds simplement. Mais ça fait seulement une nuit qu'il est rentré de l'hôpital, alors, je pense que c'est plus prudent qu'il reste chez lui pour le moment.

— Bien sûr.

Mon père finit par attraper la dernière feuille avant de mettre l'imprimante en veille et d'attraper ses affaires. Je fais de même, enfile ma doudoune en velours côtelé et retrace mon chemin jusqu'au hall d'entrée.

— On se dit à demain dans ce cas ? m'interroge-t-il en déverrouillant sa voiture. Préviens-moi lorsque tu rentres à la maison.

Il dépose un chaste baiser sur mon front, puis s'enfonce dans le siège conducteur du véhicule et disparaît à travers la circulation dense de Belleville.

"Le Verseau est le signe le plus indépendant du zodiaque, il aspire à se détacher de son milieu et des principes qui lui ont été inculqués pour planter ses propres racines, créer ses valeurs et affirmer sa liberté de penser et d'agir. Original, non conformiste, il est capable de s'adapter à toutes sortes de situations."

Roméo se redresse, il attrape un chips dans le paquet en face de lui avant de s'avachir à nouveau contre le côté du lit. Ses yeux parcourent les lignes du magazine astrologique.

— C'est plutôt juste, je trouve.

— Si tu le dis.

Il lève les yeux vers moi, referme le magazine. Je lui offre un léger sourire tandis qu'il saisit une nouvelle chips.

— Je le dis, je confirme. Tu es Verseau, ça signifie que c'est bientôt ton anniversaire.

— En effet.

— Je vais t'organiser une fête surprise.

— Roméo, si tu me le dis, ce n'est plus une surprise.

— Je ne t'ai pas dit de quel genre de surprise il s'agissait.

Tomorrow Never DiesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant