Inspirer.
Expirer.
Le concept de la respiration est simple. Sans respirer, nous perdrions la capacité de vivre, la vie nous échapperait du bout des doigts. Mais je peux dire que la mienne s'avère tumultueuse, lorsque l'obscurité totale m'engloutit dans la chambre d'hôpital. Je ne prête pas attention au brouhaha qui s'ajoute à la pièce ; il est noyé par les cris et les hurlements de mon esprit et les constantes pulsations qui traversent mes muscles douloureux.
Je suis bientôt contrainte de fermer les yeux pour permettre à mon esprit fatigué de s'évanouir un instant.
C'était il y a moins d'une seconde.
Peut-être même un quart de seconde.
Mais tout a changé.
Je reste là, le regard vide vers l'endroit où Roméo vient de disparaître.
Je me sens étourdie, comme si je venais de sortir d'un film de quatre heures dont je n'ai pas compris la moindre minute. La douleur ne s'estompe pas quand mon regard se pose sur les traces de larmes, infiltrées dans le tissus de son sweat-shirt.
Ma circulation sanguine pulse à l'intérieur de mes veines et dans chaque recoin de mon abdomen. Son visage est détendu, enveloppé de cette innocence, de cette facilité que seul le sommeil peut apporter. Ses traits fins dévoilent un léger sourire, peint à jamais sur ses lèvres pêche. Avec son teint pâle combiné à la couleur des draps, c'est presque trop difficile à comprendre, comme regarder un mur blanc par une journée ensoleillée.
J'ai presque l'impression de ne pas être autorisée à le regarder. Et pourtant, je l'observe. J'attends qu'il finisse par ouvrir les yeux. Mais lorsque je resserre ma poigne sur sa main glacée, rien ne se passe. Ses paupières restent closes et le silence m'oppresse un peu plus.
Il a l'air de dormir paisiblement.
Mais il ne l'est pas.
Je sais qu'en ce moment de misère taché de larmes que je suis dans l'incapacité de rester ici. Sa vue est trop affligeante pour mon état d'esprit fragile. Cela aurait pour seule conséquence de me faire sombrer peu à peu dans la folie. Pourtant, je suis là ; brisée et en larmes.
Je souhaite de tout cœur retourner dans ses bras, me blottir contre son corps mince tandis qu'il me murmurerait que tout ira bien, que la contraction au fond de ma poitrine harassée, allait tôt ou tard se dissiper.
Ma langue se coince entre mes dents, je la mordille pour soulager une partie de la douleur. Tout au long de ma vie, j'ai vécu toutes sortes de souffrances. Mais cette souffrance-là, est différente.
Et bientôt la douleur se met à tripler de volume à l'intérieur de mon corps. Des dizaines et des dizaines d'interrogations abordent mes pensées.
Où est-il maintenant ?
Selon le mythe des anciens Égyptiens, la mort n'est qu'une étape temporaire qui mène à une vie prochaine, tant que notre cœur demeure aussi léger qu'une plume. Le cœur de Roméo ne portait que de l'amour pur vers le ciel, il y a donc une chance que ce soit là-bas qu'il ait été envoyé.
Peut-être qu'il est devenu une étoile ; une étoile brillante qui scintille dans la nuit sombre et se distingue des milliards autres astres qui recouvrent le ciel. Peut-être qu'il détient désormais une maison dans les nuages, avec une vue incomparable sur la ville. Tout ce que je souhaite, c'est que le soleil brille du matin au soir et que le ciel est clair là où il est. Le goût répugnant de la bile grimpe dans ma gorge, il ne tarde à étoffer le bout de ma langue.
Les couloirs de l'hôpital paraissent vides et sans vie alors que nous les traversons toutes les deux avec Marzia. La vue des autres patients devient obsédante, maintenant que Roméo repose parmi les défunts. Le secrétaire nous jette un regard empreint de sympathie. J'essaie d'ignorer la façon dont ses yeux s'adoucissent à notre passage, ses lèvres pressées l'une contre l'autre dans un sourire compatissant.
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Tomorrow Never Dies
RomanceUn petit banc en bois foncé au bord de Riverside Park, voilà où Opal se rend tous les soirs après les cours. Elle s'y assoit pour lire un livre, fumer une cigarette, ou bien tout simplement réfléchir. Opal a pour habitude de s'y retrouver seule, ma...