Chapitre 6 • De Belles Amitiés

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Deux jours se sont écoulés depuis le café avec Roméo. Notre conversation est encore fraîche dans mon esprit et je peux dire qu'il y a toujours un mur entre nous. Un mur fin, certes, mais fort.

Le cours de langues étrangères n'en finit plus. Je ne prête pas vraiment attention au discours du professeur. Il n'y a rien de pire que d'être forcée à écouter quelque chose d''inintéressant pas, entourée de personnes inintéressantes.

Mes pensées divaguent alors que je me mets inconsciemment à bailler, sans me soucier des regards en biais que je reçois de la part des étudiants autour de moi.

— Ce cours est épuisant, hein ?

Je relève la tête vers une jeune fille, ses cheveux ébènes parsemés de mèches acajou retombent sous forme d'ondulations indécises au-dessus de ses épaules et ses yeux en amande m'étudient d'un air amusé.

Sans surprise, je ne lui réponds rien.

Je me contente de me redresser dans mon siège après lui avoir délégué un mince acquiescement du regard. La brune pince ses lèvres charnues du bout des doigts.

— Je m'appelle Manelle.

Un hochement de tête.

C'est tout ce que je lui offre en guise de réponse, pour la deuxième fois en l'espace de cinq minutes. Les gens de cette ville ont été pourvu d'un don à la naissance pour se comporter de façon aussi amicale. Je songe à la façon dont il était si simple pour Roméo, de faire la conversation sur le banc du parc, malgré le peu de réponses que j'apportais à ses questions. C'était si facile pour lui et j'aimerais que ce soit aussi facile pour moi. Ou alors j'aimerai tout simplement qu'on me laisse tranquille.

— Opal, je réponds finalement.

Ses sourcils épilés drapent son front lisse :

— Je ne t'ai jamais vu auparavant, Opal.

— C'est une grande université. Je pense qu'il y a beaucoup de personnes qu'on ne verra jamais.

— Tu as raison.

Je me concentre à nouveau sur le cours. Force est de constater que les langues ne sont pas faites pour moi. Je repose mon menton dans ma paume. Un soupir s'échappe de mes lèvres par la même occasion. Je passe le reste de l'heure à me demander ce que ma mère compte préparer à manger pour ce soir.

— Je pensais que tu n'arriverais jamais.

Roméo est encore une fois vêtu de sa parka kaki, son bonnet noir recouvre ses mèches dorées qui flottent avec le vent du parc.

— Eh bien, je suis là.

Un sourire radieux s'empare de ses traits. Il se décale pour me faire de la place. Aujourd'hui, je n'ai pas de livre. J'ai terminé ma lecture de Ne Tirez Pas Sur L'oiseau Moqueur et ce que je redoutais le plus finit par arriver ; je n'ai plus rien à lire. Je me maudis de ne pas avoir pris le temps de me concentrer là-dessus plus tôt.

— Tu ne fumes pas ? m'interroge-t-il, une pointe de malice dans la voix.

— Quand vas-tu me lâcher avec ça ?

Il hausse les épaules.

— Je ne comptais pas le faire.

Ses mains sont enfouies à l'intérieur de ses poches. J'en fais de même, de sorte à réchauffer le bout de mes doigts, qui bénéficient en général de la chaleur de mon briquet.

— Je peux te poser une question ?

La conversation avec Manelle de ce matin réintègre peu à peu à mon esprit.

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