Chapitre 7 • Révélations

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L'air est lourd aujourd'hui, un orage se prépare. Le mois de décembre approche à grands pas, la ville annonce déjà les fêtes de fin d'année par l'installation de toutes sortes de décorations lumineuses sur les lampadaires qui bordent les rues. Des guirlandes camouflent les branches nues des arbres du parc.

Nous sommes vendredi et ce soir a lieu l'exposition de bandes dessinées de la mère de Roméo. Je ne comprends toujours pas ce qui m'a pris d'accepter. La Opal de tous les jours aurait répondu quelque chose du style : "Merci pour ton offre, mais non merci." Mais jamais elle n'aurait accepté une telle invitation.

Et pour être honnête, je commence à me lasser de la Opal de tous les jours.

L'atmosphère est encore embrumée lorsque je sors de la douche. J'essuie la buée sur le miroir d'un revers de manche avant d'attraper un élastique pour coiffer mes cheveux blancs en un chignon imparfait. Après plusieurs essais, le résultat semble enfin me convenir alors je songe cette fois-ci à la façon dont je vais m'habiller.

Je souhaite faire bonne impression, ce qui n'a pas vraiment de sens puisque je ne prête généralement pas attention à ce qu'on peut penser de moi. Je jette finalement mon dévolu sur un pantalon flare à motif fleuri, ainsi qu'un haut blanc asymétrique que j'enfile aussitôt.

Un épais trait de liner noir sur mes paupières plus tard, je descends les escaliers. Mes parents préparent le diner dans la cuisine, une puissante odeur de sauce tomate flotte à travers la pièce.

— Ça y est, tu y vas ? ma mère relève la tête de la casserole qui boue sur le feu.

— Ouais, j'ai dit que je serai là-bas pour 19h30.

— Tu es certaine de ne pas vouloir manger un petit truc avant de partir ? intervient mon père. Tu risques d'avoir faim.

— Roméo m'a informé qu'il y aurait un buffet à l'exposition. Ne vous inquiétez pas pour moi, je trouverai bien quelque chose à me mettre sous la dent.

Je crois que mes parents sont toujours aussi surpris de me voir sortir. Ce n'est pas comme si j'étais invitée à une soirée tous les week-ends. Mais je peux en déduire à leurs sourires satisfaits, qu'ils sont heureux que je fréquente enfin du monde plutôt que de rester enfermée dans ma chambre à lire un livre ou écrire toutes sortes de textes plus inutiles les uns que les autres.

— Bon, il faut que j'y aille.

— Bien sûr. Amuse-toi bien, ma chérie.

Je leur envoie un dernier sourire, attrape mon sac à main en vernis noir et m'enfonce dans la pénombre de la rue.

Roméo m'a indiqué que la salle d'exposition ne se trouve pas très loin du petit parc, alors je décide d'y aller à pied. Il ne fait pas encore trop froid à cette heure de la journée, je profite de la couverture des arbres pour me tenir compagnie.

Une bouffée de chaleur me fouette le visage. Une foule de gens est déjà agglutinée dans le hall d'entrée et je regrette immédiatement d'avoir accepté l'invitation. C'est alors que je réalise à quel point Belleville est vraiment vivante et respirante. Aussi vivante que n'importe lequel de ses habitants. Je parviens tant bien que mal à faire mon chemin jusqu'à l'un des coins de la pièce, où le rassemblement d'individus me semble moins important.

Je me pose contre l'une des immenses colonnes qui remplissent la salle, en compagnie d'une plante verte dont j'ignore le type. Je balaie la pièce du regard ; aucun Roméo en vue. Seulement un tas de visages inconnus ainsi que des murs tapissés d'illustrations diverses. Un serveur m'apporte un verre de champagne que j'accepte par politesse. Le liquide pétillant s'agite entre les parois transparentes. Je l'apporte à mes lèvres, un goût d'amertume prend possession de mes papilles.

Tomorrow Never DiesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant