Eternels // Muke ✓

chapitre 67

– On ne peut pas quitter la ville, Luke.

Prit au dépourvu, j'en laissai tomber le sac de voyage que je venais de sortir de sous le lit de Michael et me retournai vers ce dernier.

– Bien sûr qu'on peut, et c'est ce qu'on va faire.

Face à l'expression butée du vampire, je me plantai devant lui, les poings sur les hanches.

– Michael, si le Conseil vient pour nous tuer, même avec l'aide de tes deux... amis, on ne pourra rien faire contre eux.

– Luke...

– Non ! m'écriai-je, ne comprenant pas pourquoi il insistait, C'est toi le plus réfléchi et prudent de nous deux d'habitude, qu'est-ce qu'il te prend d'un coup ? Te lancer dans une mission suicide c'est pas ton genre !

Il roula des yeux, m'approchant de lui en me tirant par la taille. Après avoir déposé un baiser tendre sur mon front, il me sourit avec une expression sereine mais déterminée.

– Tout va bien se passer Luke, on est pas tout seuls. Et puis fuir ne servirait à rien. S'ils ont vraiment l'intention de nous buter, ils nous retrouveront où qu'on aille de toute façon.

Je grognai, laissant ma tête tomber sur l'épaule de Michael alors que j'inspirais profondément, essayant de me calmer et de m'éclaircir les idées. Pour la première fois depuis longtemps, j'étais véritablement terrorisé par les monstres que portait ce monde. Le Conseil faisait peur à tout le monde, aux vampires, aux autres créatures surnaturelles ainsi qu'aux chasseurs qui avaient connaissance de son existence. Pourtant Michael n'avait pas l'air effrayé, lui. Cela laissait place à deux suppositions. Ou il était stupide, ou il avait un plan. Or j'avais confiance en Michael et en son intelligence.

– Qu'est-ce que tu comptes faire alors ? demandai-je faiblement sans relever la tête, me concentrant sur le mouvement apaisant de sa main dans mon dos.

– Tout d'abord, nous allons les accueillir ici dans les règles, avec le respect qu'on leur doit.

Je me redressai pour le dévisager, ahuri. Tout compte fait, il devait avoir perdu la tête. Je devrais sûrement le traîner de force hors du pays. L'assommer et le tirer par les pieds devrait faire l'affaire. Michael ricana devant mon expression avant de continuer.

– Ils ont beau être les membres du Conseil, ils ne peuvent outrepasser leur propres règles. Hors l'une d'elle interdit à tout vampire de s'en prendre à un maître hors d'un combat officiel. S'ils veulent me tuer, ils devront me défier. Avant ça, des préparatifs devront être faits, ce qui nous laissera le temps de mettre en œuvre notre plan, et de sauver nos fesses par la même occasion.

– Et que comptes-tu faire pour nous sauver les miches ? intervint une voix dans mon dos que je reconnus comme celle d'Améo.

Je sursautai, n'ayant même pas entendu la porte de la chambre s'ouvrir. Cela me fit me calmer de façon plus radicale encore que l'assurance de Michael qu'on allait s'en sortir. Je venais d'être surpris malgré mon entraînement de chasseur et mes sens aiguisés de vampire. Ce n'était pas sensé arriver. Et ça me faisait peur. Mais pas de la même façon que la menace du Conseil m'avait paniqué jusqu'à maintenant. C'était une peur froide et calme, celle qui me gardait en vie depuis tant d'années, celle qui me permettait d'aller de l'avant et de rester maître de moi-même dans les circonstances les plus difficiles.

– On va les baiser. Littéralement, répondit Michael au jeune homme avec un sourire carnassier.

– Pardon ?

Cette fois c'était certain, Michael avait perdu la tête. Améo devait penser la même chose que moi d'après le ton incrédule qu'il utilisa ensuite.

– Pourquoi tu voudrais faire une chose pareille ?

– Pour faire d'eux nos pantins !

– Nos pantins...

Pouvant à peine contenir son excitation à présent, Michael me lâcha pour faire les cent pas devant Améo et moi, un énorme sourire toujours présent sur son visage parfait.

– Notre pouvoir est bien plus redoutable que vous le pensez. Non seulement il nous tient en vie, mais on peut aussi l'utiliser comme une arme.

Il s'arrêta devant moi pour planter son regard vert dans le mien.

– On va coucher avec eux, et on va faire d'eux des junkies. Ils ne voudrons plus nous faire de mal après ça, pas alors que ça voudrait dire perdre leur source de plaisir. On sera leur drogue. Ou du moins celle de l'un d'eux, ça sera suffisant. La mise à mort de quelqu'un par le conseil doit être voté à l'unanimité.

C'était bien beau en théorie, mais je me voyais mal au lit avec un des vampires les plus puissants qu'il soit. Et je les voyais mal accepter de faire une chose pareille.

– Au risque de paraître rabat-joie, commença Améo, Comment vas-tu réussir à te glisser dans le lit d'un membre du conseil ?

– Je trouverai bien le moment venu, assura Michael en haussant les épaules.

J'enfouis mon visage dans mes mains, me demandant une fois de plus comment j'avais bien pu atterrir dans un pétrin pareil.