La rive du temps

Chapitre 26

On était coincé, ils allaient nous trouver et nous tués. Khalis se lovait contre une paroi de la benne à ordures. Nous étions cachés depuis maintenant plusieurs heures, Paris était devenu une ville dangereuse. Je lui avais pourtant conseillé de ne pas me suivre. J'étais un danger potentiel pour tous ceux qui désiraient m'accompagner dans mon combat contre les SCP. Malgré cela, il avait voulu se joindre à moi. J'avais caché ma joie derrière un air renfrogné. Il avait souri, je ne l'avais pas vu sourire depuis longtemps. Il me disait qu'il était heureux d'être avec moi, mais je n'en croyais pas un mot. Comment être heureux de traîner avec quelqu'un qui pouvait causer votre mort ? Des pas se firent entendre, suivis d'instruction dicter à travers une radio. Une arme se rechargea, un mitraflamme à coup sûr. Mon cœur s'emballa, ma respiration aussi. Son regard vint se poser sur moi, il leva les yeux au ciel et se dégagea de la paroi de la benne. Il me rejoignit avec lenteur et il me prit dans ses bras. J'aimais cette sensation, ça me rassurait. Il me caressait les cheveux et déplaçais quelques mèches au passage.

- Il ne faut pas avoir peur. Je suis là Mey, me chuchota-t-il.

Mes yeux rencontrèrent les siens. Il me souriait. Je ne pus m'empêcher de le lui rendre, tout en le serrant plus fort dans mes bras. Ces paroles m'apaisaient, plus que n'importe quelles drogues.

- Tu sais je serais toujours là pour toi, je tuerais pour toi. Malgré que je regrette d'avoir dû achever une SCP pour te sauver... soupira-t-il. Je suis sûr d'une chose, une seule. Jamais je ne ferai de mal à un ami.

*

Le coup de feu était parti, je n'avais pas pu l'arrêter. Encore une fois j'avais échoué, je n'avais pas réussi à le contrôler. J'entendais des cris, des pleurs. Mon corps ne bougeait plus. Mon esprit m'avait abandonné, je regardais le vide. Dahlia... Il avait tiré sur Dahlia, l'homme le plus exemplaire que je connaissais avait tiré sur un de mes amis ! Mon esprit se réveilla et je me mis à pleurer. Je hurlais de toute mes forces, je me battais contre des démons invisibles. Mes jambes se dérobèrent sous moi et je fermai les yeux. Je rêvais, cela ne pouvait pas être vrai, il n'avait pas tiré. Il ne pouvait pas, il en était tout bonnement incapable.

Je me résignai à regarder ce spectacle affreux. Dahlia était debout, raide comme un piquet, les yeux écarquillés, des larmes roulant sur ses joues. C'est là que j'entendis. Un cri, son cri. Affreux, strident, qui te prenait les tripes et te ramenait à la réalité. Sa sœur, sa jumelle, Zelie, gisant au sol. Du sang se répandait autour d'elle. Ses mains étaient collées sur sa poitrine. Elle avait la respiration difficile, du sang coulait lentement sur sa joue. Dahlia tomba à genoux dans la flaque de sang. Elle y trempa ses mains tremblantes, elle hurlait toujours.

Un chaos total, cela décrivait très bien la scène que j'avais sous les yeux. Zelie s'était sacrifié pour sauver sa sœur. Je l'avais jugée, peut être détestée par moment, mais je ne la connaissais pas. Alors qu'elle était en train de mourir sous mes yeux, j'avais l'impression de mieux la connaître. Dahlia déposa un baiser sur le front de sa sœur. Je m'arrachai à la contemplation de cette scène macabre lorsque j'entendis un grognement. Manu était à califourchon sur Khalis. Il le rouait de coups, ne s'arrêtant que pour reprendre son souffle. Il déversait toute la haine qu'il avait en lui depuis des années et des années. Khalis ne bronchait pas, il savait ce qu'il avait fait et il acceptait sa punition. Manu attrapa le flingue qui était tombé au sol et il le pointa sur le front de l'assassin de Zelie. Mon cœur s'arrêta de battre et mon instinct me força à hurler d'un cri aigu.

- Ne tire pas ! ordonnai-je.

Manu se retourna vers moi, le regard fou. Il abaissa l'arme, regarda Khalis une dernière fois, lui donna un coup de crosse et se leva. Il me bouscula et se dirigea vers Dahlia pour la réconforter. Soudain, Zelie essaya de parler. Un silence de mort se leva et tout le monde se précipita au-dessus d'elle afin d'entendre ce qu'elle avait à dire. Khalis tenta de s'enfuir, mais je l'attrapai par le bras et l'attirai vers moi. Le teint de Zelie était pâle, ce serait ces dernières paroles.