21. Atlanta. Gone With the Wind

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Qui qu'est gueux ? C'est-il nous  

Ou ben ceux  Qu'a des sous ? 

~ Jean Richepin, La chanson des gueux

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Je ne veux pas y penser en ce moment, se dit-elle désespérément en enfouissant la tête dans son oreiller. Je ne veux pas y penser maintenant. J'y penserai plus tard, quand j'en aurai la force  ~ Scarlett O'Hara (Margaret Mitchell ~ Autant en emporte le vent) 

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.... Vivien & Julia (Leigh), Margaret (Mitchell) et tout autre "survivant débrouillard" y compris. Frankly my dear, we are masterpieces!

Sleeping Beauty (2011) / La Belle du Nuit (au Canada). C'est finalement ... une histoire d'horreur ? bien que l'une complètement dépourvue du sang et du gore. Horreur qui s'infiltre lentement, d'une manière à peu près insaisissable, pour hanter par la suite la conscience subjective du spectateur. Bon, d'accord, cela dépend du spectateur – la co-construction du récit lui est enjointe.

Je reformule : Sleeping Beauty est une brillante métaphore existentielle. Un film intelligent et exigeant. Comme dans un miroir magique, on peut tout y voir – ou rien. La clairvoyance est une prérogative des initiés, non ?

La Belle (Lucy / Sarah) cherche des moyens pour survivre. Dans une métropole occidentale civilisée*, c'est synonyme avec "faire de l'argent". Et elle se donne la peine, vraiment. Elle a des jobs multiples, tout en continuant ses études. Les drogues et l'alcool font partie de son quotidien. Ses décisions sont pragmatiques. Vu la rentabilité financière, elle intensifie la vente de son corps - pour des recherches cliniques ou pour la prostitution, peu importe, semble-t-il. Car Lucy reste cool. Presque en état dissociatif, chuchote le psychiatre. Aucune émotion (du moins, montrée). Aucun totem, même pas l'argent (c'est a brûler). Aucun tabou ... AUCUN LIEN...aka RELATION (.... même pas d'attachement, des relations intersubjectives ce n'est même pas la peine d'en parler).

Une ado pathognomonique pour sa génération. Premier insight effrayant. Et un questionnement en sourdine  - mais persistant (donc agaçant) - sur la différence de fond entre un job de cobaye pharmaceutique e un job de prostituée. 

*|  Dans son livre Migration comme métaphore, le pédopsychiatre suisse Jean-Claude Métraux différencie les sociétés dites de survie et les sociétés férues de la maîtrise, structurées par l'ode à la croissance, au pouvoir et aux compétences.

*|  Dans son livre Migration comme métaphore, le pédopsychiatre suisse Jean-Claude Métraux différencie les sociétés dites de survie et les sociétés férues de la maîtrise, structurées par l'ode à la croissance, au pouvoir et aux compétences

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Et les autres, les adultes ayant accumule les compétences, de l'expérience et de la sagesse? Eux, les riches, les puissants, les fortunés, eux, qui ont "réussi dans la vie" - comment vont-ils??

...  c'est Marin Sorescu qui me vienne a l'esprit - bien évidemment, en roumain (ma langue maternelle, ma langue poétique).

Am zarit lumina pe pamant
Si m-am nascut si eu
Sa vad ce mai faceti
Sanatosi? Voinici?
Cum o mai duceti cu fericirea?

Un rayon de lumière sur votre terre...
Comme quoi, me voilà né
Pour voir où vous en êtes.

Ça va, la santé ? Et vos forces ?
Mais le bonheur, ça y est ? 

.... 

Julia Leigh refuse tout commentaire spéculatif, et laisse les images filmées montrer, impitoyables, la réalité; le "trop de réalité"; l'horreur. Et la silence devienne au fur et a mesure lourde, envahissante, suffocante. A nouveau, les mots du lord Clark me reviennent: "What is too silly to be said may be sung" — well, yes; but what is too subtle to be said, or too deeply felt, or too revealing or too mysterious.... — these things can also be sung and can only be sung.

....et ce qui est trop HORRIBLE pour être dit, on peut le filmer et montrer en épingle, semble compléter Julia Leigh (romancière réputée, avant son début dans la cinématographie). 

Brillance satinée du beau corps jeune de Lucy dans les draps en soie en contraste violent avec les corps répugnants des vieux hommes (riches, c'est vrai...mais nus). Perversité d'allure nécrophile dans une ambiance luxueuse...  

Pour tout ces insights glaçantes, pour le hurlement animal de Lucy dans la scène finale, je ne l'interdirai pas ce film aux adolescents. Au contraire.

Liceenii, le film de Nicolae Corjos (1989) fut un block-buster pour la génération des lycéens roumains a l'époque

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Liceenii, le film de Nicolae Corjos (1989) fut un block-buster pour la génération des lycéens roumains a l'époque. J'avais 17 ans. 

L'atmosphère du lycée sous régime communiste? C'est l'age des premiers amours, premières craintes et trahisons, premiers défis et victoires... Qu'est - ce que pourra changer la politique?

Ulysse sans IthaqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant