Hunters - Tome 2

Chapitre 20

Depuis l'enfance, nous avions pris l'habitude de nous réunir ainsi tous les trois. On discutait de tout et de rien. On réfléchissait à l'avenir, on imaginait comment ça serait plus tard et maintenant qu'on y est, je n'ai qu'une envie, revenir à ces jours passés. Revenir à ces jours où tout était plus facile, plus calme.

On est chasseurs depuis des années et pourtant, on a constamment cette impression d'en apprendre tous les jours un peu plus. Nous qui étions si certains de tout savoir sur ce monde que ce soit de près ou de loin. Finalement, on se voilait la face depuis bien longtemps.

« - Tu as une idée par où commencer ? me demanda Tara
- Pas la moindre. Pour l'instant, je vais retourner à l'hôpital et j'irais faire des recherches plus tard, répondis-je en me relevant »

Bien-sûr c'était un mensonge. Je savais exactement par où commencer. À qui parler. Je ne sais pas ce que cela me coûtera mais je refuse de laisser les choses en état.

Je refuse de voir Amélia mourir et ce, sous mon nez. Je la sauverais. Peu importe le prix à payer. Je ferais tout ce que je peux.

Les couloirs interminables de l'hôpital avaient toujours cet attrait glauque et morbide qu'ils ont toujours eu dans mes souvenirs. D'un service à l'autre, on croisait des médecins soient complètement dépités, soient souriants. Tout dépendait.

Brusquement, je sentis une poigne resserrant mon bras et m'attirant dans un placard à balais. J'eus à peine le temps de m'en défaire que je me retrouvais coincé à l'intérieur... Face à Raya.

« - Qu'est-ce que tu fais là ? demandais-je avec une voix agacée
- Je suis venue pour te parler. Je te dois des explications Kyle.
- À propos de ce qu'il s'est passé ?
- Oui et non. J'aimerais seulement que tu comprennes et que tu respectes mon choix.
- Pourquoi ? Pourquoi tu t'es lancé dans cette histoire ?
- Pour te protéger.
- Me protéger de quoi ?
- De ce qui se prépare Kyle. Tu n'as pas idée ce qui vous arrive dessus.
- Alors dis-moi !
- La guerre. La guerre est à vos portes. »

Pourquoi ? Pourquoi est-ce qu'à chaque fois les choses doivent s'empirer ? Pourquoi ne peut-on pas avoir le temps de régler une chose à la fois ?

« - Il sait que tu es là ?
- Non. Mais je ne devrais pas tarder. Il va m'attendre. »

Alors qu'elle s'apprête à sortir de cet espace confiné, ma main l'attrape, la retourne et je me surpris à l'enlacer.

« - Promets-moi de faire attention à toi Raya... Promets-le-moi.
- Tu sais bien que je ne peux pas. »

Elle franchit la porte et disparut dans le couloir.

Dès mon retour dans la chambre d'Amélia, je retrouvai le silence et la solitude que j'avais l'habitude de côtoyer à chaque fois que je venais là. C'était à la fois pesant et relaxant, chose qui n'allait pas du tout ensemble mais c'était ce que je ressentais. C'était les seules minutes et heures que je pouvais passer avec elle. À ses côtés. À attendre.

Combien de temps cela faisait-il déjà ? Des heures ? Des jours ? Des mois ? Pour moi, une éternité. Une éternité à attendre un changement, une amélioration qui, viendra peut-être jamais.

Des fois je me demande si les choses auraient pu être différentes si je ne l'avais pas mêlé à tout ça ? Si elle était restée cette fille rendant visite à sa grand-mère. Si on n'avait pas cherché à l'introduire à ce monde... Des fois je me dis, qu'au fond, tout est peut-être de notre faute. Et si tel est le cas, alors c'est également à nous de réparer tout ça.

À moi.

Je m'endors la tête posée contre mes bras croisés sur le rebord du lit. Dormir me fera peut-être oublier. Qui sait ?

« - Kyle ? »

J'entends mon nom. J'entends mon nom au loin, comme un écho. J'entends mon nom là, quelque part.

J'ouvre un œil sans ayant la moindre idée de l'heure qu'il est et je sens quelque chose dans mes cheveux. Je me redresse, me retourne et voit Amélia, allongée juste-là, un sourire faiblard suspendu au bout des lèvres. Elle me regarde, moi.

« - Amy ! »

Et là, le monde qui semblait s'écrouler sous mes pieds jusqu'à il y a peu encore est petit à petit en train de se reconstruire sur son sourire.

Elle est mon monde, elle est mon tout.
Elle est tout ce pour quoi je me battrais.