Chapitre 40

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Je ne voulais pas mourir. Je ne voulais pas souffrir. La vérité était que j'étais bien trop lâche pour me suicider. Mais je ne voulais pas non plus voir son visage. Tiraillé par la colère, la déception, la peur. Je n'y voyais plus tout ce que j'y retrouvais avant. Ces étoiles brillantes dans ses yeux. Ce sourire charmeur suspendu au bout de ses lèvres. Cette légère teinte de rose sur ses joues joufflues. Je ne voyais plus rien de tout ça. Je ne voyais plus en Amélia, ce pour quoi je l'aimait. Et le pire dans tout ça, c'était de m'avouer que c'était sans doute à cause de moi. Alors oui, oui je suis faible, oui je suis fragile vous avez le droit de le penser.

C'est peut-être parce que je suis devenu trop humain. Trop sensible. Et si être sensible faisait ressentir tout ça, toute cette peine, alors je ne voulais plus de ça.

Je préférais encore me retirer plutôt que de ressentir ça. De porter ce poids sur moi toute ma vie. Je n'ai pas l'étoffe d'un héros mais je n'ai pas les épaules assez solides pour vivre ça.

Pas encore une fois.

J'ai vu ma mère mourir de chagrin et de solitude. J'ai vu mon frère détruire le monde par haine. Je ne voulais pas, qu'à mon tour, je sois la victime de l'un de ces faits.

Tout ce que je voulais, tout ce pour quoi je me suis battu, c'était juste pour être normal. Je n'ai pas demandé à être comme ça. Je n'ai pas demandé que l'on me confie toute une part de cette histoire. Une grosse part. Alors oui, j'ai surement déçu énormément de gens en m'y mêlant.

À commencer par moi-même.

C'est surement stupide ce que je raconte mais au fond, vous comprendrez. Vous comprendrez que tout doit prendre fin maintenant. Tant qu'il en est encore temps.

Tant que j'ai un minimum, une once de courage pour me rendre compte du bordel que c'est devenu... À cause de moi.

« - Non ! »

Il est trop tard quand j'entends son cri. Trop tard quand j'entends les pleures de son cœur. Trop tard pour que je m'arrête.

Trop tard pour éviter ça.

Le mal est fait.

Je sens en moi comme un léger choc, un picotement et un sourire de soulagement m'échappent. Je pensais que j'allais souffrir plus que ça. Je sens un léger filet de sang coulant le long de mon torse. C'est bizarre. Ça ne me rappelle pas de bon souvenir et pourtant, à ce moment précis de ma vie, je suis heureux.

Heureux de savoir qu'elle aussi... Elle a essayé. On aura tous les deux essayés. De toutes nos forces, de toute notre âme. On aura essayé de s'aimer sans se faire de mal. Sans se faire tout ce mal. On aura essayé d'être pour l'autre, ce pilier nous retenant de tomber mais on n'a pas été assez solide. On s'est effrité. On s'est écroulé.

Je m'en rends compte maintenant. Notre principal défaut, c'est peut-être que l'on s'est trop aimé. Dans l'autre, on a trop donné sans voir ce mal qui nous rongeait.

On se traite d'égoïste, comme on s'envoie une balle au tennis mais la vérité, on la connaît. La vérité est que nos mots, sont souvent l'inverse de notre pensée.

Si seulement... Si seulement nous avions pu être égoïstes. Si seulement, de temps en temps, on aurait pu juste regarder notre nombril. Si on s'était fait passer avant. Mais non. Ce n'était pas possible, pas pour nous. Pour nous, comme dans ces romans à l'eau de rose que tu aimais tant, c'était : l'amour avant tout.

On en rit souvent d'ailleurs, de ces romans. De ceux où d'entrée jeu, on sait que le héros et que l'héroïne sont amoureux. De ceux où l'on sait qu'ils s'aiment mais qu'à cause des emmerdes de la vie, ils ne seront pas foutus de se dire les mots « Je t'aime ». On rit de ces romans où l'on sait qu'à la fin, ils vivront heureux, tous les deux main dans la main.

Mais nous, notre fin, elle est comment hein ? Dis-moi Amélia, tu y as déjà pensé à ça ? Je me suis déjà posé la question, une ou deux fois et quand j'eus trouvé une réponse, ce n'était jamais « Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants ». J'aurais aimé. J'aurais vraiment aimé.

J'aurais aimé passer ma vie avec toi, de prendre dans mes bras et te chuchoter tout bas :

« - Ça va aller... »

Mais ça ne va pas. Ça ne va plus. Plus depuis quelque temps. Alors au lieu de se plaindre et de se lamenter, il faut en terminer. Maintenant. Tant que l'un de nous deux, aura le courage suffisant pour dire :

« - Je t'aimais vraiment. »

Ces mots dit, je me sens partir. En arrière. M'effondrant totalement sur moi-même. Je t'entends hurler mon prénom comme tu l'as si durement hurlé cette nuit-là, il y a un an de cela.

Je t'entends le crier. Je te sens me secouer mais ça, c'était avant que je ne sombre dans l'obscure clarté.

Adieu Amélia. Pour la toute dernière fois.

Hunters - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant