Chapitre 21

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À son réveil, le médecin du Siège a été rappelé pour lui faire passer une batterie de tests et pendant qu'il s'occupait d'elle, je fus condamné à attendre dans le couloir, passant divers coups de fil pour prévenir tout le monde. N'ayant pas réussi à joindre Leina directement, j'ai fait transmettre le message par Hayley. Nico et Tara, soulagés et à la fois fous de joie, se contentèrent de me glisser un « Profites-en bien » et pleins d'autres sous-entendus plutôt glauques. Enfin, j'en aurais bien profité, oui, je ne vais pas mentir, mais pas maintenant.

J'ai l'impression que les tests prennent trois heures tandis que je fais le pied de grue dans le couloir, saluant toutes les infirmières me passant sous le nez. Je m'en rappelle d'une en particulier, elle m'a glissé son numéro tandis que je remplissais certains papiers.

Certaines personnes ne manquent pas de culot.

Le médecin finit par sortir, referme la porte derrière lui et s'arrête à ma hauteur. Il enlève ses lunettes, les ranges dans la poche de sa veste et me regarde avec un air dépité. Perdu.

« - Apparemment... Elle va bien. Mais cela ne change rien à ce que j'ai dit. Vous devriez vous montrer prudent à l'avenir.
- Qu'est-ce que je devrais faire selon vous ?
- Je ferais une lettre au Consul, il n'est plus envisageable qu'Amélia soit chasseuse. Cela serait un trop gros risque à prendre pour elle. Tant que nous ne savons pas comment améliorer sa condition, je ne préfère pas courir de risque.
- Lui avez-vous dit docteur ?
- J'ai pensé que vous seriez... Plus à même de lui expliquer la situation. »

Forcément.

« - Merci en tout cas. Merci pour tout, fis-je en lui tendant la main
- Surtout, si vous avez la moindre question ou le moindre problème, n'hésitez pas. Je vous ai laissé mes coordonnés il me semble... »

C'est vrai. J'ai de nombreuses choses à lui dire, à lui expliquer et à lui raconter. Je ne sais pas encore comment elle réagira mais je n'ai pas envie de me précipiter sur ça. Je n'ai pas abandonné. Je n'abandonnerais pas. Je ne regarderais pas la fille que j'aime dans les yeux pour lui dire qu'elle va mourir. Je m'y refuse.

Et je sais qui je vais devoir aller voir pour ça.

Je passe le pas de la porte et je la vois martyrisant la télécommande de la télé de la chambre. À peine sur pied qu'elle s'acharne déjà sur quelque chose. Je lui prends des mains tandis que ses yeux se posent sur moi.

« - On t'a jamais dit que les ondes ce n'était pas bon pour la tête .
- Ahahaha, faut croire que pour ce qui me reste... Alors ? Tu as discuté avec le médecin ? Qu'est-ce qu'il a dit ? »

Que tu allais mourir.

« - Que tout allait bien. Un peu de repos pendant quelque tempset ça devrait aller. Je voudrais savoir Amy... Tu te souviens de ta chute ? De ton malaise ? De pourquoi tu es là ?
- Pas vraiment... Enfin, je me sentais pas bien et... Qu'est-ce qu'il y a ? Pourquoi tu me regardes comme ça ? On dirait que t'as vu un fantôme.
- C'est juste que... Je suis heureux de voir que tu vas bien. Vraiment. »

Je m'assois à côté d'elle, dans le lit vraiment trop petit pour deux, et l'attire contre moi. Demain, on pourra rentrer chez nous. On pourra rentrer et profiter d'être ensemble. Rien que tous les deux. Rien qu'elle et moi. Demain, on pourra oublier tout ce qui arrive.

Dans ma tête, je passe les mots et les phrases en boucle, cherchant ce que je pourrais lui dire, comment je pourrais lui dire mais je ne trouve rien qui me convienne vraiment. Je ne sais tout simplement pas par où commencer.

Raya ? Léo ? Son espérance de vie ?
La guerre ?

Je ne sais pas. Je suis perdu, je dois l'avouer.

Néanmoins, je sais que je ne pourrais y échapper et ce n'est pas comme si je cherchais à fuir cette conversation, je ne peux lui mentir, je le sais mais je n'ai pas envie que ça sorte maintenant. Je ne veux pas gâcher le peu de tranquillité que l'on puisse avoir.

« - Amy ?
- Hmm ? Quoi ?
- Et si on fuyait ?
- Pardon ?! »

Elle se redresse et me regarde avec ses gros yeux de poisson ballon. Elle ne doit certainement pas comprendre et moi-même, je ne sais pas pourquoi je lui ai posé cette question, mais c'est sorti. C'est sorti, parce qu'au fond, j'y pense. J'y pense vraiment.

« - Qu'est-ce que tu entends par-là ? Pourquoi tu voudrais que l'on fuie ?
- Parce que, cette vie, elle ne nous apporte rien de bon. Que ce soit toi ou moi. Alors je me dis que l'on pourrait bien partir, loin d'ici. Partir sans rien dire à personne. Partir là où personne ne nous retrouvera. T'en dis quoi ? »

Attrapant ses deux mains pour les serrer dans les miennes, je la détaille avec mon air le plus sérieux, avant de prendre une grande inspiration et lui dire :

« - Amélia... Fuis avec moi ! »

Hunters - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant