Chapitre Treize - l'envers du décors

87 10 5
                                    


Le hurlement strident de Pijako résonna dans les oreilles de Zorua. Il grinça des dents de douleur. Il était dans une salle, si salle était un mot correct pour la nommer, sombre et coloré de rouge. La sang était partout sur les murs. Il n'aurait pas pu dire combien de personnes étaient mortes ici, torturées par leurs ennemis. Noctunoir entra dans la salle, s'essuyant les mains dans un vieux chiffon. Il enleva son masque de fortune et se tourna vers Spiritomb. "Non, il n'acceptera pas aujourd'hui. Nous recommencerons demain. Spiritomb, fais en sorte que Pijako ne meure pas cette nuit." L'intéressé hocha la tête. Pour être précis, on ne pouvait pas vraiment décrire ce qu'il faisait. Spiritomb avait un comportement parfaitement adapté à son physique : il semblait faire et penser des milliers de choses en même temps. Le pokémon se dirigea dans la pièce d'où venait Noctunoir, un air de sadisme et de rancœur lui animant le visage. Zorua essaya d'appeler Noctunoir pour tenter quelque chose mais la taillade qu'il avait en travers du ventre lui ôta l'envie de remuer. A sa gauche, Givrali était évanouie. Elle avait perdu une grande quantité de sang sous les coups des Ténéfix. Tout était plongé dans la confidentialité. Personne ne pouvait savoir pourquoi les pokémons étaient torturés. Par exemple, Zorua avait été torturé pour qu'il enseigne l'art de l'illusion à Noctunoir. Ce qui l'avait fait céder, c'était les menaces que ses geôliers avaient fait contre Givrali. Mais malgré la concession de Zorua, ils avaient aussi joué avec le corps de sa partenaire. Zorua avait tant versé de larmes dans cet horrible endroit qu'il s'était habitué aux atrocités commises chaque jour.
Malgré tout, lorsque Noctunoir s'approcha de Givrali, il ne put se retenir d'hurler. Peu importe ma blessure... Tant pis si je souffre, tant pis si je meure, je défendrai Givrali jusqu'au bout ! Même si ma vie ne lui offrira qu'une simple seconde de répit, alors je suis prêt à faire l'échange... J'ai déjà donné tout ce que j'avais... Mais vie n'a plus aucune raison de rester dans ce bas monde. Noctunoir se retourna, lançant un regard sévère au petit pokémon.
-Qu'y a-t-il, mon bon Zorua ? fit-il avec une voix réellement bienveillante.
-Je... Je... Ne touche pas à Givrali.
-Oh, c'est donc ça ? Tu sais, tu pourrais bien trinquer pour elle. Mais quoique je fasse, elle ne me donne pas ce que je veux. Même lorsque tu es passé sur la planche à sa place, elle a tenu sa langue. Elle me pose un sacré problème, je devrais la tuer, tu ne penses pas ? Elle est une perte de temps, et du temps, nous n'en avons plus beaucoup.
-Ne la tue pas, Noctunoir !
-Ecoute Zorua... J'essaie de me concerter avec toi en toute amitié pour prendre une discussion sérieuse. Si tu ne donnes aucun argument concret pour lui donner de la valeur, alors je me débarrasserait d'elle. Je suis très sérieux Zorua.
-...
-Tu sais, elle tient encore sa langue malgré que tu prennes sa place à la torture. Ce que j'en pense ? Soit elle est plus courageuse que toi, soit elle ne tient pas à toi.
-Soit ce que tu lui demandes vaut plus que ma vie !
grogna Zorua, la rage au ventre.
-Non, crois-moi, je pense que ce ne serait qu'un maigre compromis. Soyons francs, si quand j'aurais obtenu ce que je veux, je ne vous trouve plus aucune utilité, je viendrai vous exécuter moi-même.
-N'y compte pas !
menaça le pokémon-renard.
-Zorua, s'il-te-plaît, ne rend pas ça si difficile. Je le ferai parce que je ressens le devoir de le faire. Tu comprends ? C'est un engagement que je fais envers vous. Ne vois-tu pas le lien qui s'est développé entre nous lorsque nous avons passé quelques séances ensembles ? lâcha lourdement Noctunoir, les yeux pétillants.
-T'es rien qu'un psychopathe parmi tant d'autres...
-Mon bon Zorua, je crois que tu ne comprends pas la teneur de mes actes. Ne vois-tu pas que je suis ici pour tout prévoir et nous assurer notre victoire ? Si tu te rangeais de notre côté, ce serait si simple et bien plus agréable... Je suis sûr que nous pourrions devenir de véritables amis.
-Compte là-dessus, espèce de taré !
Noctunoir plissa les yeux, la déception visible dans sa gestuelle. Il se détourna sans grande conviction. Il replaça son masque sur son visage et se dirigea vers Givrali. Zorua serra les dents, persuadé de pouvoir retarder l'inévitable encore un peu.
-Noctunoir ! S'il-te-plaît, j'ai une question.
-Oui ? Qu'est-ce que tu veux savoir ?
demanda-t-il, bien plus sombre que quelques secondes plus tôt.
-Je... Je voudrais savoir comment tu as survécu à la blessure que tu portais à l'abdomen lorsque tu es rentré.
-Ah, ça ? Oui, j'étais... mort. Oui, il me semble que j'étais mort à ce moment-là. Mais les expériences que nous faisons ici... Tu vois ? Un jour nous avons capturé Célébi. Spiritomb a assimilé une partie de ses capacités. N'est-ce pas fabuleux ? A mon retour, il a fait remonter dans le temps mon corps. Jusqu'avant que je sois blessé en fait. Et voilà le travail ! Plus de trou dans le ventre, je respire, ce qui reste de mon organe cardiaque bat, et mes matières grises sont plus efficaces que jamais !
-... Tu es un monstre.
-Oui ! Immortel, qui plus est ! Nous pourrions vaincre Dialga nous-mêmes avec tout ce que nous avons accumulé ici en quinze ans !
-Et... Et pourquoi ne le feriez-vous pas ?
proposa Zorua.
-Ne soit pas idiot... C'est grâce à lui que nous avons obtenu tous ces pouvoirs. Je dois avouer que ça me plaît, la puissance.
-Je n'y crois pas...
souffla le petit pokémon.
-Vas-y. Pose-moi ta question. Je vois bien que tu en meures d'envie.
-Noctunoir... Tu étais reconnu de tous autrefois. Le grand et célèbre officier, toujours à la poursuite des criminels les plus endurcis. Pourquoi... Pourquoi t'être rangé de son côté ? Pourquoi être dans les rangs de Primal Dialga ?
-Ah... Nous y venons enfin. A moi de t'enseigner une petite leçon, mon bon Zorua. J'ai prêté allégeance à Dialga il y a longtemps. J'ai jugé que ce pokémon faisait tout pour le bien de notre monde. J'ai donc décidé de lui prêter ma force car il manquait d'un fidèle bras droit pour achever son œuvre.
-Son œuvre ?! Mais enfin, Noctunoir ! Tu ne vois pas qu'il n'est plus lui-même ?! Il a détruit le monde ! Comment peux-tu encore suivre les ordres de ce monstre ! Tu participes à un véritable génocide ! C'est ça, ta voie ?
-Mon bon Zorua, tu ne sais rien de la fidélité...
fit Noctunoir en soupirant. Maître Dialga est quelqu'un de bon, autant que toi, je te l'assure. Il a beaucoup changé ces derniers temps, peut-être en mal, mais alors quoi ? Je ne vais pas retourner ma veste comme ça, parce que mon opinion personnelle va à l'encontre de ma promesse. Regarde autour de toi. Tous les pokémons attachés sont ceux qui résistent. Tous ceux qui sont libres suivent Dialga. Pourquoi ? Mais parce qu'ils sont fidèles, qu'ils soient d'accord ou pas avec les objectifs et les pensées du maître. Si Dialga était un pokémon pourvues des pires intentions, alors on ne lui aurait pas confié le Temps.
-Et s'il était manipulé ? Tu y as pensé ?
-Evidemment, nous y avons tous pensé. Mais que pouvons nous y faire ? Dialga nous aime, nous ne sommes pas de simples soldats à sa botte. Jamais je ne me retournerai contre lui. Ne compte pas sur tes belles paroles pour me faire changer de bord. C'est comme si je te demandais de trahir Givrali ou Grimpal.
-Quoi ?! Grimpal est en vie ?!
s'écria Zorua.
Noctunoir recula d'un mètre, conscient de son erreur. Derrière lui, Givrali avait relevé la tête. Elle semblait avoir repris espoir. Noctunoir prit une grande inspiration pour se retenir d'éventrer Zorua. Il posa son énorme patte sur le petit pokémon attaché.
-Je ne te le répéterai une fois de plus, Givrali, commença-t-il en s'adressant à la femelle attachée à l'opposée de la pièce. Si tu ne me donnes pas ce que je veux, je tuerai Zorua.
-Jamais !
hurla-t-elle. Tu ne tueras pas Zorua, tu l'as dit toi-même il y a quelques minutes ! Tu croyais que je ne t'entendais pas ? Imbécile ! Maintenant que nous savons que Grimpal est en vie, nous savons qu'il y a encore une chance pour que nous soyons libérés ! Ne compte pas sur nous pour te donner nos différentes forces !
-Ah... Quelle situation regrettable. Je vais devoir aller te chercher la tête de ton pauvre amant pour que tu obtempères, c'est bien ça ? Soit, j'y vais.
-Qu-Quoi ?!
s'étrangla-t-elle, prise de cours. Attend ! Il y a forcément un autre moyen !
-Oui, il y en a un. Me donner ce que je t'ai demandé. Mais haussons la mise. Je veux que chacun des pokémons ici présents me donnent ce que je leur ai réclamé. Si l'un de vous refuse, alors j'irai cherché moi-même la tête de votre cher Grimpal !
Les prisonniers échangèrent des regards inquiets. Pijako, qui avait été replacé contre le mur, gardait la tête orientée vers le sol. "Non... Je ne peux pas le lui donner... Vous comprenez ? Avec ça... Noctunoir pourrait anéantir le monde à lui seul...". Grodoudou essaya de consoler Pijako de là où il était. Le partenaire de Pijako conservait une sacrée forme malgré le fait que la torture qu'il subissait était la plus intense de toutes. Au total, ils étaient tous les quatre. Les autres avaient disparus, sûrement tués après avoir donné ce que Spiritomb et Noctunoir demandaient. Noctunoir s'écarta discrètement pour laisser les prisonniers se concerter. Mais Zorua déjoua le piège de Noctunoir. "Arrêtez ! Il bluff ! Il ne peut pas capturer Grimpal ! Je suis sûr que c'est lui qui lui a causé ces blessures mortelles ! C'est pour ça que Grimpal n'est pas encore mort ! Ils sont incapables de l'avoir ! La seule explication, c'est qu'il ne soit pas seul ! Eh, eh, je suis sûr que Noctunoir a besoin de notre aide, sur ce coup-là.". Zorua réprima un ricanement lorsqu'il entendit Noctunoir pester. C'était une véritable guerre d'esprit qui venait d'éclater entre les deux ennemis. Chacun essayait de piéger l'autre, de lui faire dire des choses qu'il ne devrait pas. C'était le moment où il fallait gratter des informations. Et Zorua était plutôt bon à ce jeu.
-Continuons notre discussion, Noctunoir, j'insiste, lança fièrement Zorua, une lueur de défi dans les yeux.
-D'accord... Pose ta fichue question qu'on en finisse.
Ah ? Il se sent donc contraint à répondre ? Noctunoir est à court d'idée pour capturer Grimpal et les autres ! La seule chose qui lui reste, c'est nous ! Nous le tenons, j'en suis sûr ! Il suffirait juste que j'arrive à le tromper, et on sera dehors !
-Noctunoir... Comment avez-vous pu capturer Célébi ? Et surtout, comment est-elle repartie ?
-Eh bien... Nous n'avons pas capturé Célébi. Quelqu'un s'en est chargé pour nous. Il est... Indépendant de notre troupe, mais il est de notre côté. Il est pas spécialement fort, il a juste le bras long et certains pouvoirs que nous n'avons pas. Du moins, pas encore. Et... Célébi a réussi à fuir lorsque nous avons amené Pijako et Grodoudou ici. Tu vois ce gros balourd qui sert de maître de guilde, là-bas ? Il avait été sage jusqu'à ce qu'il aperçoive Célébi. Lors de leur capture, ils ne s'étaient même pas débattus. Et le fait de voir Célébi a provoqué un déclic chez lui. Grodoudou s'est énervé, la terre s'est mise à trembler, il était devenu incontrôlable. Il a fallu qu'on se mette tous sur lui pour réussir à le calmer et l'attacher. Célébi en a profité pour fuir. Depuis, Grodoudou est incroyablement calme. C'est étrange... Le plus fort pokémon présent ici, c'est lui. C'est aussi pour ça que nous... l'interrogeons.
-Eh...
-Oui ? Quoi encore ?
grommela Noctunoir.
-Vous êtes vraiment mauvais vous... Vous faire berner par le maître de guilde que vous convoitiez. Vous connaissiez sa force pourtant, mais vous vous êtes faits avoir.
-Ne me provoque pas. Je ne le dirai pas deux fois.
-Sinon quoi ? Tu vas me tuer ? Laisse moi rire. D'ailleurs, tu ne m'as pas expliqué précisément pourquoi tu me voulais en vie.
Noctunoir vint loger son poing à moins d'un centimètre du visage de Zorua dans un fracas surpuissant. Tout le monde tourna la tête vers les deux adversaires, faisant le silence dans la salle. Tous s'attendaient à voir Noctunoir étriper Zorua. Même ce dernier s'était figé d'horreur lorsqu'il avait senti le bras de Noctunoir lui ôter quelques poils. Noctunoir avait plongé son œil unique dans ceux du pokémon-renard. Il semblait réfléchir. Tout le monde retenait son souffle. Même Spiritomb s'était arrêté pour savourer la scène, persuadé que ça allait finir en bain de sang. Soudain, Noctunoir explosa de rire. Un rire sombre, un rire sinistre, n'augurant rien de bon. La peur avait envahi Zorua. La terreur avait remplacé son assurance. Il se sentit tout un coup si petit et si faible face à cet ancien héros et ce pokémon si puissant. C'est du bluff, c'est du bluff, c'est du bluff ! Il doit bluffer ! C'est nous qui l'avons piégé, pas lui ! Zorua tremblait de tous ses membres, sentant la sentence arriver. "Mon bon Zorua... je crois que ça y est... J'ai trouvé ce que je vais faire de toi. J'ai compris que personne ici ne me donnera ce que j'attend de vous, seul Zorua a été assez fou pour céder son pouvoir d'illusion. Mais maintenant que vous savez, vous ne direz plus rien, pas vrai ? Passons à autre chose... Et si... Et si je faisait en sorte de me débrouiller sans vos pouvoirs ? Mais c'est une bonne idée. Zorua, tu seras le meneur de la patrouille, le héros de l'histoire ! Et tu feras bien sûr un duo magnifique avec ta chère et tendre Givrali. J'en attend beaucoup de vous deux. Faites un effort, sinon... Eh bien, je pense qu'on assistera à un nouveau meurtre. Spiritomb, décroche-les pour que je leur explique comment les choses vont se passer. Je suis désolé mes petits mais les prochains jours qui vont venir ne seront pas vos meilleurs à vous."


Ouiiiiii un chapitre discussion comme je les déteste. J'aime pas. Ni à écrire ni à lire. Je sais pas si vous c'est votre truc, mais personnellement j'ai un peu de mal. Mais j'aime bien varier les styles d'écriture dans le roman. Et je pense que pour un chapitre isolé de l'histoire avec autant d'informations était le moment parfait pour essayer. J'espère que ça vous a plu.

Parlons peu, parlons chiffre. Mon livre vient de dépasser les 100.000 mots avec ce chapitre. Selon la moyenne des livres édités, 100.000 mots équivalent à 400 pages (soit 250 mots par pages). Oui c'est énorme. Et plus particulièrement lorsqu'on sait que je n'en suis qu'à la moitié du livre, peut-être même un peu moins... Surtout sachant que j'étoffe le scénario au fur et à mesure... Ce livre fera plus de deux fois la taille du précédent... Je ne sais pas quoi dire. Pour moi, c'est vraiment énorme, dans le sens génial, mais ça me fait un peu peur aussi... J'espère que l'oeuvre en général vous plaît encore tout autant. On est pas prêts d'en voir le bout encore, alors j'espère que vous êtes bien accrochés à vos chaises. N'hésitez pas à voter, commenter ou partager, à votre guise ! (Oui, ces petits messages sont très rares de ma part, mais on passe un cap important là, maintenant.)

Pokémon Donjon Mystère: Explorateurs du TempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant