XI - Abigail

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Assise sur mon canapé je soupire après avoir raccroché à madame Leknins, qu'est-ce qui m'a pris d'accepter de me rendre chez eux alors que... je viens de quitter leur fils ?
Comment vais-je réagir s'il est là ? Comment allons-nous réagir quand nos regards se croiseront ?
L'intensité de nos regards, ce baiser qu'il m'a donné, je ne sais absolument pas comment je vais réagir, ni même comment mon corps va réagir. Et je dois avouer que j'appréhende. Plus que tout.

Je décide alors de me lever et de passer dans ma chambre pour me changer. J'opte pour un haut plus classique, mais conserve mon jean. Je défais mes cheveux avant de donner un coup de brosse dans ceux-ci, défaisant les noeuds causés par le passage des mains de Robin.

Arrête de penser à lui.

J'essuie les dernières traces de maquillage sur mon visage, avant de me redonner un petit coup de poudre, il faut vraiment que je ne fasse aucun faux pas avec cette famille, bien que leur fils ne le laisse pas indifférente.

Il ne devrait pas avoir autant d'influence sur moi, sur mes réactions, sur mon corps. Je dois être maître de mes ressentis et je ne peux pas ressentir la moindre des choses à son égard, il est mon client.

J'ai embrassé un client.

Je passe nerveusement ma main sur mon visage, avant de soupirer à nouveau, quelle connerie n'ai-je pas fait...

Merde, merde, merde. Je dois absolument me reprendre.

D'autant plus que j'ai craqué.
Quand ses lèvres ont touché les miennes, j'ai pensé à lui. À nos souvenirs, à nos moments, à notre amour, avant que tout disparaît comme la fumée qu'on recrache quand on fume. Tout a volé en éclats, tout ça à cause de lui. Il était mon pilier, mon tout, et sa vie d'artiste en a décidé autrement. D'un côté je lui en veux, car j'aurais voulu que notre relation ne se termine pas ainsi, et d'un autre, je le remercie. Il m'a certes rendu faible, mais le soutient de mes parents m'a aidé à remonter la pente, et malgré mes rares moments de faiblesses je fais tout pour reprendre ce goût de la vie.

Je regarde rapidement mon téléphone pour voir le temps qu'il me reste avant de devoir me rendre chez les Leknins, avant d'attraper ma paire d'escarpins, ne pas faire de faux pas.
J'attrape mon sac à main et mes affaires ainsi que mon ordinateur portable pour pouvoir leur montrer les quelques photos que j'ai déjà dénichées pour le futur mariage de leur fils.

Vivement que tout ça se termine, je n'aurais plus rien à faire avec cette famille et ça sera certainement mieux...

**

Lorsque j'arrive devant la maison, mes mains sont humides, mon cœur bat plus rapidement, et un stress énorme monte en moi.

Soit naturel, et ne te laisse pas avoir par ses yeux verts.

Je toque à deux reprises, espérant que Robin soit aux abonnés absents.

S'il vous plaît, faite qu'il ne soit pas là, je répète plusieurs fois.

Malheureusement quand la porte s'ouvre, j'observe que mes prières ne sont pas exaucées.
Robin se trouve là, devant moi, uniquement vêtu d'un short de bain, les cheveux humides, une serviette autour des épaules avec quelques goûtes dégoulinant le long de ce magnifique corps. Des abdos sont tracés, et un V parfait prend place à la fin de son basin.

- Tu as besoin d'aide peut-être ? dit-il avec arrogance.

Automatiquement, je ravale ma salive et retrouve mon caractère de peste.
Il veut jouer, on va jouer. Et on verra qui gagnera !

- Non merci, j'ai connu mieux, je réponds en ancrant mes yeux dans les siens.

- Je ne te crois pas, réplique-t-il d'un air hautain.

- Pardonne-moi mais ce n'est pas toi que je suis venue voir, aurais-tu l'amabilité de me laisser rentrer ? Je crois que...

- Oh Abigail vous êtes là, s'exclame la voix de madame Leknins.

Contraint, Robin se décale et me laisse entrer sans pour autant laisser un espace suffisant pour que nos deux corps se frôlent et je frissonne.

Ne tombe pas dans le panneau Abigail, ne te laisse pas avoir par ce bel Apollon...

Je me mords nerveusement la lèvre avant de rejoindre madame Leknins qui me prend directement dans ses bras.
Surprise, je ne réponds pas à son étreinte directement, avant de finalement refermer mes bras autour de son corps.

- Et si on allait s'installer sur la terrasse ? dit-elle en se défaisant de mon étreinte.

- Je vous suis, je réponds en souriant.

- Robin, tu nous fais ta spécialité ? questionne sa mère.

- Compte sur moi, il me lance un clin d'œil et je déglutis devant cet Apollon.

Prétentieux !

Je sens le rouge commencer à me monter aux joues et détourne directement le regard, je le laisse alors dans le couloir, suivant sa mère. Elle nous fait passer par le salon dans lequel nous étions il y a quelques jours, continuant de remarquer la simplicité de ce logement malgré l'argent qui coule à flots. Malgré tout, l'intérieur de cette maison n'est pas aussi conséquent que l'extérieur, bien que certains objets de décorations on l'air d'avoir une certaine valeur.

Tandis que nous arrivons sur une terrasse plutôt bien agencée, le soleil commence à taper plus fort que tout a l'heure et je regrette le fait d'avoir changé mon haut.

Pourquoi ai-je fait ça moi aussi ?

J'aurais très bien pu garder mon débardeur.

C'est parce que madame voulait se faire belle pour monsieur, s'exclame ma conscience.

Non ! Non ! non ! et Non ! monsieur n'a rien à voir, c'est juste que je ne voulais pas débarquer en mode baba cool alors que cette famille à des moyens plus qu'élevés. Je ne me voyais pas arriver en tenue de ville, et de petite citadine.

Foutaise.

Je souris de manière involontaire en repensant au moment que nous avons échangé Robin et moi.
J'aurais voulu le gifler au moment où ses lèvres ont touché les miennes mais mon corps a réagi tout autrement, et je me suis mise à apprécier ça. Mais je ne peux pas. Je ne dois pas.
Je déroge à l'une de mes règles, certainement la plus importante. Je ne dois pas.

Tandis que nous prenons place sur la terrasse, monsieur revient accompagné par une cruche où des citrons débordent un peu.

De la citronnade.

Toujours le corps tors nu, Robin s'approche de nous avant de déposer le tout sur la table.

- J'espère que vous aimez la citronnade, dit la mère.

- Bien évidemment, réponds-je avec beaucoup trop de joie.

- Parfait ! ça va nous permettre de faire le point alors.

Elle sert alors le verre devant moi, avant de se retourner vers son fils.

- Tu restes avec nous ?

Étrangement, celui-ci se gratte la nuque nerveusement.

Est-ce que je le déstabilise autant qu'il le fait avec moi ?

- Euh non, je vais aller prendre ma douche, réplique le brun avant de partir en direction de la salle de bain.

Et nous voilà donc à deux, nous parlons un peu de tout avant de finalement évoquer le sujet principal, le mari Lenkins s'est joint à nous au moment même où j'allais présenter les différentes salles que j'ai repérées, et la lueur qui se trouve dans leurs yeux me permet de savoir que mon travail est à la hauteur de leurs attentes.

Et je dois avouer que je suis plutôt fière de moi.

Wedding GirlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant