Be Yourself (Chris)

Chapitre 30

KEITH

Lorsque j'ouvris les yeux, le dos dénudé de Chris bloquait entièrement ma vue. Je contemplai son corps s'élever et s'affaisser au rythme lent de sa respiration. Chris dormait encore profondément, et les rayons éblouissants du Soleil n'étaient pas près de le réveiller de sitôt.

Et je n'en fus pas étonné. En vérité, j'étais bien plus surpris de le voir enchainer toutes ces journées où il était occupé de l'aube jusque tard le soir. Il m'était même parfois arrivé de le trouver en train de travailler sur la commande d'un de ses clients ou sur son projet de fin d'année en plein milieu de la nuit. C'était un miracle qu'il tienne encore debout !

Il ne m'avait pourtant pas l'air très assidu aux premiers abords. Et cela s'était confirmé par la suite. Mais depuis quelque temps, ce fut comme s'il cherchait à se noyer dans le travail. Comme s'il cherchait constamment à être occupé. Ses amis m'ayant confié que c'était une chose qui lui arrivait de temps à autre, je ne m'en étais pas vraiment inquiété. Mais je continuais de craindre qu'il ne s'écroule d'épuisement. Ses nuits déjà plus ou moins agitées s'écourtaient de plus en plus. Alors de le voir dormir de la sorte me fit sourire. Aussi attendrissant était-il, je n'osai esquisser un mouvement vers lui de peur de lui couper le sommeil.

Je m'extirpai discrètement de ses draps et filai dans la salle de bain. Je venais tout juste de me rincer la bouche après m'être brosser les dents quand je sentis des paumes chaudes glisser sur mon ventre et des lèvres humides se poser sur ma nuque.

Son haleine chaude effleura ma peau alors qu'il marmonnait, sa bouche collée à mon cou. Je l'observai somnoler, amusé.

— Chris, soufflai-je tendrement. Si tu veux dormir, pourquoi ne pas être resté au lit ?

Il grogna mollement et resserra son étreinte autour de ma taille.

— Reviens te coucher avec moi ? bredouilla-t-il.

Je me retins de rire devant ses airs de chiot battu. Je n'aurais jamais imaginé jusqu'à il y a peu que Chris serait du genre affectueux. Il paraissait si réticent aux relations, à l'officialisation, je le voyais être le genre de copain froid, blessant, se contentant de quelques pauvres marques d'affection de temps à autre... Et j'avais malgré tout étais prêt à tenter le coup, à m'aventurer aveuglément dans cette relation incertaine qui aurait sans doute pu me détruire... Mais de sentir sa chaleur alors qu'il m'enlaçait m'assura encore une fois que j'avais fait le bon choix. J'ignorais ce que le futur nous réservait, et je n'étais pas si empressé de le savoir. Je me contentai de me focaliser sur l'instant présent.

Et présentement, Chris couvrait ma nuque de baisers, jusqu'à mon épaule, m'implorant de le suivre au lit.

— Aller, mon ange, souffla-t-il faiblement de sa voix rauque.
— Pourquoi tu insistes pour que je te rejoigne ? ricanai-je.
— Parce que je suis fatigué ?
— Alors va te coucher, rétorquai-je.
— Mais tu n'es pas là si j'y vais seul...

Il m'adressa une fausse moue boudeuse dans le miroir qui me tira un pouffement.

— J'ai des trucs à faire, Chris. Je ne peux pas passer ma journée à dormir avec toi, désolé, souris-je.
— Pas toute la journée. Je te demande juste une heure ou deux... Ou cinq... Ou six...
— Et pourquoi pas une demi-journée ?
— Si tu insistes, répliqua-t-il avec un sourire narquois, haussant une épaule.

Je levai les yeux au plafond puis me tournai pour lui faire face. Mes paumes sur ses joues, mes pouces caressèrent ses pommettes alors que je me perdis dans son regard gris que le sommeil avait adouci.

— Pour une fois que je suis assez libre pour passer du temps avec toi, tu refuses, se plaignit-il.
— Et pour une fois que c'est moi qui suis occupé, tu refuses de me laisser faire ce que j'ai à faire, rétorquai-je.