Be Yourself (Chris)

Chapitre 20

Lorsque je passai la porte, Chris avait les yeux grands ouverts. Il fixait le plafond, l'air hagard.

— Chris ? susurrai-je, incrédule.

Sa tête pivota lentement vers moi alors que je m'empressai de m'approcher.

— Keith ? Qu'est-ce... commença-t-il d'une voix rauque, avant de déglutir péniblement.
— Sh...

Je caressai sa joue, au bord des larmes. Je le vis soupirer lourdement, les paupières closes, sa tête reposant sur ma paume.

— Tu nous as fichu une de ces peurs, ris-je, avant d'éclater en sanglots aussitôt.

Il se contenta d'un fin sourire puis glissa sa main jusqu'à mon poignet pour le caresser faiblement de son pouce.

CHRIS

Je m'étais réveillé avec le corps lourd, l'esprit embrumé. J'avais très vite compris que la poche de liquide transparent au-dessus de ma tête m'empêchait de crier de douleur. Mes yeux s'étaient ouverts depuis maintenant plusieurs heures. Une infirmière était passée enlever mon masque et le remplacer par une canule nasale. Et bien que l'objet m'eût été infiniment désagréable, je n'eus pas la force de l'arranger ou ne serait-ce que de m'en plaindre. Je regardais autour de moi, sans rien n'avoir d'autre à faire. Somnolant de temps en temps.

Et alors que je m'attendais à passer les prochaines minutes comme les précédentes, j'entendis la porte s'ouvrir doucement. Je ne pris pas la peine de regarder qui entrait, persuadé qu'il s'agissait encore d'une infirmière ou d'un médecin.

— Chris ?

Il me fallut un temps pour saisir à qui appartenait cette voix à peine soufflée. Je tournai la tête pour voir Keith approcher hâtivement. Combien de temps étais-je resté dans cet état pour qu'il arbore une mine aussi déconfite ?

— Keith ? Qu'est-ce...

Incapable de poursuivre tant ma gorge était sèche, je déglutis douloureusement.

J'ignorais combien d'heures étaient passées, peut-être un ou deux jours à tout casser mais je savais que mon état n'était pas préoccupant au point que ce passionné de photo n'aille pas en cours de bon matin, et risque sa bourse... D'accord, peut-être que si. Je me voyais encore très clairement ne pas rouler sur la bonne voie et foncer dans ce véhicule ; j'avais cru vivre mes derniers instants, et au vu de mes pansements sur le visage et bandages sur mon corps, ma vie avait certainement faillis s'écourter.

Il caressa ma joue, et je retenais un râle de ne pas pouvoir le tirer afin de le serrer dans mes bras. Je n'avais peut-être pas senti le temps défiler mais je savais qu'il s'en était fallu de peu pour que je n'aie plus l'occasion de le voir. Mon visage dans sa paume, je profitais de son contact quand une infirmière entra pour la énième fois depuis mon réveil. Elle nous observa, attendrie devant ce qu'il passait sous ses yeux. Je lui fis signe que j'avais besoin de boire.

— Attends, j'y vais, se proposa aussitôt Keith.

Je le retins alors faiblement. Sa main me glissa légèrement entre les doigts mais sentant ma réticence à le lâcher, il se résigna et laissa l'infirmière me ramener un verre d'eau. Je la remerciai d'un hochement de tête et le bus d'une traite. Je le descendis si vite que je finis par tousser en avalant de travers.

— Comment vous sentez-vous ? m'interrogea-t-elle.

Je ne pus retenir une grimace.

— Dégueulasse, marmonnai-je. J'ai besoin d'une douche et j'ai envie de pisser.

Mon honnêteté les fit rire mais je ne pus me joindre à leur bonne humeur tant j'étais mal à l'aise. Je n'avais pas pris de douche depuis plusieurs jours ; je sentais la transpiration et le désinfectant. Ma peau était poisseuse et mes cheveux gras. Ma bouche pâteuse. Et des tuyaux remplissaient mes orifices parce que j'étais dans l'incapacité de me lever pour aller ne serait-ce qu'uriner. J'étais au plus mal. Me sentir sale faisait parti des sensations que je supportais le moins ; souffrir de mes blessures m'aurait été bien plus agréable.