Sortir...

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Je brûle.

J'ai froid.

Je brûle.

Je respire. Je vis, je pense, je bouge, je sens. Je suis vivante.

Je brûle.

Ma bouche est sèche, au point que mes tentatives de déglutition sont douloureuses.

Je me sens... ni bien, ni vraiment mal. Je me sens bizarre.

L'air est lourd, épais. J'ai froid, si froid. Je tremble, mon corps est nu. Je ne sens que le contact du plastique dur, sous moi.

Je brûle.
J'ai froid.
Si froid.

Mon souffle est laborieux, l'air est épais, m'écrase. J'ai peur.

Mon corps brûle. Je dégage une chaleur à peine supportable pour contrer les épines de glaces qui m'assaillent, tentent de me rendormir à jamais.
Mais je suis revenue, je suis réveillée.

Couchée sur le dos, dans le noir, je tente de me relever, pour me cogner aussitôt. Le plafond est bien trop bas, j'en trace les contours de mes doigts tremblants. Il est froid, si froid que ma chair y reste presque collée.
Je suis dans une boite, longue et étroite, une boite de métal qui me coupe de la lumière, de l'extérieur.

L'air est lourd, je n'en peux plus. Je veux sortir.
Je suis vivante, je dois sortir.

Je me recouche, en chien de fusil, pour arrêter de rentrer dans ces parois qui m'oppressent.
J'apaise mon esprit, les yeux fermés, utilisant des techniques de méditations que m'a appris mon père.

Fixant de nouveau le noir, je réfléchis. Je suis vivante, et lasse. Je soupire. La mort aurait -à sa façon- réglé mes problèmes. Ma course après des ombres se serait arrêté, mon âme aurait pu s'extirper du cercle de haine dans lequel je l'ai empêtré.
Je suis lasse. Personne ne m'attend dehors, seules les traces de mes parents, l'étreinte de la solitude. Mon seul but est de faire payer leurs assassins. Inconsciemment, je souhaitais mourir plutôt que de survivre à ce plan bancal.

A présent, quitte à être en vie, autant mener mes projets à terme.

Ma formation de chaperon refait surface. Si tout s'est déroulé comme prévu, je suis au nord de Clermont-Ferrand, dans une base souterraine située près un réservoir d'altitude de conduites forcées . Je dois en sortir sans être repérée par qui que ce soit et, au mieux, faire disparaitre toute trace de mon présumé cadavre de la façon la plus adéquate possible.

Le froid devient de plus en plus désagréable, je me tourne sur le ventre.
Quelque chose heurte la table. Clac! Je porte la main à mon cou, je suis équipée d'un collier de plastique, autour duquel pend une carte... et une petite boite. Je la lâche après examen tactile, et me glisse à l'extrémité du caisson. Contrairement aux autres faces, ce mur sonnait creux lorsque je le heurtais.
A gauche, je sens une protubérance de métal, la protection du système de verrouillage de ma cage gelée.

J'effleure mon poignet. Un serpent que je connais bien s'y agite, les mailles du bandeau se détachent de ma peau. Je le cherche à tâtonnement, m'en saisis, le pose fébrilement sur mon visage.

Il s'accroche, les pierres appuient sur mes yeux et mes oreilles. Mon regard perce alors les remparts de l'obscurité et des murs, il part à la recherche d'êtres vivants. Les premières silhouettes que je discerne sont séparées de moi par plusieurs dizaines de mètres, et pour la plupart se situent sur des niveaux inférieurs. A quelle profondeur suis-je? Je lève la tête, mon détecteur se heurte à une masse insondable. Il n'y a pas d'étage supérieur ici, pas plus que de sortie. Je me mords la lèvre, où se situe donc la plus proche?

Ira IraeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant