Elle gémissait à fendre l'âme, ses membres frémissaient de désespoir. Son corps tentait à tous prix d'échapper à la torture. Elle luttait depuis plus d'une demi-heure dans les draps, impuissante. Des spasmes l'agitaient, la sueur plaquait ses cheveux bruns à son front.
Lui, la maintenait fermement, une main appuyée sur sa bouche pour étouffer ses cris d'agonie.L'homme tenait de tout son poids sur elle, il s'efforçait de la rendre immobile et silencieuse, la victime ne voyait malheureusement pas les choses de la même façon.
Leur combat durait, durait... ils avaient peur, peur de ce mal invisible contre lequel ils ne semblaient rien pouvoir faire, peur que la jeune fille dormant juste de l'autre côté de la cloison ne se réveille et, inquiétée par le bruit, ne vienne les trouver dans cet état.
Ils ne pouvaient que se taire, continuer le siège, et attendre. Attendre que l'ennemi ne se lasse et leur laisse un répit, ou qu'il fasse une percée décisive, définitive. Et dans ce cas...
La crise se prolongeait anormalement, la marée ne voulait pas redescendre, mais persistait, jusqu'à les noyer. La souffrante retenait courageusement ses larmes, il lui avait fourni un morceau de bois où mordre, pour qu'elle ne se déchiquète plus les joues et la langue. Il avait dû poser sa paume par dessus. Obligé d'y imprimer tant de force, il pouvait presque sentir le bleu qui fleurissait sous ses doigts. Inconsciemment, il fuyait son regard, à la fois douloureux et empreint d'un mental de fer qu'il se savait ne pas posséder. Il ne pouvait rien faire, juste espérer et attendre. Elle ne pouvait rien faire, juste encaisser, et attendre.
Enfin, la tension dans le corps de la femme commença à se relâcher. Les épines de douleurs plantées dans ses chairs se retirèrent une à une, la laissant vidée, épuisée. Son compagnon n'était en guère meilleure condition. Haletant, il s'écarta d'elle et écrasa son visage dans son oreiller.
Le silence les enveloppa comme un linceul, le temps s'écoula ainsi, leur souffle ralentissant peu à peu. Leur immense fatigue ne parvint pas à les assommer. Ils demeurèrent couchés, les yeux grands ouverts, tournant le dos à l'autre, jusqu'à l'aube.
Sa silhouette tremblante se hissa la première, il la suivit de près. Leurs yeux se croisèrent, on y lisait tout le désarroi du monde, et la résignation des condamnés qui comptent les marches de l'échafaud.
- Rani. A ce rythme, je n'en ai plus pour longtemps.
Il déglutit, les poings serrés, ne put enchainer que sur une plaisanterie.
- Eh bien. Ce n'est pas le genre de sport nocturne que j'espérais dans un lit conjugal. J'ai l'impression de ressortir d'un combat à mains nus contre une brute épaisse.
Elle esquisse un sourire.
- Heureusement que notre petite fille a hérité du sommeil de plomb de sa mère. N'est-ce pas?
Il veut répliquer, mais se ravise. Il n'est pas temps de se chamailler sur des détails démoralisants. Il s'empare d'un pantalon et d'une veste.
- Je dois aller faire mon compte rendu à l'hôpital aujourd'hui. Mais nous avons laisser les échantillons d'hier en incubation. Je passe au labo maintenant, j'en profite pour ramener quelques herbes.
- Ne te surmène pas, un miracle ne nous tombera pas du ciel aujourd'hui Rani. Ne t'en fais pas pour moi, les choses suivront leur cours. Et je n'ai pas dit mon dernier mot.
Il finit de s'habiller et l'embrasse sur le front.
- J'ai l'espoir. Qui sait? Ce soir nous pourrions faire une grande découverte. Je sais trop bien que personne ne résiste longtemps à Tanja Lisica. Ce poison ne fera pas exception.
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Ira Irae
FanficLa Colère et son Poison cruel me rongent jour et nuit... Les réalités se confondent, mon esprit s'y perd, je ne distingue plus le vrai du faux, l'ami de l'ennemi. Je me méfie de tout, en particulier de moi-même. La fureur monte, elle me torture tel...