Parenthèse

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Le sommeil se propose, juste sous mes paupières. Je le repousse mollement.

Il sera bientôt trois heure.

Sous la porte, je vois toujours un fin rai de lumière qui apporte avec lui les rires, les conversations et les bruits de verres qui s'entrechoquent.

J'en suis loin, j'écoute les murmures familiers du Poison, qui palpite dans mes veines. Le monstre est réveillé mais je peux à peine sentir sourdre sa haine. Elle me traverse comme un brouillard.
Je suis dans un état second, peut-être dû à la fatigue, sans doute causé par les interventions répétées du pouvoir de Léo.
Assomée, je n'oppose aucune résistance à mon mal. Ce dernier se heurte aux frontières cotonneuses de ma léthargie. Il est présent, mais n'articule que des cris muets, estompés.

Lorsque nous avons débarqué dans le joyeux brouhaha de l'appartement, je me suis faite toute petite, échangeant de simples politesses avec ces gens que je fuyais du regard.

C'était si simple de faire abstraction de tout... certes mon apparence attirait des regards, parfois tant que les joues m'en démangeaient, mais je passais outre avec facilité, parce que la thérapie du lézard m'avait envoyer sur un petit nuage.
Je n'avais d'attention que pour mon assiette et le poison qui s'agitait étrangement, bien qu'en vain.

Une heure et demi plus tard, soit juste ce que dura le repas proprement dit, j'allai me coucher. Je n'avais pas besoin d'excuse, je tenais encore moins debout que le grand homme noir du groupe qui avait franchi le seuil tanguant déjà comme un bateau ivre.

Un carré jaune se détache en face de moi, la porte s'ouvre puis se referme sur une ombre de bon gabarit.
Il tente de se faire aussi discret que possible, trébuche en faisant le tour du lit -sur le sac que j'ai laissé en travers- puis retire simplement son jean pour s'installer sur le matelas étroit. J'ai beau m'être mise au bord, ce n'est pas une mince affaire pour lui de s'y caler.
La légère odeur de bière et de tabac dont l'ont imprégné ses petits camarades n'est pas assez forte pour m'indisposer.
Il souffle un coup dans le noir, je m'adresse à lui avant qu'il ne cherche le sommeil.

- Je ne dors pas.

- Avec le boucan que je viens de faire ça m'aurait étonner.

- Même avant. Dis, tu n'étais pas censé aller dans la chambre d'en face?

- Ça te gène que je sois là?

Ça m'est égal :

- J'ai l'habitude, et c'est mieux pour mes crises au cas où. Mais ce n'est pas la question : le lit est tout petit.

Il m'attire vers le centre, et se dispose pour que nous soyons dos à dos.

- Il est tard. Il faut qu'on se repose.

Les voix se rapprochent dans le couloir, ils échangent des au revoir bruyants avec le membre de la bande qui rentre chez lui. Les six fêtards restants s'éparpillent en bayant une fois Alexandre partit.

Quelques minutes plus tard, deux personnes font glisser leurs pieds nus sur le parquet, ils s'interpellent en chuchotant, juste derrière le battant.

- Killian!

- Quoi?

- Échange avec moi.

- Hein?

- T'es le copain de ma sœur ça me fait mal de te piquer ta place. Je dors ici, c'est pas gênant.

- OK Chloé mais...

- T'inquiète, Léo s'en fiche.

- Si tu le dis.

Ira IraeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant