Chapitre 26

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Elsa avançait. Avec un seul but, un seul objectif en tête : retrouver sa fille. Et faire payer à la garce qui venait de l'enlever, accessoirement. Dans un coin de sa tête, Sylvi jurait comme une charretière, insultant Lorelei de noms qui auraient fait rougir Elsa si elle avait été dans son état normal. Mais elle ne l'était pas, aussi ne releva-t-elle pas.

La trace de Lorelei avait été assez facile à suivre : partout où elle passait, les hommes disparaissaient, et les femmes se tordaient les mains de désespoir. Elsa ne leur avait pas adressé la parole, s'était contentée de suivre son chemin. Mais certaines, comme mûes par l'instinct, s'étaient élancées à sa suite.

Elle avait vaguement conscience que sous ses pieds, le sol gelait, et que loin dans l'espace, le dôme qui protégeait Asgard devait être en train de trembler. Elle ne s'en formalisait pas. Evvie était au centre de ses préoccupations, comme jamais auparavant. Triste à dire en soi, mais Elsa laissait cela de côté. La priorité était de la retrouver, puis elle pleurerait sur ce qu'elle avait manqué dans les premières années de la vie de sa fille.

Enfin, une infime partie d'elle rageait encore contre Loki. Cet imbécile, fourbe et menteur qu'il était, avait encore trahi sa confiance.

– Pas réellement. Il ne t'avait rien promis, et tu n'attendais rien de lui...

Elsa grimaça, s'arrêta brusquement. Sylvi venait de répondre à ses plaintes silencieuses, et la réponse ne lui plaisait pas réellement.

– Elsa ?

La blonde se rendit compte que, instinctivement, elle s'était barricadée, dressant une barrière entre elle et son armure. Elle avait appris à faire ça quelques années auparavant, pour s'isoler.

– Désolée.

– La réponse ne te plaît peut-être pas parce qu'elle ne reflète pas la vérité.

Immédiatement, le réflexe d'Elsa fut de fuir. Fuir la voix de la raison, de la vérité. Sylvi le sentit, la coupa avant qu'elle n'ait le temps de le faire.

– Tu dois arrêter de fuir. Fais face. Pas comme lui.

Elsa tressaillit. Fuir, se cacher, en soi, ne lui posait pas vraiment problème. Elle l'avait fait toute sa vie. En revanche, être assimilée à Loki pour ces mêmes raisons la dérangeait. Parce que c'était exactement ce qu'elle lui avait reproché.

– Je ne fuis pas, asséna-t-elle, raide.

– Ce n'est pas l'impression que tu donnes.

Sylvi avait cette voix froide et impersonnelle qu'elle n'employait que rarement à l'égard de sa porteuse. Elsa ne l'avait entendue que deux ou trois fois, à des occasions vraiment particulières. Et, comme les fois précédentes, l'armure ne s'arrêta pas là.

– Le pire, c'est que tu sais que tu te mens, et ça te blesse encore plus.

Sur cette réplique, Sylvi se retira dans « son » coin. Elsa frissonna. Et ce n'était pas dû au froid ambiant.

§.§.§.§.§.§

Anna retourna voir Kristoff en fin de matinée. Elle était déjà passée vers huit heures, lorsqu'on lui avait annoncé qu'il était réveillé. Puis à dix heures, parce qu'elle avait une pause. Puis, maintenant, alors que les cloches de la ville allaient sonner midi.

Le blond sourit en la voyant entrer. Il s'était adossé au chevet du lit, entouré par une dizaine de coussins. Olaf veillait à côté de lui, tout en jouant avec sa carotte. Il avait fini par comprendre que Kristoff ne pourrait pas sortir du lit lorsqu'il le lui avait demandé pour la quinzième fois de la journée, et semblait s'être résigné à la situation. Pour autant, il n'avait pas abandonné l'idée de s'amuser. En ce moment même, il jouait avec une théière remplie d'eau brûlante, s'amusant à passer sa main au-dessus, regardant les flocons de son nuage fondre immédiatement. Anna le salua joyeusement, puis fila s'installer à côté de son mari.

Les Ténèbres dans nos Cœurs / Partie 2 : Beyond all known realmsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant