Les tribulations d'une femme blessée. Part 1

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C'était le grand jour. Julie avait pris la grande et immense décision d'aller se déclarer aujourd'hui même à Ezarel. Oh elle en avait mis du temps avant de passer le cap. Mais il fallait se rendre à l'évidence : elle était amoureuse.

Au tout début, il ne s'agissait que d'une gentille curiosité, rien de bien fou. Puis ça avait vite dégénéré. De la curiosité, elle était passé au besoin d'être au courant de ce qu'il faisait, d'où il était, elle guettait sa présence, espérant le croiser dans les couloirs du château ou s'arrangeant pour se trouver sur son chemin, mine de rien. Elle avait ce désir irrépressible d'être près de lui, de rire exagérément fort lorsqu'il n'était pas loin, pour attirer son attention.
Lorsqu'il passait près d'elle, son cœur battait avec force, menaçant de sortir de sa poitrine. Quand il lui adressait un sourire, elle croyait défaillir sur place, et lorsqu'il la frôlait, elle n'était pas loin de la crise de spasmophilie. Qui aurait cru qu'elle tomberait si facilement sous son charme ? Elle avait essayé pourtant de contenir ses sentiments. Elle n'était à Eldarya que depuis un an, et pourtant, cet Elfe la rendait folle. Elle avait l'impression de redevenir une enfant lorsqu'il était près d'elle. Elle bafouillait, rougissait, tombait aussi, très souvent d'ailleurs, se prenant les pieds dans des obstacles invisibles, cassait des objets sans faire exprès. En bref, elle avait l'air d'une idiote. Mais qu'y pouvait-elle ? L'amour n'était pas sensé rendre intelligent.

Elle découvrait des sensations nouvelles tous les jours, de nouvelles émotions, s'amusait à s'imaginer des scénarios rocambolesques et tous tirés par les cheveux. Elle s'était confié à Ykhar dans l'espoir d'avoir un point de vue extérieur car elle se sentait ridicule à espérer quoi que ce soit de lui.

- Mais non, tu n'as pas l'air idiote, l'avait gentiment rassurée la lapine. D'ailleurs, je suis sûre qu'il ne s'est rendu compte de rien.
- Tu crois ? gémit Julie. Pourtant, j'ai l'air tellement...potiche !

Ykhar riait à gorge déployée, ne tenant pas compte du regard désespéré de son amie.

- Pourquoi tu ne le lui dis pas, tout simplement ?
- Mais parce-que...tu es folle ? Enfin, Ezarel s'en fiche pas mal de moi, soupira Julie.
- Mmmh. J'en suis pas si sûre. Ou alors, essaye de te rapprocher de lui, histoire de tâter le terrain. Rend toi indispensable!


Et c'est ainsi que Julie avait suivi les conseils d'Ykhar. Elle s'arrangeait pour se trouver sur son chemin, mine de rien, allait le voir pour se faire conseiller sur tel ou tel livre. Elle avait même poussé le vice jusqu'à l'ignorer de temps en temps pour parler exclusivement à d'autres hommes à qui elle savait qu'elle plaisait, juste pour guetter la réaction d'Ezarel. Ykhar lui avait assuré qu'il la regardait souvent, et c'était vrai.
Avec satisfaction, Julie avait reprit confiance en elle, et se sentait moins lourdaude qu'au début, malgré quelques maladresses constantes. Elle sentait le regard océan de l'elfe fixé sur sa nuque lorsqu'elle tournait des talons, elle le voyait la surveiller du coin de l'œil lorsqu'elle mangeait avec d'autres recrues et qu'elle s'esclaffait à quelques blagues stupides d'un garçon. Elle avait l'étrange impression que les rôles s'étaient inversés, et elle se félicitait pour cela : elle avait l'impression de mener le "jeu" de séduction. Mais Julie ne restait néanmoins qu'une grande enfant innocente, et le côté candide et pur des émotions trop fortes pour être contenues reprirent vite le dessus. Seulement, elle avait aussi très peur. Ezarel était déjà un homme, un bel homme, et Julie...Julie sortait de l'adolescence. Du haut de ses 21 ans, elle n'était pas encore au stade femme-fatale, ni femme tout court d'ailleurs. Elle s'asseyait encore en tailleur sur ses chaises, ou s'installait nonchalamment sur les tables (ce qui avait le don de rendre fou Ezarel d'ailleurs). Elle ne croisait jamais ses jambes de façon distinguée, ne faisait pas particulièrement attention à sa façon de parler bien qu'elle n'ai jamais été grossière, était capable d'éclater de rire pour la moindre boutade, était au bord de l'asphyxie quand Chrome lui faisait des chatouilles...chose qu'une femme n'aurait jamais fait. Une femme qui se fait chatouiller se contente de fusiller du regard le malappris qui la touche sans esquisser l'ombre d'un sourire.
Aussi, se décourageait-elle assez souvent. Lorsqu'elle voyait une femme aussi belle et distinguée qu'Eleweïn, elle se disait qu'elle faisait tout de même pâle figure. Pourtant, elle se plaisait à croire les autres lorsqu'ils lui disaient qu'un lien invisible les liaient tous les deux, une complicité silencieuse, comme quelque chose de caché, un secret. Nevra avait même avoué n'avoir jamais vu l'elfe aussi heureux que lorsqu'elle était dans les parages.

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