Je ne suis pas du genre trouillard. J'aime l'aventure, les sensations fortes et même le danger et le risque quand je suis en forme.
Mais là, alors que je m'aventurais dans le large et sombre boyau, je commençais à me dire que si je sortais vivant de cette affaire, je prêterais plus attention aux petits bonheur de la vie. Comme respirer l'air frais, profiter du soleil, embrasser à nouveau Loana...
Je m'arrêtai net. Je n'arrivais pas à croire que j'avais pensé une chose pareille. Mais en même temps, j'étais sincère. La Ténébreuse me manquait et j'avais vraiment peur pour elle. Je ne cessais de me dire que si elle avait survécu et que je la retrouvais, je ne manquerais pas de lui montrer à quel point je m'étais inquiété.
Même si je ne savais pas comment j'allais m'y prendre. Pas encore.
Je marchais depuis un moment maintenant, scrutant sans relâche les berges et même le milieu de la rivière, mais il n'y avait rien à signaler.
Jusqu'à ce qu'un courant d'air me fasse trébucher et qu'une chose passât au-dessus de moi en volant à une vitesse telle que je n'eus le temps d'apercevoir qu'un bout de queue fourchue.
Je restai tétanisé par la peur pendant plusieurs minutes, scrutant tous les recoins de la grotte avec ma lanterne dans l'attente de voir cette chose revenir. Mais les secondes s'égrenèrent sans que le moindre bruit ne me fasse tressaillirent. J'hésitais à faire demi-tour. Peu importe ce qui m'avait survolé, je n'avais pas vraiment envie de faire sa connaissance. Mais je devais retrouver Loana, et pour cela aller le plus loin possible dans cette artère. Alors, tout en restant sur mes gardes, je repris ma progression vers l'avant.
Alors que je commençais à désespérer, je vis une forme sur la berge opposée, immobile mais bien là. Plein d'espoir je tentai d'éclairer cette partie avec ma lanterne, mais j'en étais séparé d'au moins quinze pas et même la lueur de ma lampe à huile n'arrivait pas à percer les ténèbres.
Je n'avais pas vraiment envie de m'enfoncer dans la rivière opaque, bien que calme. Je ne savais pas ce qu'elle renfermait, je ne savais pas si elle était profonde, si les courants étaient forts. Je n'osais pas non plus appeler. Le silence qui régnait dans ce boyau ne tolérait pas d'être brisé. Seul le bruit de l'eau qui clapote contre les berges et le lointain son de la cascade pouvaient être entendus et je n'avais pas envie que ma voix s'ajoute à la liste.
Je levai les yeux au ciel. Si je retrouvais Loana, j'allais lui souffler dans les bronches.
Tout en grimaçant, je plongeai un pied dans l'eau noire et cherchai à tâtons un endroit stable ou le poser. Je finis par palper le sol rocailleux et m'avançai avec prudence vers le milieu de la rivière. Je ne regardais pas en direction de la forme vers laquelle je m'avançais. J'étais trop occupé à ne pas me laisser emporter par le courant et à mettre un pied devant l'autre sans tomber dans un trou.
Mais alors que j'avais de l'eau jusqu'au nombril et que je sentais enfin la pente remonter, je décidai de jeter un coup d'œil à mon objectif. Levant le bras qui tenait la lanterne devant moi, je plissai les yeux pour essayer d'en distinguer les contours.
J'en lâchai presque ma torche. Ce n'était pas Loana, loin s'en faut, mais un des quatre jargs qui nous avaient attaqué. Je ne savais même pas comment j'avais pu le confondre avec mon amie. Il était bien cinq fois plus imposant qu'elle. Je pense que de loin je n'avais vu qu'une partie de son énorme corps. Je ne voyais pas d'autre solution.
En attendant, j'étais bien embêté. J'étais presque arrivé à son niveau et, même s'il ne bougeait pas, je n'étais pas rassuré à l'idée de m'approcher de cette chose. Surtout que je n'étais pas en position de force.
Malgré cela, j'étais curieux. Cette créature était-elle vraiment morte ? la réaction la plus prudente aurait bien sûr été de reculer lentement et de faire demi-tour. Mais une fascination étrange s'était emparée de moi et j'avais envie d'en voir davantage.
Je m'approchai le plus silencieusement possible, ma main libre sur le pommeau de mon épée. Je me hissai sur le rebord et me penchai sur le corps inerte du monstre. Il n'avait pas l'air de respirer.
J'avais envie de le repousser du pied pour vérifier qu'il était bien mort mais je n'étais pas sûr que ce soit vraiment raisonnable. Même s'il avait l'air aussi mort qu'on puisse l'être, ces bêtes semblaient être des créatures vicieuses et cruelles. Cela ne m'aurait pas étonné qu'elle feigne le trépas.
Comme je n'avais pas les moyens de lui donner un coup d'épée (la partie de son anatomie qui était vulnérable était sous lui et je ne voulais ni le toucher pour le retourner, ni essayer de lui asséner un coup à un autre endroit), je décidai de reculer lentement et de retourner sur mon côté de la berge.
J'y parvins sans difficulté. Mais alors que je reprenais ma progression vers l'avant, un remous sur ma droite attira mon attention. J'éclairai la partie qui avait bougé et me figeai. L'ombre du jarg de l'autre côté de la rivière avait disparu.
Je me collai immédiatement contre la paroi et dégainai mon sabre. Il y avait des bulles qui remontaient à la surface, juste devant moi. Et quelque chose me disait que ce n'était pas un phénomène naturel.
Sans attendre plus longtemps, je me mis à courir droit devant moi, m'enfonçant toujours plus vers le fond du boyau. Je ne savais pas si j'arriverais à terrasser le monstre s'il m'attaquait. Tout ce que je savais c'est que je n'avais pas envie d'essayer.
Ma lanterne faisait des ombres dansantes sur les murs. Je commençais à perdre mon souffle. Je n'osais pas me retourner, de peur de me rendre compte que j'étais poursuivi.
Je finis par arriver dans une grotte immense et luxuriante. Il y avait des plantes étranges qui occupaient tout l'espace. Ce n'était pas vraiment des arbres, mais des hauts arbustes très verts et très humides, avec d'énormes feuilles. Il y avait aussi des plantes grimpantes et des lianes un peu partout et il régnait une atmosphère humide et étouffante.
Je me rendis tout à coup compte que je n'avais plus besoin de ma lanterne. Il y avait un énorme cratère au-dessus de moi et la lumière du soleil pénétrait largement dans la cavité. D'où la luxuriance de l'endroit. Il y avait des petites cascades qui dégringolaient sur les parois de la roche.
Je décidai que c'était un bon endroit pour me cacher et m'aventurai dans cette étrange forêt. Je ne pensais plus vraiment à Loana à ce moment là mais plutôt au jarg qui me poursuivait.
Alors que je me frayais un chemin parmi les plantes envahissantes, une nuée d'oiseaux de toutes les couleurs s'envola pour aller se poser un peu plus loin. Je ne leur accordait pas une grande attention, tout occupé que j'étais à rester silencieux et discret. J'espérai juste que leur envolée ne révèlerai pas ma présence.
Je finis par trouver un fourré qui formait une sorte de tente et me glissai dessous. Je me positionnai de telle sorte à pouvoir me défendre au cas où l'animal me retrouverai et attendis, le cœur battant.
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Entre Ténèbres et Lumière {en cours de correction}
FantasyAnkan. Lancast. Terre de Lumière, et Territoire des Ténèbres. Depuis des générations les Kyrls et les Largs se vouent une haine implacable. Chacun vit dans un monde différent, où règne pour l'un le soleil, et pour l'autre la nuit éternelle. Pour le...