Chapitre 31

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-Oui, le sort semble s'acharner contre nous, murmurai-je avec un petit sourire triste.
- Mais... enfin... Sans vouloir te forcer à m'en parler... De ton côté ?
- De mon côté, le fait que cela soit réciproque, d'après toi mais je te fais confiance, me remplit de joie, de tristesse et de regrets. Ça répond à ta question ? fis-je en le regardant dans les yeux.
Il hocha lentement de la tête et prit une voix douce :
- J'aimerai te dire d'y aller, de foncer mais je sais ce que c'est de perdre son amour. Je ne veux pas lui faire subir ça, tu comprend ?
J'acquiesçai en pinçant les lèvres.
- Pas un mot à Anor ?
- Pas un mot à Anor, confirma le jeune homme.

D'ailleurs, ce dernier arriva dans la pièce, un sourire forcé sur ses lèvres.
- Alors, de quoi discutiez-vous ? dit-il avec un ton faussement enjoué.
Je rougis immédiatement. Je bégayai, je n'avais jamais été douée pour mentir. Heureusement, Morno rattrapa le coup en déclarant d'un ton assuré et nonchalant :
- Juste de votre périple. Les pouvoirs de ton amie sont assez impressionnants, en passant.
- Ouais. J'aimerais bien te les montrer, mais il faut qu'elle préserve son Angol pour demain, rit Anor.
-Faites comme si je n'étais pas là, soupirai-je en faisant mine de bouder.

Anor s'approcha et s'assit à mes côtés en passant son bras autour de ma taille. Je me raidis, peu habituée à ce genre de contact.

- Ne fais pas ta gamine ! Bon, quand est-ce qu'on mange ?
- Toujours le même, soupira notre hôte. Venez, passons à table.

Lorsque je me retrouvai devant une assiette de légumes plus dégoûtants les uns que les autres, je ne pus m'empêcher de grimacer.
- Sérieusement ?
- Pour tes forces, princesse, me répondit mon ami avec un rictus.
-  Ça aurait pas pu être le chocolat, ou je ne sais pas moi ! Un truc plus appétissant que des endives et des courgettes ! râlai-je en pointant ma fourchette en direction de mon plat.
Morno me répondit avec un sourire taquin.
- Non. maintenant, tais-toi et mange !
Je fis la moue, et avala avec peine mon repas.
- C'est peut-être mon dernier dîner et je ne peux pas en profiter, marmonnai-je.
Les deux garçons rirent ensemble en me regardant mastiquer une aubergine.

Quand j'eus enfin fini mon repas, ils se regardèrent et Morno annonça :
-Maintenant que la princesse a fini son plat, nous pourrions peut-être passer au désert.
- Brocolis confits ? Aubergines au miel ? grommelai-je.

Anor dévoila alors le dernier plat, jusque là recouvert d'une cloche en métal.
- Mousse au chocolat !

***

J'avais beau me tourner, et me retrouver dans mon lit, j'étais incapable de trouver le sommeil. La mousse au chocolat était peut-être un peu lourde à digérer, mais au fond de moi, je savais que c'était pour une autre raison. Les paroles de Tíra, celle de Morno ne cessaient de tourner dans ma tête, en boucle. Je ne savais que faire, que penser. Devais-je avouer à Anor mon amour pour lui ? Devais-je le taire pour ne pas le blesser ?
Tout était si confus.

Je soupirai. Pourquoi ne parvenais-je pas à dormir ? La mission de demain exigeait toutes mes forces et pourtant, mes yeux refusaient de se fermer.
Quand je m'apprêtais à me retourner pour la centième fois, un chuchotement m'appela :
- Iti ?
Je suspendis mon mouvement pour répondre à mon ami.
- Oui ?
- Je n'arrive pas à dormir. Et toi non plus, à ce que j'entends.
Je sentais le sang affluer jusqu'à mes joues.
- Tu veux venir avec moi, pour me tenir compagnie ? me proposa Anor, toujours dans un bruissement de voix.
Je ne me le dis pas dire deux fois. Je me dégageai de ma couverture pour venir me glisser aux côtés du jeune homme. Mon cœur battait à tout rompre. Je me blottis contre son corps chaud, comme pour échapper à la terrible perspective du lendemain.
Il semblait brûlant, comme si une fièvre violente s'était emparée de lui. Mais, à présent que je connaissais mon ami,je savais que c'était sa température habituelle. La température de la flamme qui allait essayer de me protéger. C'était une indication du feu qui brûlait en lui, attendant son heure pour s'échapper et ravager. Il avait voulu m'en protéger, m'éloigner de lui comme de sa malédiction. J'avais vivement refusé, et je ne le regrettais pas. Je ne regrettais rien, sauf la perspective d'avoir quitté mes amies d'enfance pour toujours et d'avoir tu mes sentiments. Je ne craignais pas la mort  ; et si je devais mourir pour une bonne cause, ce serait avec la joie d'avoir accompli mon devoir. J'aurai pourtant aimé de vivre plus longtemps, aux côtés de celui que j'aimais. Si je lui avais avoué mes sentiments plus tôt, si je m'en étais rendu compte avant, l'histoire aurait-elle été différente ? Combien de nuits aurait-on passées comme celle-ci, accrochés l'un à l'autre dans un dernier souffle conscient ?
Une partie de moi refusait de se le demander, par peur des regrets. Après de longues minutes, je réfléchissais toujours, les yeux ouverts fixant l'autre côté de la pièce. C'est alors que mon ami chuchota mon prénom, derrière moi.
- Ithilia  ?
Je ne répondis pas, je ne voulais pas de discours sanglotants, je ne voulais aucun regret.
- Tu ne dors pas ? ajouta-t-il encore.
Comme je fis mine de sommeiller, il continua :
- Tant mieux, après tout. Comme ça, je ne le ferais pas en face.
Il prit une grande inspiration et se lança, toujours en murmurant. J'avais envie de me boucher les oreilles, de crier pour ne pas entendre ce qu'il allait me dire, ce que je savais déjà. Une partie de moi brûlait de l'entendre, l'autre le suppliait de se taire.
Mais j'étais coincée dans mes mensonges.
- Je te l'ai pas dit, je n'aurais jamais eu le courage. Et aussi je m'en suis rendu compte il y a peu de temps. Je voulais pas gâcher notre merveilleuse amitié. Tu es la chose qui compte le plus à mes yeux. Je ne veux pas te perdre. Je ferai tout pour ne pas te perdre. Enfin bref. je cause toujours pour ne rien dire, mais tu y es habituée...

Il marqua une pause, alors que je sentais ma gorge se serrer douloureusement.

- On a passé quoi... trois mois ensemble ? Trois mois, qui me paraissent une éternité. Comme si je t'avais toujours connu. Et c'est tellement plus fort que toutes les amitiés que j'ai connu. Plus fort que mon ancien amour pour Eléonore... Tu as cicatrisée cette plaie, comme les autres. Tu as continué à m'aimer, malgré ce que je t'ai dit, ce que je t'ai fait. Tu as remplacé mes démons, simplement par ta présence. Tu as remplacé le vide qu'avait laissé Eléonore dans mon cœur. Alors quand j'ai entendu les aveux que tu as dit à Morno, tout à l'heure, je me suis senti exploser.

Sa voix s'était brisée, je l'avais entendu malgré les chuchotements. Mes yeux étaient pleins de larmes, je me retenais de sangloter. Tais-toi, Anor, je t'en supplie.
- Et même si je ne le fais pas en face de toi, il faut que je te le dise.

La douleur était insoutenable. Je voulais me retourner, le prendre dans mes bras, tout lui avouer. Mais je restais immobile. Je l'entendis se redresser et se pencher vers moi. Je sentis ses lèvres chaudes embrasser mon front et murmurer :
- Je t'aime Ithilia. Et pas qu'en amitié.


BONJOUUUUUUR
Je suis tellement désolée du retard qu'a pris cette histoire ;-;
GNé, je suis déterminée à la terminer ! Plus que trois ou quatre chapitres, à mon avis. Et puis j'aurais fini ma deuxième histoire sur ce site.

Bref. Ce chapitre est très sentimental, enfin plus que d'habitude mais j'espère qu'il vous aura quand même plu.
Il est dédié aux shipppeurs ( ça se dit ) d' #Ithilnor

En passant, je tiens à faire un petit coup de pub pour deux amis, d'un camp en Allemagne :
AliothD1Avon , dont l'histoire pleine de mystères et de sens cachés saura vous tenir en haleine et vous surprendre
Antahoshi , dont l'histoire fantastique vous projètera dans un monde très différent
( et dont les dessins qui illustrent ses chapitres sont magnifiques !)

Allez, gros câlins à tous, et puis à la prochaine !
( avant six mois on espère )

(( les NDA m'avaient manquées ))

[ARCHIVES] La quête de Valdëa Où les histoires vivent. Découvrez maintenant