15. Kalki

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Autant un Kili'an est-il souvent maladroit, autant possède-t-il une dextérité sans pareille. Épée, manette de jeux vidéo ou joystick ventral de son petit ami, il les manie tous à la perfection ! – Journal intime du premier Aar'on –

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D'un geste ferme, Kili'an bondit en arrière et se jeta sur son fleuret qu'il dégaina aussi sec. Ses adversaires étaient au nombre de trois, ce qui rendait les choses encore plus compliquées. S'il avait parfaitement reconnu le sourire perturbé de la Ztékoj rose contre laquelle il avait déjà failli y passer, les deux autres qui l'accompagnaient n'étaient pas non plus des inconnus. Soupirant la main sur le front, Clé'o semblait au moins aussi dangereux que sa partenaire, si ce n'était plus. Mais celui qui faisait le plus peur au jeune blond, c'était bien l'Humain qui se trouvait avec eux, un des mercenaires les plus efficaces et recherché de tout Vojolakta avec qui il avait déjà croisé le fer à plusieurs reprises.

– Pierr... – souffla l'adolescent. Ça faisait longtemps... Tu travailles pour de simples Âminaux maintenant ? Tes copains de l'anti-humanité ne te payaient pas assez cher ?

Éclatant de rire, l'opposant sortit à son tour son arme, en tous points comparables à celle du jeune soldat. De bons souvenirs lui revenaient à l'esprit, comme toutes les fois où, de sa pointe, il avait éventré et humilié son adversaire. Un mauvais, aussi, se faisait bien présent : la fois où Kili'an l'avait vaincu et obligé à fuir pendant de longs mois avec toute l'armée à ses trousses. S'il y avait bien une chose qu'il n'avait jamais pardonnée à son rival, cela avait été de lui laisser la vie sauve alors qu'il était en mesure de l'achever. Pour cette humiliation, il lui vouait une haine totale et tenait bien à prendre sa revanche.

– Moi, la politique... – rigola-t-il. Je vais là où est l'action ! Quand nos amis communs sont venus me trouver et m'ont annoncé que tu étais une cible, j'ai sauté sur l'occasion ! Et même si c'était mal payé, je n'aurais pas hésité devant la possibilité de te régler ton compte. En garde !

En un contre un, Kili'an aurait eu une chance de s'en sortir. Mais là, il le sentait très mal. Même connaître par cœur son principal adversaire ne lui offrait qu'un bien maigre avantage. Mettant en joue ses opposants et les menaçant du bout de son arme, il cria à ses amis de vite courir se mettre à l'abri. En tant que capitaine, c'était à lui de se sacrifier pour que les autres puissent survivre et mener à bien la mission, même si l'idée de se faire démembrer par deux Ztékojs qui, assurément, en profiteraient pour violer son cadavre ne le réjouissait guère. Et pourtant, il ne pouvait que les comprendre. Un si beau cadavre, il fallait vraiment être stupide ou manquer de goût pour ne pas en profiter un peu. Mais étrangement, alors que son équipe terrorisée émergeait de manière désordonnée des songes et semblait plus que jamais sans défense, les trois affreux semblaient moins pressés de passer à l'attaque que de discuter entre eux.

– N'oublie pas, Pierr – grogna Clé'a, il ne faut pas le tuer. Même si le vieux t'a payé très cher pour sa mort, il n'est pas impossible qu'il puisse m'être utile vivant encore un peu... Je saurais te récompenser...

– Pas de problème. – répondit le mercenaire. Comme je l'ai dit, la politique, moi, j'm'en tape. Ce qui m'intéresse, c'est faire de beaux combats. Et à la fin, le voir avec ses petits yeux tristes et l'entendre et me supplier de l'épargner avec sa petite voix aigüe comme il a osé le faire avec moi. Oui... – rajouta-t-il, haletant. J'vais l'faire souffrir...

Déglutissant de peur, Kili'an passa sa main dans son cou, comme si ce geste que l'Aar'on avait souvent eu avec lui pouvait le calmer d'un stress trop intense. Il connaissait Pierr, et malgré leurs nombreuses batailles, il l'avait toujours admiré. Trop peut-être, ce qui expliquait ses premières défaites avant qu'enfin il ne trouve les ressources pour le vaincre. Et ce qu'il avait déjà fait, il pouvait le refaire. À condition bien entendu que les deux petits Ztékojs se tiennent tranquille, ce qui était très loin d'être gagné.

VojolaktaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant