17. La cage d'Emeraude

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Malo avait rendez-vous avec l'Empereur Néal à huit heures précises dans une petite allée du parc

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Malo avait rendez-vous avec l'Empereur Néal à huit heures précises dans une petite allée du parc. Il n'était qu'à moitié surpris que son père désirât le voir en pareil moment et se doutait que sa petite démonstration de la veille ne devait pas être sans rapport avec l'entrevue.

Il y avait déjà foule dans les jardins. On se penchait par dessus la pelouse pour observer de plus près les curieux bourgeons rouges et luisants qui s'étaient épanouis au profit de l'obscurité. Etrange, disait-on, on n'a jamais vu ça. Mais que s'était-il donc passé cette nuit-là ? Quel miracle avait permis à des milliers de fleurs d'éclore à l'insu du soleil ? Malo passa devant les courtisans en feignant un sincère étonnement puis s'éclipsa discrètement dans une allée moins fréquentée. Son père l'y attendait, sa barbe rousse étincelant dans la lueur matinale, ses taches de son plus envahissantes que jamais, ses yeux bleu clair fixant tranquillement la pelouse écarlate.

— Bonjour, Malo, dit-il en souriant. Une matinée pas comme les autres, n'est-ce pas ?

— Eh bien... Elle me semble tout à fait ordinaire, Père.

— Tu as du talent, poursuivit Néal en faisant mine de ne pas l'avoir entendu. Et une signature très identifiable pour ceux qui te connaissent, Malo. Je ne dois pas être le seul à avoir reconnu ton œuvre dans ce foisonnement de pétales rouges.

Malo n'osa pas répondre. D'ordinaire jovial et enthousiaste, Néal se comportait ce jour-là de manière atypique. Une espèce de tristesse transparaissait dans sa voix et il s'obstinait à ne pas le regarder en face. Malo savait qu'un prénom informulé flottait autour d'eux, pareil à un fantôme. Néal se risquerait-il à le prononcer ?

— Tu lui ressembles tant, Malo. Tu as la même finesse, la même douceur, le même souci de la beauté. Parfois, je t'entends faire des remarques qu'elle-même aurait faites si elle avait encore été là parmi nous.

— Je ne voulais pas vous causer de la peine, Père.

— Au contraire Malo, dit Néal à voix basse en tournant ses yeux bleus vers son fils. C'est le plus beau cadeau que tu aurais pu me faire. Ah, Isabelle. Je n'ai plus jamais été le même, depuis. Tu le sais, n'est ce pas Malo ? Plus jamais le même. Ces maudites tuniques noires... Isabelle voulait que je leur accorde le pardon. Je ne te l'ai jamais dit? Elle avait pitié de ces pauvres enfants.

L'éclat des fleurs vacilla un instant, comme coupé à l'aide d'un immense interrupteur actionné par une main tremblotante. Des « oh » déçus s'élevèrent des quatre coins du parc, vite remplacés par un brouhaha confus.

— Si seulement je l'avais écoutée, Malo, elle ne serait pas morte. Les tuniques noires auraient dû avoir une seconde chance, je le comprends trop tard maintenant.

Malo ne répondit rien. Il tentait de calmer les battements de son cœur qui s'accordaient avec l'extinction des bourgeons. Une seconde chance. Oui, sa mère avait eu raison, incroyablement raison. Isabelle avait tout compris. Une seconde chance. Néal posa une main sur l'épaule de son fils et la pelouse se remit à briller intensément.

Au sortir du TombeauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant