Chapitre IX

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Chapitre corrigé le 04/03/2019

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En revenant à moi, je découvre que la nuit tombée sur le royaume. Un ciel obscur a envahit Ibn Fadhan. En regardant sur la table à chevet près du lit, je trouve un plateau repas avec une infusion à l'odeur envoûtante. Sur mon front, je sens une agréable sensation de fraîcheur, tout comme celle de la porte fenêtre mi-ouverte.

Je me souviens avoir fait un malaise après être parti du salon, bouleversé. Ou du moins, de me sentir suffisamment mal pour en faire un. Depuis quelques temps, rien ne va avec mon corps. Et ce n'est pas à cause de cette morsure à l’épaule… une sensation bien plus profonde en moi me ronge de l'intérieur mais je suis incapable de comprendre d'où elle me vient. Quelque chose que je n'arrive pas à décrire est en train de m'arriver.

Mais les mots me manquent…

Cela doit provenir de mon imagination. Entre ma blessure et les dernières révélations, je crois que tout mon être est à bout, fatigué. Tout est si soudain. En attendant, je me laisse retomber sur le matelas moelleux, fixant le lustre suspendu au plafond pour méditer.

—Tu es réveillé ?
—Euh ?

En me redressant, j’ai l’adorable surprise de voir Lionel que je n'ai pas vu directement à mon réveil. Le renard monte sur le lit, prenant ainsi le plateau qu'il pose sur mes genoux. Je souris devant cette magnifique vue pleine de nourriture qui aggrave ma faim.

—J’ai encore perdu connaissance ?
—Oui.

Je ris nerveusement, regardant la Lune du coin de l'œil. Décidément, je suis un boulet pour tout le monde. Je ne fais que pleurer et m'évanouir. Devoir supporter un époux comme moi ne doit vraiment pas être tous les jours facile pour mon compagnon. Cette pensée qui traverse mon esprit me donne envie de pleurer

—Je suis désolé. Encore une fois, je cause des soucis à tout le monde.
—Estel, pardonne moi pour cette question embarrassante mais est-ce que tu t'es…

Mais le renard hésite un instant avant de poursuivre. Avant la salive, il prend quelques instants pour réfléchir avant de se jeter à l’eau. Il semble mal à l'aise d’aborder un sujet qu'il n'a même pas encore exposé, mais je suis patient. J'attends sagement qu'il veuille me parler.

—Toi et Daeron ne vous êtes pas protéges pas, n’est-ce pas ?

Ah ? Ça me revient. Il m’avait vaguement parlé de la même chose la dernière fois aussi. Mais avec Daeron, je n'ai rien pu comprendre car ce dernier a évité le sujet quand je lui ai demandé des explications. Mais je ne comprends pas, nous protéger de quoi ? Depuis que je fais l’amour avec moi, je me sens mieux physiquement et moralement.

—Nous protéger de quoi ?

D'un petit bond, il saute du lit. Une fois qu’il retrouve le contact du sol, il se tourne vers moi en réajustant la cuculle de sa veste.

—Claude t'a longuement examiné sur ordre de sa Majesté, pendant ton sommeil.

Je rougis. Claude m'a examiné pendant que j’étais inconscient !

—Hein ?

Puis je réalise que... Que Daeron s’inquiète pour moi.

—Tu attends des petits.

Je regarde Lionel sans réaliser ses propos. Le temps se fige autour de moi. Je laisse l’étonnement se lire sur mon visage car sur l'instant, je ne crois pas avoir bien compris ce qu’il vient de dire.

—Des…b-bébés ? Tu veux dire des bébés, comme…avoir d-des enfants ?!
—Oui.

Comment est-ce possible ? Je sais que Daeron peut me mettre enceint et que personne ne m'a caché ma grande fertilité, mais quand même… je réalise alors les mots de mon ami et de qu'il entendait par là en parlant de se protéger. J-J'ai bêtement ignoré le sujet sans même me poser des questions.

Je reste sans voix.

Une légende dit que les bêtes et les humains peuvent s'unir depuis toujours. J’ignore d’où cette pensée vient, mais il faudrait remonter vers un passé à des milliers d'années de notre présent pour en comprendre l'origine.

—Il doit y avoir mépris ?

Je tente de me persuader du contraire. Je crois aux révélations de mon ami, je n'en doute pas, mais la nouvelle est bien trop soudaine à encaisser. De toutes celles que j’ai apprises ces derniers temps, celle-ci reste la plus brutale. La plus bouleversante.

—Tu ne t'es pas protégé pendant tes rapports avec sa Majesté.

Comment vais-je faire ? Le Conseil nous menace et porter un enfant est trop soudain ! La responsabilité est bien trop importante pour un garçon comme moi qui peine à trouver sa place dans ce monde.

— J-Je porte l'enfant de Daeron…

Inconsciemment, je fonds en larme. Tristesse, ou joie ? Je ne sais pas. Mais je sais que je ne suis pas dans un état normal. Mon corps était en train de me passer un message important depuis quelque temps mais je l'ai ignoré.

—Estel. Tu attends trois bébés.
—HEIN ?!

C'est la réplique de trop. Je manque de mourir d'une crise cardiaque et tousse suffisamment fort pokr le faire mal à la gorge

—Il est important de mettre des préservatifs et de prendre un traitement adapté quand tu ne veux pas tomber enceint en t'unissant avec le roi.

Les bêtes ne tombent pas malades par voie sexuelle et si je l’étais, il me serait impossible de contaminer Daeron. Les protections servent uniquement à éviter les grossesses mais je n'ai pas pris assez de recul sur les mots de Lionel quand il me mettait en garde.

—Et Daeron est au courant, n'est-ce pas?
— Oui.
—Qu'est-ce qu'il a dit à propos de... Ça ?

Le doute envahit ma conscience et la peur de l’abandon grandit en moi, semant une pagaille ingérable dans mon esprit.

—Sa Majesté souhaite en discuter avec toi.

Daeron a du être chamboulé par l'annonce de cette nouvelle. J’ignore vraiment si je réalise ce que je viens d’apprendre mais je dois le voir aussi. J'ai besoin de lui parler et de connaître sa pensée. De le sentir près de moi et d'entendre sa voix rauque me dire que tout ira bien.

Lionel me raconte ensuite que le sperme des bêtes est puissant. Rare sont les bébés uniques. Cela explique le nombre important que je porte en moi. Et si la grossesse est plutôt rapide, elle n'est pas dangereuse pour celui qui l'a porté.

Seulement, est-ce bien raisonnable qu'un enfant en élève un... Autre ?

Daeron est le genre de bête à ne pas vouloir communiquer alors que je suis son compagnon. Sa nature bestiale le condamne à agir ainsi. Et je pense que Daeron et moi ne sommes pas prêts à endosser une telle responsabilité à cause de mon histoire.

Encore une fois, le problème vient de moi. N'ayant pas eu une réelle enfance, j’ignore comment procéder. Je ne me souviens pas de mes parents. Je ne sais rien de ma famille alors comment puis-je donner cette image de moi à des enfants ?

—Où est-il ?

Je saisis Lionel par les épaules en me redressant de ma place. Je dois le voir. Je dois m’entretenir avec lui pour comprendre ce qui se passe. Je ne veux pas être le seul à ressentir ça. J'ai besoin de connaître son avis, ses sentiments et savoir s'il veut bien encore de moi à ses côtés.

Alors pris par une détermination de grande envergure, je n'attends pas que mon ami réponde pour sauter de mon lit. Je me lève pour partir à sa recherche tout de suite. Je dois le voir maintenant. Savoir qu'il a suffisamment confiance en moi pour que j’élève ses enfants est la seule chose que j’ai besoin d'entendre.

Je n'ai pas pris en compte les conseils de Lionel et lui n'a jamais fait en sorte pour que le contraire se passe. Nous sommes tous les deux responsables de cette situation.

Il ne s’agit pas d'un bébé, mais de trois. Alors si Daeron est prêt, je les mettrai au monde. Je n’ai pas peur d’accoucher de trois petits, mais de les rendre malheureux à cause de moi.  Je ne veux pas infliger à des enfants ce que j’ai vécu.

La famille que je n'ai jamais eu se trouve peut-être en moi.

Je n'ai jamais connu l’amour d'un père et d’une mère malgré le fait que Daeron m'a élevé, il s'est occupé de moi quand j'en avais eu le plus besoin.

HIS SOUL BOND 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant